Alessandro Baricco: cette histoire-là

Pour une fois, je vais poster une critique de livre non pas sur Le Blog Art, mais sur Le Blog Auto. Et pour cause: cette histoire-là de l’Italien Alessandro Baricco traite du sujet automobile.

Pour résumer l’ouvrage (sans vous en révéler la fin), disons que cela se passe au début du siècle, en Italie. Depuis son enfance, le taciturne Ultimo Parri a un objectif: construire un circuit automobile, une « route pour automobiles, qui ne mène nul part. » Chacune des courbes y représentera un épisode de sa vie. Non pas pour un but mercantile, pour apporter le sport automobile dans sa région ou même pour y organiser des courses, car notre homme est passionné avant tout de routes. Et il ne veut même pas rouler sur son circuit.

Je m’attendais à une version romancée de Mémoire des stands (d’ailleurs c’est sur ce site que j’en ai entendu parler.)

D’ailleurs, ça commence bien, avec un Paris-Madrid 1903, où pilotes et spectateurs rivalisent d’excitation. Puis on file dans la campagne Italienne: le père d’Ultimo veut monter un garage, alors qu’il n’y aucune automobile à des kilomètres à la ronde. Là, Baricco excelle pour nous décrire l’abnégation de ce paysan un peu excentrique.

Hélas, ensuite, ça se gâte. Et pas uniquement parce que les automobiles se font encore plus rares. L’histoire dégouline d’effets romantiques (les projets qui tombent à l’eau, les histoires d’amours gâchées, les rencontre qui n’ont pas lieu, etc.) et cela finit par tourner au sadisme! En plus, cet Ultimo, à force d’agir contre toute logique, on a du mal à s’identifier à lui. On nous raconte l’histoire d’Ultimo a travers des personnes qui l’ont croisé (un peu comme dans La maladie de Sachs de Martin Winckler.) A un moment, on nous donne à lire le journal d’une femme qui joue plusieurs fois à « en fait, j’ai inventé ce que j’ai écris avant » (comme chez Lolita Pille, c’est dire le niveau.) Et le dernier chapitre est tout simplement bâclé.

Du coup, je ne serais pas indulgent envers les grossières erreurs de chronologies (d’autant plus que Baricco se vante d’avoir fait de longues recherches.) L’histoire d’Itala est fantaisiste. En 1939, le père d’Ultimo ne pouvait pas connaître Fangio, qui n’était qu’un jeune garagiste Argentin. Idem sur les routes des 1000 Miglia, en 1950, où LA star était Biondetti (d’autant plus que c’était un Italien.) A l’époque, Jaguar ne s’intéressait pas à la course et Elizaveta aurait du plutôt s’y engager avec une Alfa Romeo ou une Ferrari. Quant au circuit à 18 courbes de Parri, c’est un anachronisme: les voitures freinant et tournant mal, les circuits étaient alors des enchaînements de longues lignes droites et de virages à 90° (sauf Spa et le ‘Ring, qui profitent du relief naturel.)

Enfin, on reconnaît sur la couverture une Bentley-Napier sur le banking de Brooklands. Parri a construit son circuit à la fin des années 40, alors pourquoi montrer une voiture des années 30 sur un circuit construit au début du siècle? D’ailleurs, Parri prétend avoir inventé le « routier » alors que Brooklands est justement le premier tracé permanent…

Bref, cette histoire-là, on l’oublie.

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