L’hydrogène pas si écolo : le Pdt du lobby UK démissionne

L’hydrogène considéré comme une « coûteuse distraction »

Le président de la « UK Hydrogen and Fuel Cell Association » (UKHFCA) a démissionné de ses fonctions, invoquant des désaccords sur la «distraction coûteuse» du soutien du gouvernement à l’hydrogène bleu.

Nouvelle stratégie nationale britannique pour l’hydrogène

Cette démission intervient alors que le gouvernement britannique vient de lancer cette semaine une nouvelle stratégie nationale pour l’hydrogène, cherchant à soutenir la production d’hydrogène vert – produit par électrolyse à l’aide d’énergie renouvelable – et d’hydrogène bleu, fabriqué à partir de combustibles fossiles.

Le soutien de l’UKHFCA à ce programme a poussé son président, Christopher Jackson, à démissionner de son poste, a-t-il lui-même indiqué dans un post sur LinkedIn cette semaine.

L’hydrogène vert : une mauvaise réponse pour la transition énergétique ?

« La transition énergétique ne peut pas être réalisée par une seule solution miracle, et l’hydrogène vert ne peut à lui seul résoudre tous les défis mondiaux », a déclaré en guise d’argumentaire.

« Mais s’il n’y a peut-être pas une seule  » bonne « réponse, il y a des réponses qui sont fausses » a-t-il poursuivi.

Ajoutant qu’il avait pour « profonde conviction personnelle que l’une de ces mauvaises réponses est l’hydrogène bleu ».

Cela a au moins le mérite d’être clair.

« Je trahirais les générations futures en gardant le silence sur le fait que l’hydrogène bleu est au mieux une distraction coûteuse, et au pire un verrouillage pour faire perdurer le recours à des combustibles fossiles qui garantit que nous échouerons à atteindre nos objectifs de décarbonisation » a-t-il encore indiqué.

Hydrogène bleu / hydrogène vert : loin d’avoir le même poids écologique

La stratégie du gouvernement britannique pour le secteur a été critiquée par des groupes environnementaux pour avoir adopté une approche à deux voies, accordant un poids égal à l’hydrogène bleu et à « l’hydrogène vert », qui n’a pas d’impact négatif sur le climat car il utilise de l’électricité renouvelable pour diviser l’eau en hydrogène et oxygène.

En revanche, l’hydrogène bleu est fabriqué à partir de gaz naturel, qui doit être extrait des gisements de gaz puis purifié par l’élimination du dioxyde de carbone, qui doit être stocké sous terre. Le procédé ne parvient généralement pas à capturer 10 à 15 % de ses émissions de gaz à effet de serre, qui s’accumuleraient à mesure que la production augmenterait.

L’hydrogène bleu pour au final assurer un débouché aux énergies fossiles ?

L’hydrogène vert est susceptible de jouer un rôle important dans l’avenir zéro carbone de l’industrie du transport, qu’il soit brûlé tel quel, utilisé dans des piles à combustible ou utilisé pour produire de l’ammoniac vert ou du méthanol.

Mais certains ont exprimé des doutes quant au fait que suffisamment d’hydrogène vert sera produit à temps pour les besoins du fret maritime ou d’autres industries, prédisant que les entreprises de combustibles fossiles pourraient chercher à promouvoir l’hydrogène bleu comme alternative pour pouvoir poursuivre la commercialisation de leurs carburants.

« Le HFCA doit être un pont entre les différents intérêts, perspectives et entreprises. Ce qui nécessite que ses leaders soient neutres sur les plus grandes interrogations du secteur », plaide Christopher Jackson.

Vers un hydrogengate ?

Selon le patron sortant du lobby de l’hydrogène britannique, les compagnies pétrolières ont utilisé de fausses déclarations sur le coût de production de l’hydrogène à partir de combustibles fossiles, en vue d’accéder à des milliards de subventions.

Les deux types d’hydrogène sont beaucoup plus chers à produire que les carburants conventionnels, c’est pourquoi le gouvernement britannique a souhaité mettre en place un système d’aides financières. Il a lancé une consultation pour financer la différence entre le prix de vente acceptable par les acquéreurs et ce qu’il en coûte aux producteurs pour le fabriquer – similaire à un système déjà utilisé pour réduire les coûts de l’énergie éolienne offshore.

« On a dit au Trésor que l’hydrogène bleu est bon marché et éliminera des millions de tonnes d’émissions de carbone de l’économie, c’est tout ce qu’il faut entendre. Cela coche les cases qui les inquiètent », a déclaré Jackson.

Le Département du commerce, de l’énergie et de la stratégie industrielle cherche quant à lui à savoir si les subventions doivent être financées par la fiscalité générale ou par des surcharges sur les factures d’énergie des ménages.

