De Gladiator à Citroën : l’usine SIMCA de Nanterre

L’automobile française a fourmillé de marques au début de l’automobile. Toutes ou presque ont mis la clé sous la porte lors de la 2de Guerre Mondiale, ou lors du plan Pons (qui a décidé de la répartition de l’acier disponible et du rôle de chaque constructeur). Les cycles Gladiator est une société créée en 1891 par deux passionnés d’innovation, Alexandre Darracq et Paul Aucoq. Darracq a d’ailleurs eu droit à un épisode des marques disparues.

En 1896, Adolphe Clément, Charles Chetwynd-Talbot, et Harry John Lawson décident d’investir dans Gladiator. Clément et Talbot, voilà encore des noms connus de l’automobile. Les cycles Gladiator deviennent les automobiles Clément-Gladiator en 1896 et produisent des tricycles et des automobiles. En 1909, la marque est rachetée par Vinot & Deguingand, marque lancée à Puteaux en 1898. Avec ce rachat, Vinot & Deguingand décide de créer une deuxième usine, à Nanterre cette fois. Nanterre est encore un village en périphérie de Paris. L’usine est implantée sur la route de Paris à Saint-Germain, qui deviendra plus tard en 1918 l’avenue Georges Clémenceau.

Rachat par Donnet-Zédel

Hélas pour la marque, elle n’arrive pas à survivre et doit cesser sa production. L’usine est alors rachetée par Donnet. Donnet-Denhaut est fondée en 1915 par Jérôme Donnet (Suisse et ancien de Donnet-Lévêque) et François Denhaut. La marque s’installe à Neuilly-sur-Seine. Comme beaucoup de marques à l’époque, elle donne dans l’automobile mais aussi l’aviation. En fait, Donnet-Denhaut fabrique des hydravions les automobiles Zédel (société créée par Ernest Zürcher et Herman Luthi) à Pontarlier.

Donnet-Zédel produit des automobiles l’ile de le Jatte à Neuilly (ancienne usine d’hydravions). Le succès de sa type G est tel que Donnet-Zédel devient le cinquième constructeur en France. Il y a Renault, Citroën, Peugeot puis Mathis devant Donnet-Zédel. Ils se paient même le luxe de devancer Chenard & Walker (voir ici). On est en 1924 et ce succès pousse la marque à racheter l’usine de Nanterre quand Vinot & Deguingand s’arrête.

L’usine est relativement « petite », mais possède un terrain qui laisse de grande possibilités d’extension (voir l’image ci-après). C’est ce que fera Donnet. L’usine est inaugurée en 1928 et est « ultra-moderne » pour l’époque. Inspirée à la fois de ce que l’on trouve aux USA, mais aussi chez nos voisins, l’usine de Nanterre est sur cinq niveaux. Zédel fera les frais de cette nouvelle usine puisque la vieille usine de Pontarlier est fermée et Zédel disparait des voitures produites à Nanterre.

Lancement de SIMCA dans l’usine de Nanterre

Sauf que Donnet a vu trop gros et surtout en 1929 la crise économique tombe sur le râble de tout le monde et entre autres des constructeurs automobiles avec leurs voitures plutôt luxueuses et chères. Donnet n’y échappe pas et en 1934 la faillite est prononcée. L’usine de Nanterre va alors être mise en vente aux enchères avec tout l’outillage.

C’est la FIAT qui remporte la mise. La société italienne produit déjà en France ses automobiles, à Suresnes, via la Société anonyme française des automobiles FIAT (SAFAF). Enfin, la SAFAF fait produire ses carrosseries par l’atelier de carrosserie Manessius, située à Levallois-Perret, les moteurs par Chaise à Paris, les boites de vitesse par « Renondin et Losson » à Suresnes et les ponts arrière à Saint Etienne.

Henri Théodore Pigozzi, Président de la SAFAF cherche une usine pour tout produire. L’usine de Nanterre sera parfaite pour la « Société industrielle de mécanique et carrosserie automobile », alias SIMCA. La marque est créée en 1934 et va produire des SIMCA-FIAT à Nanterre à partir de la mi-1935. Il faut en effet 6 mois à la FIAT pour modifier l’usine et la transformer sur le modèle du fameux « Lingotto » de Turin.

Durant la Guerre, les accointances de FIAT avec l’Allemagne nazie permet à l’usine de Nanterre de continuer de produire des voitures durant l’occupation quand les autres doivent produire du matériel militaire. Au sortir de la Guerre, SIMCA reprend la production et fait même partie du plan Pons. Simca et Panhard feront des voitures populaires. L’usine de Nanterre a été épargnée par les destructions des bombardements et peut reprendre la production.

Citroën rachète l’usine pour produire des pièces

Simca prospère et FIAT négocie avec Ford pour le rachat de Ford France (Ford-SAF). On est en 1954 et avec ce rachat (contre 15% de SIMCA à Ford), SIMCA récupère l’usine de Poissy. Petit à petit l’usine de Nanterre est délaissée et en 1961 Citroën la rachète. Fiat est assez mal vu et des craintes se font sur des rachats de différents constructeurs automobiles. Cela pousse Fiat a vendre à Chrysler Europe la majorité de Simca.

Citroën ne compte pas sur Nanterre pour produire des voitures. Désormais, c’est une usine de pièces détachées et de moteurs. Tous les véhicules Citroën ou presque utilisent des pièces de Nanterre, de la 2CV à la DS, mais aussi plus tard la CX, GS, la Visa ou la BX. En 1985, Citroën décide de quitter Nanterre qui n’a plus rien du village. L’usine ne survit pas à ce départ et la friche industrielle fut la seule à rappeler ce passé durant des années. Les traces ont disparu depuis. On peut deviner encore une partie de l’usine dans le bâtiment (ex-Enedis) « Le Capitole ». On retrouve la forme en 8 du bâtiment d’origine.

L’usine aura connu quatre constructeurs différents avec Vinot-Deguigand, Donnet, Simca et Citroën. De toutes ces marques, seules Citroën a officiellement survécu. Simca, propriété de Chrysler France a été rachetée par Peugeot en 1978 (qui détenait déjà Citroën) et l’usine de Poissy a intégré le giron de PSA. Là encore une usine automobile qui est passé de main en main.

(5 commentaires)

  1. Cette usine, ou du moins la marque Cycles-Galdiator à fabriqué pour le consortium CSRG (Chauchat, Sutter, Ribeyrolles et la firme Gladiator) le fusil mitrailleur Chauchat en 1915. Première arme automatique de grande production de l’histoire pour l’armée Française et ses allies durant la 1ere GM. Et reconaissable par sa forme particulière.

    Voilà pour la petite anecdote. 🙂

  2. Très belle photo on y voit l immeuble ou ma famille on habité de 1962 jusqu’à la destruction dans les années 90′

  3. J’ai travaillé au debut des années 80 dans l’atelier fonderie
    on injectait les pièces des moteurs de 2CV et des GS
    Quand je suis parti, on venait d’intégrer des moules de chez PEUGEOT, pour les VISA

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