Le véhicule électrique, risque social selon C. Tavares
par Thibaut Emme

Le véhicule électrique, risque social selon C. Tavares

Le patron de Stellantis, Carlos Tavares, dresse un portrait un peu alarmiste de la bascule vers le tout électrique. Il pointe le risque de casse sociale.

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Carlos Tavares, même du temps où il chapeautait PSA, a toujours fait preuve publiquement de réserves envers le véhicule électrique. Non pas qu'il ne le trouve pas intéressant. Mais, il a toujours souligné le caractère dangereux d'un passage au VE forcé. Or, avec le règlement européen CAFE qui fixe des objectifs d'émissions de CO2 par constructeur, le VEB est quasiment obligatoire pour tenir les objectifs et éviter les lourdes pénalités financières.

Sur ce passage forcé, qui met déjà en péril l'industrie automobile avec des coûts de développement énormes pour passer à l'électrique, s'ajoute désormais une ligne d'horizon à partir de laquelle les véhicules thermiques seront interdits à la vente. Cette ligne est fixée à 2035. Cela peut paraître loin, mais pour l'industrie automobile, c'est à peine deux générations d'un véhicule automobile.

Et c'est cette interdiction d'ici 13 ans que Carlos Tavares considère comme un "risque social". Pourquoi ? Car pour électrifier la gamme, les constructeurs vont certainement devoir tailler dans les coûts. Hélas, l'humain est encore trop souvent la variable d'ajustement. Une transition oui, mais en douceur. Si on voulait paraphraser le patron de Stellantis.

Une technologie choisie par les politiques

"Ce qui est clair, c’est que l’électrification est la technologie choisie par les politiques, pas par l’industrie". Carlos Tavares s'est exprimé auprès de quatre grands quotidiens européens : Les Échos, Handelsblatt, Corriere della Sera et El Mundo. "Ne pas regarder l’ensemble du cycle de vie des voitures électriques est évidemment très restrictif".

Tavares pointe là quelque chose que nous expliquons régulièrement à leblogauto.com. Avec le mix énergétique européen, pour fabriquer un véhicule et une batterie, il ne faut en gros que 50 à 80 000 km pour qu'un véhicule électrique compense la surproduction d'équivalent CO2 due à la batterie (plus sur l'électricité est fortement carbonée). En revanche, un véhicule produit en Chine par exemple aura une empreinte carbone largement plus importante. Pour autant, ce véhicule coûtera moins cher à produire et aura les mêmes bonus et avantages fiscaux.

Aussi, produire "plus vertueusement" en Europe n'est pas soutenu par l'Europe. Carlos Tavares regrette aussi que l'Europe ne veuille pas passer par la transition des véhicules hybrides. Pourtant, ils permettent de réduire la facture CO2. Mais, l'Europe les balaie pour le moment en ne parlant que de véhicule électrique. Ces véhicules, plus chers à produire, excluront de fait certains ménages européens. Carlos Tavares parle même des classes moyennes qui ne pourront plus acheter un véhicule neuf.

La casse sociale sera alors, selon lui, à la fois pour les ouvriers, mais aussi pour les acheteurs. "Il est donc trop tôt pour dire si l’approche européenne est raisonnable" tance-t-il. Et de plaider pour les hybrides.

Pourquoi les hybrides sont évacués de l'équation ?

"Au total, vaut-il mieux accepter de faire rouler des voitures hybrides thermiques très performantes pour qu’elles restent abordables et apportent un bénéfice carbone immédiat, ou faut-il des véhicules 100 % électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux États de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner ? C’est un débat de société que je rêverais d’avoir, mais, pour l’instant, je ne le vois pas".

Tavares joue même les Cassandre en prédisant qu'il y aura des constructeurs qui disparaîtrons. "Nous verrons dans quelques années les constructeurs qui auront survécu et les autres. Sans transition progressive, les conséquences sociales seront majeures. Mais nous ne sommes pas seuls. Nous avons tout un écosystème de sous-traitants autour de nous. Il va falloir qu’ils bougent aussi rapidement que nous".

Cette casse, certains la voient déjà dans les difficultés subies par les fonderies, mais aussi d'autres équipementiers. Pour limiter les surcoûts dus à l'électrification, estimés à +50% sur le coût d'un véhicule, l'industrie automobile va devoir trouver d'énormes gains de productivité, baisser les coûts fixes, etc. D'ailleurs, l'ex-PSA en sait quelque chose car pour éviter de mourir ou de se faire absorber, PSA a choisi de se marier avec Fiat Chrysler pour créer Stellantis. Plus gros, ce géant de l'automobile compte dégager des économies et des synergies.

"C’est la brutalité du changement qui crée le risque social".

Notre avis, par leblogauto.com

En jouant les oiseaux de mauvais augure, Tavares tente un lobby auprès des dirigeants européens. Mais, dans le même temps, il envoie un signal aux salariés du groupe Stellantis : il va falloir gagner en compétitivité. En clair, des sites, en Europe ou ailleurs, pourraient (seront ?) fermés au cours des 10 à 15 ans à venir.

Le VE sera montré du doigt. En France, les négociations avec les syndicats sur les effectifs vont reprendre le 1er février. Tangage à venir ?

Illustration : Stellantis

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Pour résumer

Le patron de Stellantis, Carlos Tavares, dresse un portrait un peu alarmiste de la bascule vers le tout électrique. Il pointe le risque de casse sociale.

Thibaut Emme
Rédacteur
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