Rétro F1 : les pilotes anglais de la Scuderia Ferrari

John Surtees, le premier « ordinateur » de Ferrari

Dans les années 50, la majorité des bons pilotes sont latins, de préférence italiens et argentins, ou sujet de sa Majesté. Véritable dandy, pilotant souvent avec un nœud papillon, Mike Hawthorn a été le premier britannique marquant de la Scuderia. Il y connaît deux périodes, d’abord en 1953 où il remporte le Grand Prix de France face à Juan Manuel Fangio à l’issue d’un duel épique à Reims-Gueux. En 1954, Hawthorn ne passe pas loin du titre (3e du classement général) avec trois podiums et une deuxième victoire en Espagne, puis il quitte Ferrari, souhaitant courir pour des marques britanniques mais connait deux saisons ternes, marquées par le drame du Mans en 1955, dans lequel son comportement en piste est pointé du doigt

Revenu chez Ferrari en 1957, le Britannique dispute le titre face à la Vanwall de Stirling Moss en 1958 et remporte le championnat d’un seul point, grâce à sa régularité (et aussi au fair-play de Moss). Il devient aussi le premier champion du monde de Formule 1 britannique, après 7 ans de domination italo-argentine. Quelques mois plus tard à peine, Hawthorn trouve la mort dans un accident de voiture au volant de sa Jaguar, à seulement 29 ans.

Mike Hawthorn, le dandy le plus rapide de l’histoire

Même si ce sont d’abord des pilotes « cérébraux » et analytiques qui ont le plus donné de succès à Ferrari, le Commendatore a toujours aimé les « artistes », les pilotes au gros coeur. On sait à quel point Enzo Ferrari avait aimé, presque comme un fils, Gilles Villeneuve. Le pilotage flamboyant et généreux a valu à Nigel Mansell le surnom de « Il Leone » auprès des tifosis. C’est aussi le dernier pilote recruté par Enzo Ferrari avant sa mort en août 1988.

Le moustachu le plus célèbre de la F1 remporte sa toute première course avec les Rouges, le Grand Prix du Brésil 1989, au volant de la 640 qui inaugurait la boîte semi-automatique imaginée par John Barnard. Une victoire miraculeuse, alors que la boîte avait accumulé les problèmes techniques pendant les essais !  Malgré d’enormes soucis de fiabilité, Mansell remporte une autre victoire flamboyante en Hongrie, après un dépassement d’anthologie sur Senna. Mansell n’oublie pas de faire aussi des gaffes légendaires, en accrochant Senna malgré un drapeau noir au Portugal.

Mais en 1990, l’arrivée d’Alain Prost change la donne. Face au champion Français, bien plus méticuleux, stratège et aussi fin politique au sein de la Scuderia, Mansell perd pied. Les relations entre les deux pilotes sont mauvaises, et l’anglais ferme même la porte brutalement à Prost au départ du GP d’Estoril. Ne jouant absolument pas le jeu d’équipe en faveur de son équipier, il s’impose tandis que Senna termine devant Prost et prend de précieux points dans la course au titre. Usé psychologiquement, il annonce dans un premier temps sa retraite en fin de saison, avant de se raviser et de rejoindre Williams en 1991.  

Nigel Mansell, un lion qui dompte le cheval cabré

Révélé par Vanwall, où il fait équipe avec Moss, Tony Brooks trouve refuge chez Ferrari l’année suivante quand Vanwell cesse brutalement ses activités. Alors que Moss ne pilotera jamais pour Ferrari, après plusieurs occasions manquées, Brooks succède à ses compatriotes Mike Hawthorn et Peter Collins, tous deux disparus.