Tout un vaste programme …

Notre avis, par leblogauto.com

Un discours qui a le mérite d’être clair. Et pour le moins courageux ! Christopher Jackson osant dire tout haut que les majors pétrolières ont tout intérêt à promouvoir l’hydrogène pour faire perdurer le recours aux énergies fossiles … Pointant du doigt l’immense influence des lobbies pétroliers dans la bataille.

N’épargnant personne, Jackson a déclaré que les sociétés énergétiques avaient plaidé en faveur de projets « grands et audacieux » d’hydrogène bleu de plusieurs milliards de livres, qui s’étaient avérés être un attrait pour les ministres qui « essayaient de trouver des moyens de montrer qu’ils faisaient vraiment quelque chose » pour soutenir le programme vert. Edifiant …

En ce qui concerne la France, en mai dernier, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) a estimé quant à lui dans une note que l’hydrogène ne constituait « pas la solution miracle » pour répondre à tous les défis de la transition énergétique. Plus encore, il le déconseille dans l’immédiat pour les véhicules individuels.

Certes, utilisé comme carburant, l’hydrogène n’émet que de l’eau. De là à le considérer comme la solution écologique miracle, certains ont déjà franchi le pas, présentant la solution comme une alternative aux polluants hydrocarbures mis sur le marché à l’heure actuelle.

Mais ce que semblent oublier – ou vouloir oublier – ses partisans, c’est que l’hydrogène est encore coûteux à produire mais surtout que sa production-là nécessite pour l’instant l’emploi de sources d’énergies fossiles et émettrices de gaz à effet de serre.

Alors que le rôle de l’OPECST est d’éclairer les parlementaires sur les conséquences des choix de politique publique à caractère scientifique et technologique, sa note souligne notamment le « faible rendement » énergétique de l’hydrogène, et sa distribution « délicate et coûteuse ».

Une étude menée récemment par des chercheurs de l’Université Cornell aux États-Unis a déclenché un nouveau débat sur l’hydrogène bleu, car elle a averti que de telles méthodes de production pourraient même être pires que la combustion de gaz naturel.

Sources : Ship and Bunker, AFP, OPECST, The Guardian, Financial Times

(35 commentaires)

    1. Quand on veut tuer son chien on l’accuse d’avoir la rage…
      Toujours chercher à qui profite le crime.
      Les lobbys pétroliers ?
      Les pays producteurs ? Américains en tête.

      1. Question production de pétrole ce ne sont sûrement pas les USA qui sont en tête…

        Ce ne sont pas les USA qui achètent des clubs de foot ou des groupes auto en Europe.

        D’autant plus que les ENR ne font pas trop peur aux USA, puisqu’en 2020 ( année spéciale, peu de demande en électricité) les ENR ont représenté plus que le charbon ou que le nucléaire dans la production d’électricité. les ENR en masse aux USA ce n’est pas nouveau.

        Les pétroliers peuvent très bien se diversifier dans les ENR.

    2. Et pourquoi critiquer l’Europe qui sont les seul à vraiment avoir fait baisser les émissions de CO2?
      Les major du pétrole ne sont pas européen non plus !
      Qd a fabriquer une section spatiale solaire, lol , je demande bien à voir . Déjà le coût de fabrication et entretien sera supérieur à son rendement et vous faites comment pour renvoyer l’électricité sur terre ?

      1. Bof, c’est un vieux projet américain des années 70. L’énergie serait renvoyée sur Terre sous forme de micro-ondes captées par une antenne géante (plusieurs kilomètres) au sol

    3. toutes les énergies finissent en chaleur

      si la Terre se réchauffe, c’est qu’il y a déséquilibre entre apport et dissipation d’énergie. L’apport, c’est le soleil.
      Mettre une centrale solaire dans l’espace, récolter de l’énergie dans l’espace, et ramener cette énergie sur Terre, c’est donc augmenter l’apport d’énergie pour le système Terre, qui va donc se réchauffer encore plus (à moins de diminuer d’autant les gaz à effet de serre)

      bref, il y a des idées où il vaut mieux oublier….

  1. « Les pétroliers peuvent très bien se diversifier dans les ENR. » >> Ils ont déjà commencé. Ils ne sont pas zinzins.

    Lancée sous l’impulsion de feu Christophe de Margerie, la transformation de Total, devenu TotalEnergies, vers le renouvelable est bien entamée.
    En 2020, TotalEnergie c’est 1 GW installé en renouvelable dont 50% d’éolien, 40% de photovoltaïque, et 10% d’hydraulique.
    Patrick Pouyané, l’actuel patron de TotalEnergies, veut que le groupe soit dans les 5 premiers acteurs du renouvelable d’ici 2030. C’est demain…
    Ca passe par des rachats et développements, des constructions, etc.

