C’était un autre temps : une semaine d’épreuve, avec un parours de concentration où les concurrents s’ébrouaient depuis Paris, Londres, Rome ou encore Saragosse, 32 spéciales et plus de 750 kilomètres d’épreuves chronométrées ! Rien à voir avec les sprints modernes !
Les forces en présence
En 1981, on retrouve évidemment les Fiat 131 Abarth, qui ont dominé la saison 1980, avec Markku Alen et Dario Cerrato, des Ford Escort dont la « Rothmans » d’Ari Vatanen, une flopée d’Opel Manta, des Porsche 911 pour Thérier et Alméras ou encore l’inoxydable Lancia Stratos de Bernard Darniche.
Mais l’attention se porte surtout sur deux autres marques. Renault engage une R5 Turbo Groupe 4, qui est une version optimisée de la « Cevennes » qui sera lancée en compétition-client au mois de Juin 1981. Une appellation qui est due à la 2e place obtenue par la R5 Gr4 pour sa première sortie officielle au rallye des Cevennes 1980. Avec 925 kg sur la balance, les R5 sont les plus légères et le moteur quatre cylindres de 1397 cm3, placé en position centrale arrière, qui a recours à une injection Bosch et à un turbocompresseur Garrett T3, développe 250 chevaux. Elles sont confiées à Bruno Saby et à Jean Ragnotti, le champion de France des rallyes en titre, qui a déjà terminé 2e du Monte-Carlo 1978 sur une R5 Alpine.
L’autre attraction, c’est le début officiel d’Audi en championnat du mondes des rallyes. Le constructeur allemand débarque avec un coupé Quattro certes encombrant (1100 kilos), mais qui dispose d’une transmission intégrale et d’un moteur 2.1 litres de 300 chevaux gavé par un turbo KKK. La Quattro a déjà remporté des courses en championnat d’Europe, elle est évidemment la grande attraction face à des rivales exclusivement en propulsion. Audi s’appuie sur le finlandais Hannu Mikkola et sur une femme, la française Michèle Mouton, qui sera rapidement éliminée sur panne dès le parcours de concentration.
La Quattro affole la concurrence…
Quand commence le parcours de classement, la neige et le verglas dominent sur les routes. Dans ces conditions difficiles, l’Audi Quattro de Mikkola ne laisse aucune chance à ses adversaires. Au petit matin, à l’arrivée sur Monaco après les spéciales de nuit, le finlandais compte déjà 6 minutes d’avance sur la Porsche de Therier ! Dans certains secteurs, Mikkola a pris 3 secondes au kilomètre ! La plupart de ses adversaires ont connu des soucis mécaniques, comme Vatanen, ou bien des problèmes de pneumatiques, comme Darniche.
Le lendemain, la concurrence se réveille un peu, puisque Darniche est le plus rapide dans le secteur du Turini mais le premier grand rebondissement survient avec une erreur de Mikkola. Dans un secteur verglacé, sur un freinage manqué, l’Audi percute un petit pont. La suspension avant gauche est très endommagée et, avec plus de 15 minutes de perdues, Mikkola sombre au classement, tandis que Thérier s’empare du commandement de la course devant Fréquelin et Ragnotti.
Duel à trois : Thérier-Ragnotti-Fréquelin
Entre Val les Bains et Gap, un trio tricolore se livre une farouche bataille. Thérier, Fréquelin et Ragnotti remportent à tour de rôle des spéciales et se tirent la bourre. Le pilote Porsche a néanmoins l’avantage en arrivant au parc fermé de Gap, avec plus de 2’30 d’avance sur la Renault. Entre Gap et Monaco, Thérier, dans un style toujours aussi généreux, semble faire la décision, grâce à un meilleur choix de pneus, des cloûtés mixtes, et en raison de deux tête à queue de Ragnotti qui attaque au maximum. La Renault rencontre aussi des problèmes de boîte de vitesse et de puissance à cause d’un turbo récalcitrant. A l’amorce du parcours final, l’avance Thérier dépasse les 3 minutes.
