Le salon de Tokyo ? Un véritable nid à espions

La légendaire curiosité des « photographes » japonais désormais dépassée ? Selon une très sérieuse dépêche émanant de l’Agence France Presse – et non du MI6 – il semble bien que les espions pullulent au salon automobile Tokyo Motor Show.

L’objectif : l’obtention de quelques secrets technologiques. Et pour cela, tous les moyens sont bons…

La « pratique » est si répandue que ces « agents secrets » d’un nouveau genre ne prennent même pas la peine de se cacher. L’AFP rapporte ainsi que sur le stand de Toyota, deux hommes s’installent à l’intérieur d’une berline vendue uniquement au Japon, et photographient le moindre fragment de tableau de bord. Chez Nissan, un autre individu mitraille chaque centimètre carré d’une des voitures exposées, depuis le capot jusqu’au bas des portières, puis s’accroupit pour prendre des clichés détaillés de l’arrière du véhicule. Non loin, trois « visiteurs » s’intéressent longuement au volant d’un nouveau modèle de luxe.

« Le salon est un nid d’espions, et tout le monde le sait », raconte un vétéran du journalisme auto.

L’espionnage dans les salons tels que celui de Tokyo « est une pratique courante », confirme Koji Endo, analyste du secteur au Crédit Suisse. Selon lui, « les Japonais font exactement la même chose à Francfort ou aux Etats-Unis ».

Il est de notoriété publique que la plupart des constructeurs achètent les voitures de leurs concurrents pour les désosser, les analyser et éventuellement les copier. Mais espionner dans les salons est aussi une pratique intéressante.

« L’agencement des suspensions, les tuyaux et les autres entrailles peuvent fournir de précieuses informations. En examinant l’intérieur du ventre d’un ‘concept-car’, vous pouvez juger s’il s’agit d’un tigre de papier ou bien s’il est sur le point de devenir un modèle commercial », explique ainsi un journaliste automobile. « Si vous constatez que le prototype comporte déjà des pièces fabriquées à la presse, vous devinez que le modèle sera lancé dans environ un an », poursuit-il.

Les constructeurs ont aussi leurs stratégies de contre-espionnage. Les véhicules « sensibles » sont souvent exposés sur des estrades élevées ou d’autres endroits voyants, et à proximité des « équipes d’accueil » du constructeur.

Un sol brillant qui reflète les flashes des appareils photo est aussi utile pour gâcher les clichés indiscrets. « Ceux qui se contentent de prendre des photos ou des mesures sont les plus gentils. Les pires peuvent arracher la tapisserie d’un coffre pour voir ce qu’il y a en dessous, subtiliser des pièces ou gratter les nouvelles variétés de peinture », affirme ainsi un journaliste.

Selon Kazuhito Sasaki, analyste au Centre de recherche Tokai Tokyo, certains parmi les nombreux Chinois qui se promènent dans le Tokyo Motor Show « sont probablement des constructeurs et des équipementiers qui n’ont pas les moyens d’acheter les voitures. Ils prennent des photos méticuleusement, dans l’espoir de fabriquer des produits similaires ». Il évite cependant de critiquer les Chinois, rappelant que les Japonais ont eux aussi bâti leur industrie automobile en espionnant leurs rivaux.

« Il est indéniable que les constructeurs japonais ont copié leurs concurrents étrangers dans le passé, car ils étaient très en retard » au sortir de la Seconde guerre mondiale, souligne M. Sasaki, selon qui « copier est la meilleure façon de regagner le temps perdu ».

Pour rappel, Fiat et Daimler ont porté récemment plainte devant des tribunaux chinois et européens contre des constructeurs chinois, selon le magazine Automotive News Europe en vue de bloquer les ventes de deux modèles qui seraient copiés sur des véhicules européens.

Entre l’Europe et la Chine, les procès pour plagiat se multiplient, en particulier dans le secteur automobile. L’allemand Daimler a entamé des procédures judiciaire pour faire bloquer les ventes de la Noble, construite par le groupe Shuanghuan. Celle-ci représente de « grandes similarités » avec la Smart Fortwo de Daimler. Le chinois avait d’ailleurs renoncé à présenter le modèle au salon de Frankfort, après que Daimler ait fait part de son intention de le traîner en justice.

Martin Motors, qui importe la Noble, entend d’ailleurs lancer la petite voiture sur tous les marchés, sauf… en Allemagne.

Chez Fiat, c’est la ‘Peri’ qui pose problème. Cette petite citadine, produite par Great Wall Motors, ressemblerait comme deux gouttes d’eau à la Panda. L’italien souhaite donc faire interdire la vente en Europe de la copie, que les acheteurs pourraient confondre avec la Panda d’origine.

Eurasia Motors, qui importe les modèles de Great Wall Motors, a suspendu l’introduction de la Peri dans l’attente d’une décision de justice. En septembre, c’est BMW qui avait porté plainte contre China Automobile Deutschland dans le but de faire interdire la vente du 4×4 CEO en Allemagne. Selon l’allemand, il s’agit d’une imitation d’une précédente mouture du X5.

Sources : AFP, easybourse

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