    D’ici 2 ans et qq mois, TotalEnergies renoncera enfin à l’aberration de l’huile de palme à la raffinerie de la Mède.
    Devrait avoir encore plus de GW installé en renouvelable ou bas carbone, etc.

    Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres.

    1. Je citerai même GDF, heu non Gdf suez, heu non Engie… pour le domaine du gaz qui a fait depuis 10ans de très gros investissements sur la diversification par les ENR.

  2. bravo à ce monsieur, pour son courage!

    l’hydrogène carburant est une ineptie physique , écologique et économique.
    – physique d’abord, parce que l’énergie électrique disponible en fin n’est que (au mieux) le quart de l’électricité nécessaire à la production de l’hydrogène (si le H2 est produit par électrolyse ou hydrogène vert- l’hydrogène bleu, on n’en parle même pas tellement c’est n’importe quoi)
    – écologique ensuite, car il faudra bâtir des infrastructures énormes pour la production, le stockage et la distribution de ce nouveau carburant alors que l’électricité est déjà disponible
    – économique enfin, car vu le rendement du processus, le coût des déplacements sera intrinsèquement 4 fois plus cher que la traction électrique et la machinerie PAC est complexe et beaucoup moins durable qu’un moteur électrique et qu’une batterie, le réservoir nécessitera des contrôles fréquent et couteux

  3. Si je comprends tout bien :
    – M. Jackson démissionne parce que le lobby pro-hydrogène UKHFCA soutient le gouvernement britannique, qui veut promouvoir toutes les sources de production d’hydrogène, y compris l’hydrogène « bleu », qui resterait l’apanage des pétroliers.
    – Les pétroliers veulent produire de l’hydrogène à partir des ressources fossiles, ce qui continuera à polluer, mais leur permettra d’apparaître comme des défenseurs du climat, tout en continuant à vendre les carburants actuels.
    – Le gouvernement britannique est intéressé par ce que propose le lobby pétrolier, ce qui leur permettra d’apparaître comme des défenseurs du climat, en sachant que c’est le contribuable qui va payer la facture, d’une manière ou d’une autre.

    Donc, M. Jackson vient de découvrir que les lobbies de l’énergie et du pétrole sont prêt à tout pour gagner beaucoup d’argent et que les politiques sont prêt à tout pour rester au pouvoir.
    Il vient de naître ou quoi ?? ^^

    1. Il pensait peut-être que le monde des bisounours existait vraiment !?
      De toute façon, tous polluent, ne rien faire aggraveraient les choses.
      L’énorme avantage du H², est qu’il nous redonne de l’indépendance vis-à-vis des ressources extérieures de l’Europe, et donne de l’espoir de possibilité d’emploi chez nous.
      De plus à terme, l’espoir de faire diminuer la pollution reste réel à terme … D’ici 20 ou 30 ans.

    1. Si « L’utopie hydrogène » nous fait baisser notre dépendance aux énergies fossiles … c’est tout bon !

      1. À partir du moment où le trop-plein de production des EnR est perdu … qu’est-ce que l’on à faire du rendement « médiocre » pour produire du H² ?
        Ça limite les exportations du pétrole et gaz.
        Ça limite les dégâts sur l’environnement … Même si cela pollue intrinsèquement.
        Ça limite notre dépendance énergétique … Vis-à-vis des monarchies et dictatures
        C’est bon pour nos emplois.

        1. le soucis des excès de production électrique des ENR, c’est qu’il a fallu dépenser énormement d’argent pour s’équiper de très nombreuses éoliennes, de gigantesques surfaces de panneaux photovoltaiques, de noyer des vallées avec des barrages.

          Faire de l’hydrogène avec le « surplus » d’élect ENR subventionné, c’est comme donner 100 milliards € en subvention pour que les paysans français produisent des milliards de kg de fraises, avant de proposer une nouvelle subvention pour méthaniser le surplus de fraise, avec un rendement médiocre…

          Ne regardons pas uniquement le surplus des ENR
          Regardons aussi comment est on arrivé à ce surplus (et à quel prix)

          1. Le problème est qu’avec les chantiers énormes en cours de construction d’EnR en France et en Europe les surplus de production d’énergie vont devenir de plus en plus fréquents.
            Les « trous » de production en Europe sont compensés de par du gaz qui vient de chez Poutine ou du pétrole des monarchies ou des mines de charbon des ex-pays du Pacte de Varsovie.
            IL serait temps qu’une solution française (entre autres) plus rationnelle s’impose !