Vainqueur à Reims et au Nürburgring, Brooks est en lice pour le titre en 1959 mais termine vice-champion derrière Jack Brabham lors de la finale du championnat disputée sur le circuit américain de Sebring. Percuté par Wolfgang Von Trips en début de course, il perd beaucoup de temps dans les stands pour faire vérifier sa voiture et doit se contenter de la 3e place

 

Peter Collins, le plus fair-play, fauché en pleine gloire

Venu de la F2 et brillant en voitures de sport, Peter Collins débute en F1 en 1953 avant d’être recruté par Ferrari en 1956. Dès sa première saison, il est très performant et joue le titre lors de la dernière course à Monza. Survient alors un fait qui semble inimaginable aujourd’hui !

Au 31e tour, Juan Manuel Fangio abandonne. Etant deuxième de la course derrière Stirling Moss, Peter Collins se retrouve virtuellement champion du monde mais il décide de céder son volant à Fangio – procédure possible à cette époque – ce qui permet à l’argentin de partager les points de la seconde place et d’obtenir ainsi un quatrième titre.

Peter Collins aurait pu être sacré mais déclara « J’ai encore tout le temps ». Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Après une saison terne en 1957 – ce que Enzo Ferrari mit publiquement sur le compte d’une romance avec une actrice américaine ! – il revint en forme pour 1958. Mais après avoir remporté une victoire éblouissante face à Moss en Angleterre, Collins se tue sur le Nürbrugring, à seulement 26 ans, après avoir heurté un arbre en étant éjecté de sa voiture.

Tony Brooks, pas loin du titre non plus

Venu de la moto où il a décroché plusieurs titres mondiaux, John Surtees débute en Formule 1 en 1960, d’abord avec Lola et Cooper, avant de rejoindre la Scuderia en 1963 où il fait tout de suite sensation, en s’imposant notamment sur le redoutable Nürburgring.

Surtees fait encore mieux en 1964 avec deux victoires (Allemagne et Italie) et un titre de champion du monde décroché à l’issue d’un suspense « hitchcokien » à Mexico. Alors que Jim Clark est en tête, ce dernier casse son moteur dans l’avant-dernier tour. Lorenzo Bandini, le coéquipier de Surtees, pousse Hill à la faute, puis laisse passer Surtees pour remporter le titre, avec un point d’avance sur Hill.

Pour l’anecdote, Surtees décrocha le titre au volant d’une Ferrari bleue et blanche ! Ce n’est pas la Scuderia Ferrari qui était engagée mais la North American Racing Team (NART) dirigée par Luigi Chinetti, l’importateur et ami d’Enzo Ferrari. Cette situation cocasse était le résultat d’un imbroglio entre Ferrari et l’autorité sportive italienne qui, selon Enzo Ferrari, ne l’avait pas assez soutenue dans l’épineux dossier d’homologation des Ferrari 250 LM pour les 24 Heures du Mans.

Néanmoins, malgré le titre, la situation interne se dégrade, surtout entre Surtees et le directeur sportif Eugenio Dragoni, leader du « clan italien », qui veut favoriser Bandini. En 1965, Surtees est victime d’un grave accident, dont se sert Dragoni pour le pousser vers la sortie. Malgré un retour en fanfare en 1966 avec une victoire en Sport aux 1000 kms de Spa puis au grand prix de Belgique en F1, Surtees n’est pas retenu pour les 24 heures du Mans et, face au favoritisme dont bénéficie Bandini,  écide de claquer la porte en pleine saison 1966.

Surtees est le dernier Britannique sacré avec Ferrari. Intéressant de voir le parallèle que l’on peut étanlir entre Surtees et Lauda, deux pilotes rigoureux et « cérébraux » qui ont donné le succès à Ferrari mais dont l’histoire s’est mal terminée humainement.

Un commentaire

  1. Oliver Bearman fait une course solide et termine 7 ème, il s’ouvre une porte vers une carrière en F1. Fait notable, les caméras de la F1 ont pointé leurs objectifs dans le garage Mercedes vers une petite française, notre Doriane Pin nationale !
    Avec John Surtees, Ferrari a merdé, notamment en lui refusant un volant au Mans en 1966, alors qu’il se proposait pour être le lièvre pour pousser Ford à la faute. Qui sait si Ford aurait gagné avec Surtees comme adversaire ?

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