10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 7. ils ont 10 ans d’avance sur les voitures électriques

Pour certains, l’industrie automobile Chinoise est une espèce d’antéchrist. Ils craignent qu’elle n’envahisse le monde avec ses copies, vendues à des prix cassés et qu’elle finisse par racheter tous autres les constructeurs. D’autres voient au contraire l’automobile Chinoise comme un messie, qui apporterait des voitures électriques au monde entier.

Comme beaucoup de stéréotypes sur les voitures Chinoises, l’équation Chinois=experts en voitures électriques remonte à 2005/2006. Tout le monde, y compris les professionnels, entend alors parler pour la première fois de voitures Chinoises. Faute de recul, ils ont pris pour argent comptant les déclarations de leurs représentants.

Pour Pékin, il y avait un axe de communication (pour ne pas dire de propagande) fort. Souligner les travaux supposés sur les voitures hybrides et électriques permettait de donner une image positive à son industrie. Et faire oublier du même coup les problèmes de contrefaçon, de protectionnisme ou de sécurité.

D’autant plus qu’à l’époque, Al Gore n’a pas encore produit Une vérité qui dérange et que la Prius II arrive à peine. Bref, les Chinois parlaient de voitures électriques avant que les préoccupations environnementales ne refassent surface et que les autres constructeurs ne s’y intéressent.

Ajoutez-y une certaine candeur des occidentaux. S’ils n’ont jamais entendu parler de voitures Chinoises auparavant, ça veut dire que les Chinois ne produisaient pas de voitures, non? Et s’ils ne produisaient pas de voitures, leurs esprits ne sont pas manipulés par les lobbys pétroliers, non? Donc, si leurs esprits sont purs, eux seuls sont à même d’adopter les voitures électriques, non?

Construire une voiture électrique, ce n’est pas compliqué. Robert Davidson en a conçu une en 1842, plus de 40 ans avant les voitures à pétrole de Karl Benz et Gottlieb Daimler!

Vous voulez convertir votre voiture à l’électrique? Il vous suffira d’un moteur électrique et de batteries. Si vous êtes un mécanicien chevronné, ça ne vous prendra qu’un jour et demi.

Mais cela fait près de 170 ans que les Hommes buttent sur les même points: autonomie, poids des batteries (donc performances), « effet mémoire » des batteries (elles ne se rechargent pas totalement et finissent par ne plus se recharger) et temps de charge (qui se compte en dizaines de minutes, voir en heures.) Ajoutez-y des préoccupations contemporaines: maintenance (on ne peut pas « débrancher » une électrique), recyclage des batteries et infrastructures pour recharger sa voiture. Vous comprenez alors pourquoi la plupart des généralistes ont fini par dire: « C’est trop compliqué, on abandonne. »

En conséquence, l’automobile électrique est un serpent de mer qui refait surface à chaque crise énergétique (deuxième guerre mondiale, crise de 1973, guerre du Golfe…) et disparait souvent aussi vite.

Alors, par quel miracle les Chinois pourraient débarquer et solutionner d’un seul coup ces problèmes centenaires?

Les voitures hybrides et électriques Chinoises, ce sont surtout des prototypes (non-roulants) de salons.

Régulièrement, un modèle était présenté dans une cours d’université ou devant une usine, avec un discours ronflant.

En vu des Jeux Olympiques de Pékin, en 2008, le ministère des sciences a commissionné les constructeurs Chinois de fabriquer des hybrides en petite série. Ils devaient transporter les VIP. L’objectif était de profiter des J.O. pour donner l’image d’une Chine qui fait de gros efforts en matière environnementale. Loin des images de sites lourdement pollués et de villes enveloppés d’un brouillard permanent.

Une action similaire eu lieu lors de l’exposition Universelle de Shanghai de 2010.

Mais les voitures conçues pour ces évènements restèrent sans lendemain.

Pourquoi n’ont-ils pas industrialisé les véhicules de pré-série des Jeux Olympiques de Pékin?

On peut supposer, compte tenu du délai de conception (quelques mois), qu’il s’agissait de bricolages. Concevoir des versions fiabilisées, avec un prix de vente acceptable pour le public, demanderait beaucoup d’efforts. Il faudrait repartir quasiment de zéro.

Le point principal, c’est l’absence de demande. On l’avait évoqué avec la sécurité: la plupart des généralistes Chinois font preuve d’un cynisme absolu. Mis à part Byd et Geely, ils n’ont pas de grandes orientations plus ou moins utopiques. Ils veulent uniquement vendre un maximum de voitures possible, avec le minimum de cout de développement possible.

