On parle de plus en plus d’une « petite » Ferrari, déjà appellée Dino. Des photoshops circulent (ici le Spider d’Autoexpress.) On parle même d’un lancement en 2010. Dans la tradition de Maranello, on nie tout en bloc. Simple « hoax » issu de journalistes qui inventent des informations ou réelle cogitation de Ferrari, qui tâte le terrain?
En tout cas, un petit retour sur l’historique des Ferrarina s’imposait pour rafraîchir la mémoire des lecteurs.
Contrairement à ce qu’a annoncé une fois Turbo, la Dino ne fut pas nommée ainsi en hommage à Dean Martin, mais à cause d’Alfredo « Dino » Ferrari. Véritable pendant de Jean Bugatti: un héritier spirituel et biologique de son père, disparu trop tôt.
D’après Jacques Swaters (fameux importateur Ferrari en Belgique et l’un des derniers proches d’Enzo encore vivant), Alfredo était un ingénieur dans la moyenne. Mais après sa mort, à 24 ans, d’une myopathie, Enzo en fera un génie.
En 1955, alors qu’il est hospitalisé, il conçoit avec son père l’idée d’un moteur V6 double-arbre 1,5 litres, destiné à la F2. Il tournera en essais à l’automne 1956, quelques mois après sa mort.
D’emblée, le V6 « Dino » décroche des succès en F2, puis en Sport. Un deuxième V6, simple-arbre, s’imposera en Sport et un troisième V6, très revu par Carlo Chiti, à 120°, permettra à Phil Hill d’être champion du monde de F1 1961.
Historiquement, la première « petite Ferrari » fut non pas la Dino (1965), mais l’ASA 1000 GT (1963.)
Histoire officielle: Oronzio de Nora, industriel Milanais, souhaite créer une firme de voiture de sport, donc son fils Niccolo sera le PDG. Il obtient de Ferrari qu’il lui étudie la voiture, dessinée par Bertone.
Histoire officieuse: Enzo Ferrari souhaite créer des GT pour des clients moins fortunés, sans risquer d’entâcher l’image de marque de la firme. Il crée une voiture munie d’un 4 cylindres1000cm3 de 90ch (hélas mal servi par une boite de Sunbeam qui lui donne des accélérations de 2cv) et vend le concept clef-en-main à de Nora.
Quoi qu’il en soit, l’ASA 1000 GT est présentée au salon de Turin 1963. Celle que l’on surnomme « Ferrarina » n’en a ni le cheval cabré, ni l’aura. En revanche, elle est vendue à un prix très « Ferrari » (27 500frs, soit presque le prix de deux MG B!) Luigi Chinetti s’y intéressera et créera une « Roll Bar » très évolué. Mais l’ASA 1000 GT ne se vend pas et de Nora fils n’était pas un bon financier. L’aventure s’arrête fin 1966.
Historiquement, la première Dino fut une Sport: la 166 P (1965), sorte de version miniature de la 330. Puis il y eu la Fiat Dino (qui reprend le fameux V6…), les prototypes Dino 206 Berlinetta Speciale (1966) et Berlinetta Competizione (1967) de Pininfarina…
En fait, depuis l’ASA, Enzo Ferrari songe toujours à une petite Ferrari, tandis que Sergio Pininfarina (qui vient de succéder à son père à la tête du carrossier) rêve tout haut d’une Ferrari de route à moteur central (architecture auquel Enzo fut un farouche opposant, y compris en F1.) Ce sera donc la Dino 206 GT de 1968, munie du V6 porté à 2 litres, qui donne 160ch. Il n’y aura pas de « Ferrari Dino »: la 206 GT est commercialisé sous la marque « Dino » (toujours cette peur de spolier l’image de marque) et produite chez Scaglietti. Même si des petits malins lui colleront des Cavalino rampante un peu partout…
Elle passant à 2,4 litres, en 1969, elle devient logiquement 246 GT. Elle est désormais produite chez Ferrari. A noter qu’il y aura une 246 sans toit, la GTS (pour « Spider ».)
Avec un total de 3800 exemplaires, la Dino fut une réussite, popularisée par la série Amicalement votre.
En 1973, la Dino et ses rondeurs sont passées de mode. Ferrari décide de la faire passer au V8 et de devenir une 2+2. Le design est cette fois signé Bertone. A noter que Ferrari a demandé la permission à Peugeot d’utiliser un patronyme avec « 0 » central.
