Henry Ford lui-même n'arrive pas à y croire. La descendante de la Ford T (qui fête justement son centenaire) serait une voiture Indienne, la Tata Nano! Henry voulait motoriser l'Amérique. Aujourd'hui, Ratan Tata ambitionne de motoriser l'Inde, voir le monde entier.
La Tata Nano marquera-t-elle son temps, comme le fit la Ford T? Seul l'avenir nous le dira. Si c'était si simple de lancer un hit, tout le monde le ferait! Les moyens de Tata et l'accueil du public sont autant d'inconnues. Et son passage à la postérité pourrait être compromis par le fait qu'un autre réussisse à industrialiser un véhicule encore moins cher.
En fait si la Tata Nano attire autant les regards, c'est parce qu'elle est à la croisée de deux tendances: les véhicules low-cost et ceux produits dans les "pays émergents".
Henry Ford et d'autres en étaient persuadé: le progrès, c'est pouvoir en mettre toujours plus (équipement, puissance, dimension, sécurité, etc.) dans le modèle de base. Et lorsque le modèle de base devient trop gros, on en crée un plus petit (cf. les C1/107/Aygo, la Ka, la Twingo, etc.) Le low-cost, ce n'est pas ce "modèle plus petit"; c'est repartir d'une feuille blanche pour créer un véhicule basique, vendu à prix plancher. Ce n'est pas nouveau: après tout, la 2cv et la Coccinelle (conçues dans les années 30) étaient des low-cost avant la lettre.
Puis la théorie du "toujours plus" a prédominé. En 1996, l'Action Auto interrogeait différents constructeurs (image ci-dessus.) Tous juraient qu'aujourd'hui, si quelqu'un lançait un véhicule sans vitres électriques ni direction assistée, les Français lui préfèreraient une Clio d'occasion. La Fiat Palio, censée partir à la conquête des "pays émergents", s'est bien vendue, certes, mais pas autant que prévu.
Puis en 2005, Renault sort la Logan. Elle est moche, austère, mais relativement grande. Normalement, elle ne devait pas être vendue en Europe occidentale. Finalement, Renault s'est laissé tenté et malgré une campagne publicitaire réduite, elle se vend au-delà des espérances. Officiellement, les acheteurs de Logan sont des acheteurs de voitures d'occasion. En pratique, d'aucuns lui attribue la mévente de la Clio et de la Twingo, trop chères et inutilement suréquipées. Désormais, tous les constructeurs songent à une low-cost. Mais certains n'arrivent plus à concevoir des véhicules à bas prix (cf. Volkswagen et la Up!)
Les voitures des pays émergents, c'est une autre tendance. Pendant de longues années, l'occident avait le monopole de la conception des voitures. On considérait que les autres pays devait se contenter de véhicules obsolètes, donc bon marché (Peugeot 504, Renault 12, VW Santana, etc.) Les initiatives locales, comme la Ramses Egyptienne ou la Yugo Florida, ont souvent fait long feu. A l'export, il y eu de nombreux bides (qui se souvient du Tata Sierra, importé en France vers 1995?) Avec la chute du bloc communiste et le durcissement des normes d'homologation, de nombreux constructeurs n'eurent plus les moyens d'atteindre l'Europe de l'ouest. Et l'on pensait que leur destin à terme était de se faire racheter par un grand groupe (comme Skoda avec VW ou Dacia avec Renault), voir carrément que leur usine serve à fabriquer des véhicules occidentaux (comme Opel avec Wartburg ou Ford avec Rodae.)
Mais depuis quelques années, on ne cesse de parler des constructeurs Chinois et Indiens. Le marché Chinois est très atomisé, même s'il connait une ébauche de mouvement de consolidation. Les constructeurs Chinois ont un discours volontiers ambitieux, voir agressif et ils réalisent de nombreuses opérations de croissance interne et externe. Chery, premier constructeur "pur" possède 8 modèles à son catalogue (auxquels s'ajouteront au moins 4 modèles en 2008) et il exporte en Afrique, en Amérique du sud et en Asie. Malgré tout, au niveau mondial, Chery reste un nain.
Les constructeurs Indiens sont nettement plus discrets. Il n'y a qu'une poignée d'acteurs et tous sont des filiales de grands groupes industriels (Tata est ainsi un géant de l'acier et... Du thé Anglais!) Aux discours agressifs et à la croissance tout azimut, ils préfèrent les actions murement réfléchies. A contrario, Tata n'a que deux berlines dans son catalogue (la Nano et l'Indica/Indigo) et pour l'instant, il ne songe pas à l'Europe.
Après la rachat d'un MG moribond, le Chinois NAC eu une indigestion. A contrario, Tata devrait bientôt s'offrir un Jaguar et un Land-Rover en pleine forme, presque sans sourciller. Quels sont les moyens et les ambitions réelles de Tata? Alors qu'on nous annonce depuis des années une déferlante Chinoise, va-t-on voir avant cela une déferlante Indienne?
Galerie: Tata Nano
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