Or, jusqu’il y a peu, l’un des seuls point commun des 75 millions d’automobilistes Chinois, c’était l’absence de préoccupation environnementale. Ils s’intéressaient davantage au confort ou à l’aspect statutaire. En occident, dans chaque communiqué de presse (y compris dans le secteur du luxe), le constructeur se sentira obligé de dire qu’il fait une B.A. environnementale (réduction des émissions de CO2, utilisation de matériaux recyclables, etc.) A contrario, en Chine, les émissions de CO2 n’apparaissent même pas dans la fiche technique d’un modèle. L’état annonce l’alignement obligatoires des constructeurs aux normes Euro IV, mais il n’explique pas à quoi cela correspond. Le seul critère d’achat vaguement environnemental, c’est la consommation d’essence.

Les catastrophes écologiques ont souvent lieu dans les régions pauvres ou reculées (c’est d’ailleurs pour cela qu’elles arrivent là.) Les médias nationaux minorent ou ignorent les faits. Les citadins sont donc peu au fait de la situation de leur pays et ils n’ont rien à fiche de la pollution. Il existe pourtant, dans les grandes villes, une écologie boboïsante à l’instar d’Europe Ecologie.

Mais imaginez que vous êtes le portrait-robot de l’acheteur Chinois des années « 00 »: un cadre trentenaire de Pékin ou Shanghai. Quand vous étiez petit, les rues étaient pleine de vélos et dans les boutiques, on ne trouvait que le costume « Mao ». Maintenant, vous gagnez en un mois ce que vos parents touchaient en un an (et encore, en fin de carrière.) Vous pouvez vous acheter une voiture, un iPhone, une TV full HD et plein de gadgets. Vous voulez consommer! Puis quelqu’un vous aborde et vous dit: « Tu pollues! N’achète pas de voitures, reprend ton vélo! » Est-ce que vous lui répondriez poliment?

En décembre 2005, Toyota démarra bruyamment la production de la Prius II à Chengdu. C’était la première fois (et la seule à ce jour) qu’une Prius était produite hors du Japon. Le constructeur comptait bien défricher le marché des hybrides en Chine et toucher le jackpot à terme. En 2006, il espérait 3 000 ventes. Seules 2 152 Prius trouvèrent preneur et en 2007, au lieu de progresser, le chiffre tomba à 414 unités. FAW-Toyota baissa ensuite légèrement le prix de la Prius, mais malgré tout, les ventes mensuelles continuaient de chuter. Certains mois, il ne se vendait même aucun véhicule! En 2009, la Prius « Chinoise » disparu discrètement des chaines. L’importation de la Prius III en Chine n’est pour l’instant qu’un projet.

Pour les Chinois, la Prius II était une mauvaise blague. Pourquoi dépenser 260 000 yuans (le prix d’une Classe C ou d’une BMW série 3) pour ça?

Aujourd’hui, le seul fabricant de voitures hybrides en Chine est Byd. Wang Chuan Fu, son fondateur, a été auparavant chercheur universitaire dans les batteries de téléphones portables. En 2004, il rachète le modeste constructeur Tsinchuan, qui devient Byd Auto.

Le premier modèle de Byd est la F3, en 2005. Une version électrique (F3e) et hybride (F3 DM) sont présentées dans la foulée. Contrairement aux autres constructeurs, Byd a persévéré.

Le tournant a lieu à l’automne 2008. Le milliardaire Américain Warren Buffet s’offre 10% du constructeur. Le cours de l’action s’envole. Buffet veut faire de Byd l’expert de la voiture propre à prix Chinois et il projette de l’amener sur le marché Américain.

Côté Chinois, le planning est optimiste: F3 DM produite en série fin 2008, monospace e6 courant 2009, puis F3e et F6 DM (version hybride de sa grande berline F6) en 2010.

En fait, Byd n’a pas réussi à développer à temps la F3 DM et elle n’est proposée qu’aux collectivités, qui doivent déverminer l’hybride. Les collectivités ne se bousculent pas pour l’acheter. En plus, Byd espérait une aide de l’état pour baisser le prix de vente, mais l’aide se fait attendre.

Byd lance malgré tout la F3 DM au printemps 2010. Suivie peu après par l’e6. Les F3e et F6 DM semblent avoir disparu des plannings. Néanmoins, le constructeur se veut optimiste et évoque 10 000 voitures (F3 DM + e6) en 2010.

Que valent ces voitures propres « made in China »? Elles étaient présentes au dernier salon de Genève. Les conclusions des espions envoyés par les constructeurs occidentaux étaient sans appel: « Bricolage. Impossible à industrialiser en l’état. Il se moque du monde. » Et pourtant, aujourd’hui, ils sont commercialisés!

