La Cour de justice de l'UE (CJUE) a donné raison à l'Autriche, qui avait pris la tête des pays limitrophes hostiles à cette vignette d'un montant pouvant atteindre 130 euros par an, dont la mise en application était prévue en octobre 2020.
Selon l'arrêt rendu par les juges basés à Luxembourg, cette mesure concernant les véhicules particuliers utilisant des routes fédérales, dont les autoroutes, est "contraire au droit de l'Union", comme le faisait valoir Vienne.
Il faut "respecter et accepter" le jugement, a réagi devant la presse le ministre allemand des Transports, Andreas Scheuer, admettant que le péage était désormais "malheureusement écarté" sous sa forme actuelle.
Objet de tensions depuis plusieurs années entre Berlin et ses voisins, cette "redevance d'utilisation des infrastructures" concerne aussi sur le papier les propriétaires et conducteurs de véhicules immatriculés en Allemagne.
"Discrimination indirecte"
Mais contrairement aux automobilistes étrangers, ceux-ci bénéficient d'une compensation: elle prend la forme d'une exonération d'une autre taxe, à hauteur d'un montant au moins équivalent à celui de la redevance litigieuse.
Du fait de cette exonération, la redevance allemande "constitue une discrimination indirecte en raison de la nationalité et une violation des principes de la libre circulation des marchandises et de la libre prestation des services", a estimé la CJUE.
Car la "charge économique de ladite redevance pèse, de fait, sur les seuls propriétaires et conducteurs de véhicules immatriculés dans d'autres Etats membres", ont expliqué les juges.
Comme le faisaient valoir les pays limitrophes, les mesures prévues "sont susceptibles d'entraver l'accès au marché allemand des produits en provenance d'autres Etats membres", ainsi que l'accès "des prestataires et des destinataires de services provenant d'un autre Etat membre", a ajouté la Cour.
L'Allemagne a l'obligation de se conformer à cet arrêt "dans les meilleurs délais". Si elle ne le faisait pas, elle s'exposerait à des sanctions financières.
L'arrêt rendu mardi est un désaveu pour Berlin, qui avait fini par convaincre fin 2016 la Commission européenne de la légalité de son dispositif, notamment en baissant le tarif prévu pour les automobilistes de passage dans le pays.
L'Allemagne avait obtenu un feu vert pour une vignette annuelle pouvant atteindre 130 euros (en fonction de la cylindrée) pour les véhicules immatriculés en Allemagne, et des vignettes au choix pour les autres, de dix jours (2,5 à 25 euros), deux mois (7 à 50 euros) ou une année (130 euros au maximum).
"Gifle"
Mais les pays limitrophes où résident de nombreux travailleurs frontaliers se rendant quotidiennement en Allemagne n'avaient pas été convaincus par les modifications apportées par Berlin.
Ils avaient reçu le soutien du Parlement européen, qui avait lui aussi regretté le feu vert de Bruxelles, jugeant que "tous les usagers" doivent payer "le même prix pour l'utilisation des routes".
Le ministre autrichien des Transports, Andreas Reichhardt, a salué le jugement "remarquable" de la CJUE, et dit attendre que Berlin retire son projet ou le modifie en profondeur.
"Nous sommes prêts à mettre notre savoir-faire à votre service, si vous le souhaitez", a-t-il proposé à ses homologues allemands.
Les deux principales associations d'automobilistes autrichiens étaient aux anges. "C'est un soulagement pour 1,8 million d'automobilistes", le nombre estimé de ceux qui en Autriche auraient dû s'acquitter de la vignette, selon l'une d'elle, l'ÖAMTC.
"Ce péage aurait été une discrimination envers les étrangers et en plus une opération à perte, ce jugement est une gifle pour le gouvernement", a réagi de son côté le chef de file des Verts allemands au Bundestag, Anton Hofreiter.
Par AFP