        2. « À partir du moment où le trop-plein de production des EnR est perdu … qu’est-ce que l’on à faire du rendement « médiocre » pour produire du H² ? »
          dix ans qu’on débunke ce fake total, mais il est encore là et la plupart du temps propulsé dans les com par les mêmes qui se sont fait débukés deux mille fois.
          il n’y a pas, et il n’y aura pas, de surplus ENR à la hauteur des besoins d’une fraction du parc énergétique et encore moins automobile.

          tout simplement car même affecter une très importante fraction de la prod ENR ne suffirait pas à seulement éponger les besoins en conversion de l’Hydrogène fossile actuel, non énergétique.

          c’est archi démontré. DOnc en appeller au pouillème que représente l’H2 de pertes fatales (et il y en a très peu, de pertes réellement fatales) pour alimenter un parc mobile de taille européenne c’est juste risible.

  4. Leur système de couleur pour la production d’hydrogene il est quand même complètement aberrant. Je cherche toujours la logique du comment ils ont attribués les couleurs. J’associe le bleu à l’eau mais pas eu et plutôt le vert à la biomasse et végétaux.
    Enfin bon l’hydrogene, ça reste intéressant pour utilisation domestique et stationnaire, en production locale et nous débarrasser de la dépendance au pays extracteurs des métaux rares pour fabriquer les batteries.
    Surtout que l’Europe à l’air d’être en pointe pour le stockage de l’hydrogène à pression et température ambiante (en gel ou en solution)

    1. gaspiller autant d’énergie pour « nous débarrasser de la dépendance au pays extracteurs des métaux rares pour fabriquer les batteries. » est nettement moins efficace que :
      – fabriquer du stockage stationnaire électrochimique (ou non ) à très haut rendement SANS métaux rares. Et on a de (très) nombreux protos à même de le faire
      – devenir nous même producteurs de ces ressources et/ou diversifier nos fournisseurs pour ne pas en être dépendants.

    1. Ah oui l’Europe achète son pétrole principalement aux USA?
      https://www.senat.fr/rap/r05-259/r05-2595.html
      Ben non!

      Donc NON pour répondre à :

      « L’Europe ne semble plus capable que de faire perdurer les veilles techno le plus longtemps possible. Y aurait il y a une raison a cela? »

      la réponse n’est pas :

      « Les pays producteurs ? Américains en tête. »

  5. la production des ENR excédentaire n’est pas vraiment perdue, mais elle fait baisser le prix de l’électricité à un point que les producteurs par les autres méthodes perdent de l’argent.
    Imaginons qu’on décide de mettre un électrolyseur pour consommer l’excédent électrique:
    il faut d’abord un système de traitement d’eau couteux et polluant pour alimenter l’électrolyseur
    il faut aussi un stockage intermédiaire sous pression puis un réseau de distribution
    puis des stations
    puis des véhicules qui peuvent l’utiliser.

    l’hydrogène carburant cumule les défauts de l’électricité (pas de réseau de distribution) et celui des produits pétroliers (risque d’explosion, entretien de la chaine énergétique du véhicule), pour un prix qui est supérieur au pétrole et a l’électricité

    l’hydrogène gazeux a de l’intérêt en chimie, métallurgie, si vraiment on a de l’électricité a ne plus savoir qu’en faire, autant le garder pour ces usages et éviter de faire des machines à gaz complexes que sont les PAC. la technologie des batteries s’améliore tous les jours, bientôt on n’aura plus besoin des métaux précieux pour les cathodes et anodes, le Li sera remplacé par du Na, et le réseau de distribution de l’électricité existe déjà.

    la contrainte principale de l’autonomie sera réglée par des recharges rapides, du train + voiture, des voitures sur des trains, des tenders que l’on louera pour le voyage, et surtout par une réduction de nos voyages en voiture personnelle.

    bref a part capter de l’argent public, je ne vois pas l’intéret de travailler sur des projets hydrogène pour la mobilité personnelle

  6. dans ce cas là, la méthode la plus efficace pour résoudre ce « problème », ça consiste à stopper ces énormes chantiers, tout simplement

    (ps: en bonus, ça économiserait des milliards en subvention, libèrerait du budget pour autres dépenses, pour autres investissements, ou soulager les impôts pour les européens….)

    1. Les programmes Français et Européen sont déjà largement amorcés et la nouvelle vague de génération de centrales nucléaires tarde à arriver… Si elle arrive !?
      Le couple EnR-H² s’impose logiquement … sauf à faire du dogmatisme.
      Sinon, la facture pétrole et gaz (voire lignite)+ encore plus de pollution devient inévitable.

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