Par contre, les journalistes Chinois les boudent totalement et ils n’ont pas réalisé d’essai complet. Il faut se fier aux fiches techniques de Byd. Les mauvaises langues auront noté que l’autonomie de l’e6 font comme neige au soleil: 440km au salon de Détroit 2009, 330km à Genève 2010 et 300km aux dernières nouvelles. En même temps, que le constructeur qui n’a pas exagéré l’autonomie de ses voitures propres lui jette la première pierre…

Mais quoi qu’il en soit, les Chinois sont rebutés par le prix: la F3 DM vaut 150 000 yuans, soit le prix de deux F3 « normales ». L’aide gouvernementale tant attendue n’est finalement que de 3 000 yuans; pas de quoi transformer la citrouille en carrosse. En comptant large, après 4 mois, les ventes cumulées des F3 DM et e6 dépassent tout juste la centaine d’unités.

En conséquence, les actionnaires s’affolent et le titre Byd chute. Ce qui aurait du leur mettre la puce à l’oreille, c’est qu’en 1997, les Japonais étaient davantage concernés par l’environnement que les Chinois en 2010. Et pourtant, seul 300 voitures d’entre-eux avaient acheté une Prius, l’année de son lancement.

Et les autres constructeurs Chinois? En matière de voitures propres, les effets d’annonces sont un sport très pratiqué par les constructeurs. Il suffit de regarder par exemple les 400 communiqués (au moins) de GM sur la Chevrolet Volt (que l’on attend encore en concession) ou la 308 3008 508 Hybrid4 qui sera lancée en 2009 2010 2012 un jour de Peugeot.

Or, s’il existe un domaine où les constructeurs Chinois sont les rois, c’est celui du pipeau.

Parmi les projets a priori sérieux, il y a Chery, qui s’est associé à Better Place (déjà partenaire de Renault.) Début juillet, il fournissait une poignée de citadines électriques QQ à des clients-tests (ci-dessous.)

Lifan aurait un projet dans l’électrique. Un bon moyen pour ce minuscule généraliste de se faire remarquer. Il a annoncé une citadine électrique 320 EV, alors qu’il a construit une poignée de berlines 620 EV pour l’exposition universelle de Shanghai.

Reste Hybrid Kinetic. Yang Rong a toujours cherché à se distinguer de la masse des constructeurs Chinois. C’est pour cela que dans les années 90, il s’oriente vers les voitures premium et fonde Brilliance.

Chassé de son entreprise, (au sens propre) Yang tente un come back avec les hybrides et les électriques. Hybrid Kinetic dispose d’une ambition et de moyens, à défaut de savoir-faire. Reste que le contrat avec le constructeur JAC a été paraphé il y a tout juste une semaine et que les travaux de recherche ne devraient débuter que dans les prochains mois.

Hybrid Kinetic évoque un premier lancement en 2012 et personnellement, je mettrais plutôt la barre à 2015.

Bref, Byd est prêt, mais ne vend quasiment rien. Chery et Lifan sont peut-être presque prêt. Quant à Hybrid Kinetic, il n’est pas près d’être prêt! On est loin de l’image d’un pays sur le point de nous inonder des voitures électriques « à prix Chinois ».

La grosse inconnue, c’est la demande Chinoise. Les constructeurs ne bougeront pas tant qu’elle ne décollera pas.

Depuis quelques mois, il semblerait que certains citadins soient excédés par le brouillard permanent. Pour eux, la seule solution viable pour retrouver un air pur est le recours aux véhicules électriques.

Mais comme tout le monde, les citadins Chinois veulent des électriques. Mais ils attendent que le voisin en achetait une en premier, qu’il essuie les plâtres et lorsque l’électrique sera prêt, ils en achèteront une!

Pour reprendre la première des sept règles de Bob Lutz (sept règles censées faire de vous un constructeur prospère…): mieux vaut éviter de demander aux gens le type de véhicule qu’ils voudraient acheter. Ca n’aura rien à voir avec le type de véhicule qu’ils vont acheter.

Bonus: les écologistes hardcore (comme Cécile « Air France » Duflot) se plaignent que les voitures électriques ne sont pas réellement écologiques. Au motif qu’en Europe, lorsque vous les rechargez, vous le faites avec de l’électricité provenant du nucléaire. Mais en Chine, savez-vous d’où provient l’électricité avec laquelle Boboland veut recharger sa voiture? Des centrales à charbon. Centrales qui ne sont souvent pas aux normes environnementales (mais que Pékin laisse tourner car le pays a besoin d’électricité coute que coute.) Et dire que Boboland est persuadé que plus il y aura de voitures électriques dans les villes Chinoises, moins il y aura de nuages toxiques…

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10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 2. ce sont les rois du low-cost

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 3. ils ne font que copier

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 4. Ils vont racheter plein de constructeurs

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 5. ce sont des cercueils roulants

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 6. il y a 1000 constructeurs Chinois

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 8. les Chinois veulent ceci, les Chinois veulent cela

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 9. de toute façon, l’état contrôle tout

10 stéréotypes (vrais ou faux) sur les voitures Chinoises: 10. leur industrie est en surchauffe

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