Tout bascule le dernier jour, dans le parcours entre Monaco et Digne. Thérier ouvre la route et franchit le col du Turini mais arrive dans la descente sur une grosse plaque de neige déposée par des spectateurs malveillants. Chaussé de pneus slicks, il ne peut éviter la sortie de route et tape un rocher, pliant la roue arrière gauche. La transmission cède un peu plus loin, entraînant l’abandon du pilote normand alors qu’il avait quasiment course gagnée. Ragnotti se retrouve en tête avec deux minutes d’avance sur la Talbot de Fréquelin. Saby se fait également surprendre par une plaque de neige apportée par des spectateurs. Décidément…
Première grande victoire internationale de la R5
Ragnotti arrive sur Digne avec un peu plus d’une minute et demie d’avance sur Fréquelin. Ce dernier reprend d’un coup 55 secondes à Ragnotti dans la spéciale suivante, mais Gérard Larrousse, le directeur sportif de la Régie, dénonce une erreur de chronométrage qui est rapidement admise par les officiels. L’écart reste donc conséquent. Le dernier tronçon de course n’apporte pas de rebondissements supplémentaires et Jean Ragnotti termine sereinement en tête, avec presque 3′ d’avance au scratch sur Guy Fréquelin (Talbot Sunbeam Lotus) et Jochi Kleint (Opel Ascona). C’est la première grande victoire internationale de Jeannot et aussi de la R5 Turbo. La bombe de la Régie évoluera vers la règlementation Groupe B. Deux autres victoires en mondial surviendront, au Tour de Corse 1982 et au Tour de Corse 1985 avec la Maxi Turbo 2. Mais ce qu’il faut aussi retenir, c’est la domination sans partage de l’Audi Quattro le premier jour. La transmission intégrale a fait ses preuves, le rallye est à l’aube d’une révolution, qui prendra tout son sens dès 1982 avec le Groupe B.
Allez, un bon coup de nostalgie avec le résumé de l’époque commenté par le grand José Rosinski !
Je m’en souviens, collégiens nous en discutions pendant les récrés !
et nous regardions les résumés à la TV
… les résumés dans Auto-Moto le samedi en fin d’après-midi !
A l’époque, on appelait ça une R5 Maxi Turbo, parce qu’il y avait déjà une turbo dans la gamme Renault, la R5 Alpine Turbo.
La diversité des voitures laisse rêveur… Il n’y a plus que dans les championnats de montagnards qu’on trouve une telle diversité.
Et quelle foule ! Les rallyes étaient au top question popularité, surtout avec autant de grands pilotes français !
Que de souvenirs. C’était mieux avant ? Je sais pas mais c’était ma jeunesse.
c’était de sacré funambules, en propulsion sur la glace / neige, avec des moteurs turbos surpuissants !
ça, c’était du rallye, pas les ersatz qu’on nous inflige depuis de trop nombreuses années.
magistral ! j’étais bord de route montée du Granier . ça ne s’oublie pas dans les souvenirs empilés. Comme si c’était hier. Les audis : le coup de masse à tous. Et puis hommage aux voix du sport Auto: José Rosinski, Bernard Spindler, Pierre Carillat …
@Achille c’est vrai qu’entre Loeb et Ogier, nous manquons de grands pilotes français…
Le Monte Carlo n’est pas une légende de la course automobile, les 24h du mans non plus.
En fait, on a une histoire de l’automobile et du sport automobile parmi les plus fournies au monde. Mais c’est tellement Français de s’autoflageller en permanence.
On n’est pas foutu d’avoir un vrai musé de l’automobile pour valoriser notre histoire et notre patrimoine.
Lohéac, l’Aventure Peugeot Citroen DS, Musée National de l’Automobile – Collection Schlumpf dans le Musée National de l’Automobile à Mulhouse,
diverses collections un peu partout en France. Quand même il y en a des musées de l’automobile.
Il y a même par exemple un petit musée sympathique en Vendée (ouvert au public de avril à septembre, et aux groupes sur rdv de février à décembre).
Vaut largement son billet d’entrée et en plus Talmont est à côté de l’océan.