60 ans de Ssangyong (à peu près)

Ssangyong souffle ses 60 bougies. L’occasion de revenir sur le parcours tortueux du plus petit constructeur coréen, de la Jeep sous licence à Mahindra, en passant par les 604 et les Mercedes…

Dong-A

L’histoire de Ssangyong est pleine de fusions-acquisitions. Le nom « Ssangyong » n’apparut que dans les années 80. 1954 correspond à la fondation de Ha-Dong-Hwan, un modeste constructeur d’autocars. En 1962, il fusionne avec son compatriote DongBang Motor. A la même époque, Gukje Motors récupère les Jeep des surplus militaires US et les transforme en véhicules civils rustiques. Mystérieusement, Gukje fait faillite (il gênait ?) et Ha-Dong-Hwan récupère le business. Tout aussi mystérieusement, il décroche des appels d’offres concernant la fourniture de tout-terrain pour l’armée. Ces véhicules militaires sont des clones de Willys.

Ha-Dong-Hwan se diversifie dans les autobus et les poids-lourds. Encouragé par l’état, il commence à exporter. A ce titre, il se rebaptise « Dong-A », ce qui est plus facile à prononcer hors de Corée du Sud.

Shinjin Jeep

Asia Motors, qui assemble des Fiat 124 en CKD, crée une filiale ad hoc, Shinjin Jeep. Cette dernière a obtenu d’AMC la licence de fabrication des Jeep civiles (donc quasi-identiques aux véhicules militaires de Dong-A.) La CJ-7 devient Korando (Korean can do.) Asia profite du savoir-faire yankee pour produire en parallèle un clone, le Rocster.

Asia Motors rajoute une 3e corde à son arc : un accord avec Peugeot concernant l’assemblage de 604. Les voitures sont vendues par Asia, mais assemblées chez Shinjin.

Panther

En 1979, Asia Motors se scinde en deux. Kia devient actionnaire de la division principale, qu’il finira par absorber dans les années 90. Dong-A s’offre Shinjin Jeep et rebadge le Korando. En 1986, l’ambitieux chaebol Ssangyong Group rachète Dong-A, qui devient Ssangyong Motor. Le Korando change une nouvelle fois de badge. Il est rejoint par le Korando Family, un Isuzu Trooper produit sous licence.

Ssangyong Group rêve d’expansion internationale. L’Anglais Panther, ruiné par le développement du coupé Solo, est une prise de choix. Le management coréen brille par son incompétence (à son corps défendant, Panther va à vau-l’eau.) Il décide d’investir en Grande-Bretagne, puis d’arrêter la Solo, puis de rapatrier la J72 en Corée du Sud. Quelques roadsters made in Korea plus tard, Panther disparait.

Mercedes

Ssangyong Group veut alors se muscler dans les 4×4. Il se rapproche de Mercedes. Ce dernier y voit un moyen de pénétrer un marché très fermé, mais qui connait une forte croissance. La firme à l’étoile devient actionnaire et lui offre ses mécaniques. La conséquence la plus visible, c’est le démarrage de la production du minivan M100 (alias Istana.)

Il exporte timidement ses Korando et Korando Family en Europe. Pour se faire connaitre, il mise sur le sport auto. Il se rapproche de WR (un temps lâché par Peugeot) et vise les 24 heures du Mans 1997.

Enfin, il obtient l’outillage de la Mercedes 200/300 (W 124) qu’il relooke en Classe S. La Chairman, première berline depuis la 604, est censée inaugurer une gamme de voitures premium.

Daewoo

Les rêves de Ssangyong Group prennent brutalement fin avec la crise asiatique. L’état impose un démantèlement de Ssangyong Group, en faillite. La branche auto est vendue à Daewoo, qui reprend à son compte les modèles. Bien sûr, les projets de gamme premium et les programmes sportifs sont envoyés aux orties. Les poids-lourd et autocars sont dissous (car ils auraient fait doublon avec ceux de Daewoo.)

Grâce à Daewoo, il réussit à prendre le virage des SUV, avec le Rexton (qui sortira en 2001.)

SAIC

Hélas, le nouveau propriétaire s’effondre à son tour et il finit lui aussi par imploser. En 2000, GM reprend une partie de l’activité automobile. L’ex-Ssangyong ne fait pas parti du périmètre et il est revendu. La marque réapparait, même si elle n’a plus rien à voir avec Ssangyong Group. En 2004, SAIC en reprend 25 %. C’est d’ailleurs la première grande acquisition d’un constructeur chinois à l’étranger. Ssangyong poursuit sa stratégie de « SUVisation ». Le Rodius/Stavic est une tentative de mix entre monospace et SUV.

Peu après, MG-Rover est à l’agonie et SAIC lorgne sur le morceau. Le constructeur britannique fait faillite en 2006. Les Chinois récupère plusieurs morceaux de Rover (le rival NAC a mis la main sur MG), qu’il doit renommer Roewe (pour des raisons de copyright.) Rover/Roewe a un besoin urgent de nouveautés. La stratégie de SAIC consiste donc à dépouiller Ssangyong. Les travaux sur l’hybridation, la berline Chairman (alias 960) et le Kyron (alias W5) traversent la mer de Corée.

Pour se donner une image, les Coréens tentent la carte du design « clivant ». Le Kyron et surtout l’Actyon choquent volontairement. Mais cela lui donne surtout l’étiquette de spécialiste du SUV moche. Qui plus est, il est victime des normes anti-pollution (bonus/malus, péage urbain…) qui fleurissent en Europe et marginalise les SUV. Les ventes plongent. SAIC, déjà peu apprécié en Corée, refuse de mettre la main à la poche. Les ouvriers se barricadent et brûlent des véhicules.

Mahindra

En 2011, le sauveur est cette fois Indien. Mahindra récupère le bébé. Ssangyong est revenu à des design plus consensuels, inaugurés par le Korando (2011 ; aucun rapport avec la CJ7 de Shinjin), puis le Rexton W. Les Indiens veulent redéployer Ssangyong à l’international (Chine, Russie, Afrique…)

Les ventes remontent (il peut remercier aussi la reprise du segment des SUV en Europe.) Notez qu’il y a de nouveaux des Ssangyong en course, grâce à une coupe monotype d’Actyon Sports, en Nouvelle-Zélande :

L’avenir s’annonce radieux, avec le très attendu SUV compact, dérivé du concept-car XLV. Il devrait voir le jour en 2015 et lui permettre d’agrandir sa base.

Plus surprenant, Ssangyong s’est réconcilié avec SAIC. Il lui donne ainsi la plateforme du Korando pour le futur SUV MG.

Crédits photos : Ssangyong, sauf photo 2 (musée de San Diego), Peugeot (photo 4), Pyeonghwa (photo 8), Roewe (photo 11) et MG (photo 16)

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