Raymond Mays avait eu une bonne idée: créer une voiture pour course de « voiturettes » (pendant actuel des GP2 et des F3), vendue clef en main. En plus, comme elle dérivait d’une voiture de série (la Riley 1,5l), elle n’était pas chère. Après tout, Cooper, Dallara, Lola, Martini, Ralt et bien d’autres vécurent très bien comme cela. Sauf qu’ERA remonte aux années 30 et Mays d’être de ceux qui ont eu raison trop tôt.
L’Anglais Raymond Mays (ci-contre posant avec une ERA dans les années 70) est issu d’une riche famille de négociants en grains, mais il n’utilisera pas la fortune familiale. Dés 1922, s’étant fait remarqué par ses performances sur une Bugatti Brescia (on le voit à on volant, ci-dessous, alors qu’il a un petit soucis de pneumatiques…), il se fait sponsoriser par l’usine et par les champagne Mumm (d’où le nom de baptème de ses Bugatti, « Cordon bleu » et « Cordon rouge ».)
Pilote d’usine chez AC, puis chez Mercedes-Benz, il finit par connaître tout le monde dans les paddocks, ce qui sera très utile plus tard, tant pour trouver les bons ingénieurs, que pour vendre des châssis.
Le tournant a lieu en 1931, lorsque Mays se fait préparer une Riley 1,5l très modifiée (à commencer par l’ajout d’un compresseur) par Peter Berthon, sur un dessin Muray Jamieson. Mays rêve de faire remonter la Grande-Bretagne sur les podiums de Grand Prix et fonde en 1933 ERA (English Racing Automobile.)
Mais la course à l’armement lancée par Alfa Romeo et Mercedes-Benz a mis le ticket d’entrée hors de portée des moyens de Mays. Il va donc se contenter de produire des « voiturettes », dérivée en ligne droite de sa Riley.
Trois types d’ERA sont proposées à la vente; le type correspondant à la cylindrée du 6 cylindres à compresseur: R1 (1,1l), R2 (1,5l) et R3 (2l), les évolutions seront baptisées A, B puis C (d’où des R3A ou des R2C.) Il n’y a pas d’équipe d’usine et n’importe qui peut acheter une ERA. Toute première apparition, le Tourist Trophy 1934, où Mannin Beg renonce. Mais il s’impose ensuite à Donington, ouvrant le palmarès d’ERA.
En 1935, le Sud-Africain Pat Fairfield remporte le « TT » sur une R1 et Donington sur une R2! Sur le continent, les ERA moissonnent, tandis que les « B » apparaissent. Mays s’imposera lui-même sur le ring. En 1936, un jeune aristocrate Thaïlandais, Birabongse (alias « Prince Bira ») triomphe avec à Monaco.
En 1937, l’évolution « C », qui bénéficie de suspensions signées Porsche et de freins hydraulique rafle tout avec Fairfield, Bira, Mays et bien d’autres. Mais dés 1938, les Maserati les battent à leur propre jeu. ERA manque d’argent et Humphrey Cook, principal actionnaire, se retire. Les podiums deviennent plus rares. Une « E » est construite, mais Dobson la crashe à Albi. En parallèle, Mays et Berthon créent Automobile Developments, dont le projet de voiture de Grand Prix est stoppé par la guerre.
Durant la guerre, ERA fabrique des équipements pour l’aéronautique. En 1946, on ressort les voitures d’avant-guerre (celles de Bira étaient cachées dans une grotte.) Mays est sacré champion de course de cote de Grande-Bretagne 1947 et 1948. Automobile Developments devient British Racing Motors (que Mays revendra en 1952 à Sir Alfred Owen, y conservant un rôle de N°2 de plus en plus symbolique.)
Leslie Johnson, un passionné, rachète ERA, qui vivotait. Désormais l’essentiel du chiffre d’affaires provient de travaux de sous-traitance pour l’automobile.
En 1952, ERA lance une formule 2, la « G », à moteur Bristol (des BMW sous licence.) Exceptionnellement, en championnat du monde des conducteurs (l’actuelle F1), seules les F2 sont acceptées. Malgré la présence du jeune Stirling Moss derrière le volant, les résultats des ERA sont modestes. En fin de saison, les F2 sont revendues à Bristol. Elles serviront de base à la 450, qui remportera la catégorie 2l aux 24 heures du Mans 1953.
Après cela, il n’y aura plus d’ERA en course. Quant à Johnson, malade, il revend la marque à Zenith (racheté par Solex, lequel fut fondu dans Magneti Marelli.) L’entreprise existe toujours, sous le nom de « Entreprise Research & Application ».
En 1988, les propriétaires contactèrent Austin-Rover. La Mini était en plein revival et d’aucuns cherchaient à en profiter. La Mini ERA possédait une finition inédite avec des sièges en cuir Connolly et une instrumentation complète. A l’extérieur, Dennis Adams (auteur des Marcos) créa un kit carrosserie très agressif. Mais le meilleur est sous le capot, où le 1,3l turbo de 94ch des MG Metro prenait place (imaginez les accélérations!) Un travail très soigné (même la cartographie du turbo a été revue), mais qui ne dura que le temps d’une série limitée.