Autolib' : un redoutable fiasco financier ? Cela en a tout l'air ! Alors que le syndicat gestionnaire envisage ni plus ni moins de résilier son contrat avec Bolloré, le groupe indique qu'une telle rupture des engagements coûterait 300 millions d'euros aux collectivités.
Si le gestionnaire refuse de maintenir à flot le service d'autopartage alors que le service se dégrade, Bolloré semble avoir très habilement négocié son contrat. Il devient désormais plus cher pour son client d'arrêter que de poursuivre. Mais, serpent qui se mord le queue, la poursuite implique également des frais. Quant à la rupture du contrat …. il implique de faire appel à une autre société …. qui devra être rémunérée.
Bref, une histoire de très gros sous en perspectives.
Autolib' Métropole va proposer la résiliation du contrat
Le Syndicat Autolib' Métropole vient d'indiquer en fin de semaine dernière qu'il proposera le 21 juin prochain aux 98 communes qui le composent de résilier le contrat de délégation de service public qui le lie avec le groupe Bolloré.
Autolib' Métropole déclare en effet « ne pouvoir accepter de maintenir à flot le service déficitaire du délégataire, alors même que le service se dégrade et que les usagers s'en plaignent. »
Face à ces sévères critiques, Bolloré affirme pour sa part que les dirigeants du Syndicat Mixte ont été régulièrement informés de la dégradation financière d'Autolib'. Une situation qui résulte – selon lui - en grande partie de la concurrence des VTC et « du déploiement de stations trop ambitieux imposé par le Syndicat. »
La société Autolib' tient également à rappeler qu'elle a proposé au cours des derniers mois « des solutions financières et opérationnelles infiniment moins coûteuses et sans interruption du service. » Ajoutant toutefois que celles-ci avaient été « systématiquement rejetées » par le Syndicat.
Le coût faramineux d'une éventuelle résiliation
En retour, Autolib' a indiqué dans un communiqué avoir "pris acte" de la décision de la présidente du syndicat de proposer aux élus la résiliation du contrat, reconnaissant que cette possibilité est « contractuellement ouverte au Syndicat. »
Reste, que selon les estimations du groupe Bolloré, une résiliation coûterait plus cher qu'une poursuite du contrat jusqu'à son terme, en 2023.
D'après les calculs de Bolloré, la dette d'exploitation du service jusqu'à la fin du contrat – en 2023 - se chiffre à 293,6 millions d'euros. Obligé contractuellement à s'acquitter de 60 millions d'euros, le groupe a demandé aux collectivités utilisatrices du service dans la métropole - parmi lesquelles Paris détient une place prédominante - de lui verser 46 millions d'euros par an pour régler le solde.
Bolloré ajoute que le contrat de Délégation de service public prévoit dans cette situation : « le transfert de l'ensemble du personnel de la société Autolib'", "la reprise à la valeur nette comptable des biens du service", "le versement d'indemnités sur les contrats en cours" et "la prise en compte des dédommagements commerciaux envers les usagers". La somme globale avoisinant ainsi 300 millions d'euros, selon les estimations du groupe.
Le Syndicat s'oppose au paiement d'une telle somme
Le Syndicat affirme quant à lui que selon ses premières estimations, cette résiliation coûterait aux communes "plusieurs dizaines de millions d'euros, soit un coût considérablement inférieur aux 233 millions d'euros exigés » par Bolloré".
L'affaire pourrait vite s'envenimer, ce qui n'a rien d'étonnant vues les sommes en jeu. La présidente du Syndicat Autolib' Métropole, Catherine Baratti-Elbaz, a en effet tenu d'entrée à préciser dans le communiqué annonçant la proposition de résiliation que "les communes de la Métropole ne verseront pas les 233 millions d'euros que le groupe Bolloré exige". Indiquant en guise d'argument qu »'en rompant il y a un mois la procédure de conciliation et en exigeant le versement par les communes de sommes astronomiques, le groupe Bolloré ne nous a pas laissé le choix ».
Le Syndicat considère par ailleurs que compte-tenu des nouveaux usages , cette délégation de service public est « obsolète dans sa forme ».
La présidente tenant parallèlement à mettre en garde : selon elle, payer les sommes « astronomiques » exigées par le groupe Bolloré « pourrait mettre en péril l'équilibre budgétaire des communes concernées ».
A la recherche d'une continuité de services
Pour que "cette résiliation ne pèse pas sur les usagers, le Syndicat Autolib' Métropole et la Ville de Paris feront le maximum pour que le service ne s'arrête pas du jour au lendemain. Cela dépendra en grande partie du groupe Bolloré, et nous en appelons à sa responsabilité pour prévoir une transition acceptable vers de nouveaux services", prévient le syndicat gestionnaire.
Comme nous vous l'indiquions précédemment, des discussions sont d'ores et déjà en cours avec plusieurs acteurs en vue d' »organiser très vite » de nouvelles solutions d'autopartage. Selon Mme Baratti-Elbaz, les premières d'entre elles devraient voir leur première mise en service avant la fin de l'année. Elle estime parallèlement que cette éventuelle résiliation constitue au final une "opportunité" de proposer de nouvelles offres aux usagers.
Les choses semblent se préciser : selon la présidente du Syndicat, Autolib' ne sera pas remplacé par un seul acteur, mais par plusieurs sociétés qui proposeront des « solutions complémentaires, adaptées à chacun. » devraient notamment être proposés des trajets intra-muros, des trajets petite couronne-Paris, des services de locations longue durée.
Sources : Bolloré, AFP, Autolib' Métropole
Illustration : Autolib'