La vengeance est un plat qui se mange froid, comme une bonne mujaddara en été à Beyrouth. Ghosn n'en a toujours pas fini avec Nissan, et inversement. L'emblématique patron continue de clamer haut et fort que les accusations de malversations financières qui ont conduit à son arrestation au Japon sont un complot ourdi par des dirigeants de Nissan.
Aussi, Carlos Ghosn a déposé un recours devant la justice libanaise contre Nissan pour faire valoir ses droits. Il réclame au groupe japonais un milliard de dollars de dommages et intérêts, a déclaré ce mardi une source judiciaire à l'AFP. L'homme qui a la triple nationalité libanaise, française et brésilienne, demeure à Beyrouth après l'épisode rocambolesque de sa fuite du Japon fin 2019.
Duel à distance
Selon la source judiciaire citée par l'Agence France Presse, Carlos Ghosn aurait déposé un recours devant la Cour de cassation au Liban en mai. Ce recours serait contre Nissan et certains de ses employés qu'il accuse d'avoir tout inventé pour lui nuire. En effet, Ghosn estime qu'ils "avaient inventé des accusations à son égard au Japon, ce qui a entraîné son arrestation et les poursuites à son encontre".
La date de l'audience a été fixée à la mi-septembre, selon cette même source judiciaire. Nissan confirme avoir lu dans la presse l'action judiciaire intentée par son ancien dirigeant, mais ne fait aucun commentaire à ce sujet. L'avocat de Carlos Ghosn n'a, semble-t-il, pas non plus voulu commenter cette annonce selon l'AFP.
Pour Ghosn, la vie n'est plus ce qu'elle était, sans pour autant être misérable. Il n'est plus assigné à résidence (dans une somptueuse villa NDLA) mais ne doit pas sortir du pays. En effet, deux "notices rouges Interpol" le visent. La première émane du Japon pour le faire revenir dans l'archipel pour être jugé. La deuxième émane de la France depuis un an environ. Cela concerne une enquête pour abus de biens sociaux, abus de confiance, blanchiment en bande organisée et corruption passive.
Mais, Carlos Ghosn est relativement tranquille au Liban puisque le pays n'extrade pas ses ressortissants.
Des évolutions de la loi japonaise à cause de Ghosn
L'affaire Carlos Ghosn continue d'avoir des retentissements au sein de l'Alliance. A son époque, Ghosn voulait nouer plus étroitement les liens entre Renault et Nissan pour les rendre quasiment "indétricotables". Selon lui, c'est cette volonté qui lui a valu ce potentiel complot interne à Nissan contre lui. Depuis, les relations entre les deux partenaires sont distendues et on voit de plus en plus Renault flirter avec d'autres constructeurs pour des alliances techniques ou capitalistiques sans que Nissan ne soit impliqué directement.
De façon plus insolite, l'évasion spectaculaire de Ghosn au Japon a poussé le pays à promulguer une loi, début mai 2023, qui autorise le suivi par GPS des personnes libérées sous caution. Sorte de bracelet électronique à la Française, ce boîtier est imposé par le tribunal et ne peut/doit pas être retiré. Il trace en permanence le libéré sous caution et lui interdit par exemple d'approcher d'un aéroport ou d'un port. Cette mesure était réclamée depuis l'affaire Ghosn qui a "traumatisé" le pays ou au moins sa justice.