Autant dire que la Dino 308 cumule les handicapes et que pour les puristes, c’est une hérésie. Malgré ses 255ch, elle ne convainc pas. En plus, la Ferrari 308, lancée en 1975, lui fait de la concurrence. Elle disparait discètement en 1981, emportant avec elle le patronyme Dino. Elle est remplacée par la Mondial, une autre mal aimée.
Ringardisée en occasion, elle fait le bonheur des collectionneurs qui peuvent ainsi rouler dans une (presque) Ferrari pour 20000…
Au salon de Paris 1975, la Ferrari 308 GTB est présentée. A l’époque, elle possède une carrosserie en polyester. La ligne, tout en rondeurs est signée Pininfarina. D’aucuns pensent qu’il s’agit de la vraie descendante de la 246. En plus, elle porte enfin le bon logo. Justement, les tifosi grincent des dents.
Pour autant, la 308 est un succès. En 1977, elle passe à l’acier et au graissage par carter sec, tandis que la GTS apparaît. En 1980 (où les plus de 2 litres sont lourdement taxés), une « 208 » apparaît, elle ne développe que 150ch. La même année, la 308 troque ses Weber contre une injection Bosch: 214ch. C’est également les débuts de Magnum, qui consacrera la 308 GTS. En 1981, les 208 et 308 vendues jusque là dépassent le nombre d’unités de toutes les autres Ferrari de route produites depuis 1947! En 1982, la 208 passe au turbo (220ch) et s’essaye aux rallyes. En 1983, la 308 gagne une culasse 32 soupapes (240ch.) 1984 est l’année de la 288 GTO, initiatrice des « séries spéciales ». En 1985, alors que la 348 est presque prète, la 308 se prend un lifiting et 200cm3: c’est la 328, qui donne désormais 270ch.
Enzo Ferrari meurt en 1988 et la 348 fut la première Ferrari « post-Enzo ». Le V8 est donc un 3,4l, poussé à 300ch. Le moteur est longitudinale et la boite transversale, les versions sont baptisés TB (berline) et TS (Spider.)
Voiture née en pleine spéculation, l’anguleuse 348 subit de plein fouet la crise.
En 1992, Ferrari crée le Ferrari Challenge, disputé alors avec des 348. Peu après, d’autres 348 apparaîtront dans les courses de GT en pleine renaissance.
En 1993, la 348 perd entièrement son toit avec la Spyder, qui remplace le cabriolet Mondial T.
En 1994, la F355 remplace la 348. Il n’est déjà plus question de Ferrari au rabais, d’ailleurs de génération en génération, le tarif gonfle. Le 3,5 litres à culasse 5 soupapes par cylindre (d’où le nom) offre 380ch et la voiture frôle les 300km/h en vitesse de pointe, gràce à son utilisation de l’effet de sol.
Les évolutions sont plus rapides: le Spider apparaît dés 1995, en même temps que la version « Challenge ». La grosse nouveauté a lieu en 1997, lorsque sur la F355 F1, Ferrari propose une boite séquentielle.
En 1999, alors que la F355 se vend encore bien, Ferrari la remplace par la 360 Modena. Le V8 de 3,6l (toujours à 5 soupapes par cylindres) délivre 400ch. En revanche, la voiture « plafonne » toujours à 295 km/h.
La 360 Modena est la première Ferrari entièrement en aluminium. Côté gamme, il y a évidement un Spyder et une version à boite séquentielle, en revanche, il n’y a plus de GTS. Côté finition, la Ferrari n’a plus à rougir (!) face à la concurrence.
En 2003, une version Challenge Stradale sort avec freins en carbone, intérieur « course » (donc spartiate) et moteur de 425ch.
Cela nous amène naturellement à la F430 de 2004, son moteur 4,3 litres de 490ch et ses 315km/h en pointe. En bientôt 40 ans, de la 206 GT à la F430, elle aura gagné 2 cylindres, 330ch, 270kg, 80km/h en vitesse de pointe et seulement 40cm de long (soit 10% de sa longueur.) En revanche, le tarif est passé de 73 000 frs en 1973 (soit l’équivalent d’un peu moins de 70 000) à 145 000 aujourd’hui!
Dans ce contexte, on comprend que face à une « petite » Ferrari plus très petite, la marque aurait besoin d’un nouveau modèle d’entrée de gamme…
A lire également: