Essai Laguna 3 : concept prudence

On connaissait le crossover, le ludospace ou le coupé-berline. Mais Renault vient dinventer un nouveau concept automobile : la prudence. Dieu sait si la Laguna 3 a été disséquée, commentée (surtout dans ces pages). Mais cest en la voyant et en lessayant que lon constate que toute lémotion quelle a suscitée avant sa naissance nétait absolument pas justifiée.

Car lémotion, née de la rage ou du plaisir, ne fait pas partie de son cahier des charges. Un seul mot dordre devait dailleurs y figurer : « surtout les gars, gardez le pied sur le frein de la créativité et de linnovation ». La prudence a pris le pouvoir à Guyancourt. Elle se traduit demblée par la ligne de cette « Renault du renouveau », comme le répètent les cadres dirigeants du groupe. Certes, cest moins grave quon pouvait limaginer sur le seule vision des premières photos. Mais cest bien là tout le problème de cette Laguna 3. Elle nest même pas affreuse. Juste totalement passe – muraille. Seulement coulée dans les standards du design actuel. Comme le sont certaines berlines Nissan nord-américaines. Pour sen convaincre, il suffit de se promener à son volant et dobserver les badauds que lon croise. Pour quils se retournent sur votre passage, mieux vaut les klaxonner que dattendre une réaction de leur part sur le nouvel étendard auto-proclamé de lindustrie automobile française que vous conduisez. Rien ne dépasse de ce dessin transparent. Toute extravagance est gommée.

Lintérieur est du même tonneau. La planche de bord, sans console centrale, et les différents emplacements des instruments sont à peu près aussi novateurs quun walkman à lheure du MP3. Si ce nétait le volant « façon sport » et inspiré de la F1 avec une partie basse horizontale. Mais il nest pas disponible dès les premiers niveaux de finition. Pour éprouver un brin démotion, il faut en passer par la planche de la finition « Initiale » avec ses inserts en bois marqueté. Même si ce nest quune reprise de lambiance de la Vel Satis. Si la révolution nest pas au rendez-vous du design, elle ne lest pas non plus à celui de lhabitabilité. Rien de neuf de ce côté. Les grands gabarits sont priés de sasseoir à lavant, faute de voyager recroquevillés. Pour les rangements, grosse tendance actuelle des constructeurs qui ne savent plus ou en coller, on repassera aussi. Une boite à gant, un vide poche centrale, quatre autres dans les portières et cest tout. Circulez, y a plus rien à ranger.

On se rassure en se disant quon nest pas dépaysé en observant cette Laguna. On ne risque pas non plus de lêtre en la conduisant. Ne serait ce quen raison de sa gamme de moteurs. Tous archi connus. Et uniquement en version quatre cylindres, essence ou diesels, de 115 à 175 CV. Pour les V6, sans plomb et mazout, on rest prié de patienter et de les admirer, sous cloche, à Francfort, la semaine prochaine. Pour les faire hurler sous le capot de la nouvelle Renault, il faudra attendre lannée prochaine. Même patience exigée pour la seule innovation technologique prévue : un système à quatre roues directrices. En attendant, mettons nous sous la dent le moteur le plus homogène de la gamme existante : le 2.0 dci de 150 CV, déjà embarqué dans la plupart des modèles des segments supérieurs du losange. Il est parfait dans cette auto, coupleux, silencieux, et brillamment assortit dune boite 6 qui, habitude de la maison, est dun guidage sans reproche. La direction, quant à elle, marque un vrai progrès. Plutôt directe et précise, elle semble définitivement mettre un terme aux assistances électriques auxquelles Mégane et autres Clio nous avait malheureusement habitués. Cest un fait, la Laguna 3 est super agréable à conduire. Laccoustique est parfaitement soignée et la tenue de cap est excellente. Même si elle ne « vire pas à plat » comme laffirment les ingénieurs maison. Elle prend ses appuis comme toute auto classique, mais elle limite son roulis comme peu de ses copines savent le faire.

Reste tout de même le gros point dinterrogation de cette « Renault du renouveau » : sa qualité. De ce que lon perçoit, elle est sans reproche. Assemblages et matériaux utilisés sont au top (pour un constructeur généraliste). Quant à la fiabilité de la bête, point noir de la version 2.0, il faudra attendre un an au moins pour la vérifier. Sauf que dici là, on aura peut-être oublié la très anonyme Laguna 3. Dailleurs ses concepteurs ne se fixent même pas dobjectifs de vente et pensent fourguer la moitié des unités produites à Sandouville aux entreprises. Super confiants en lavenir, les Gohsns boys

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