Essai rétro: Nissan 300ZX 1991, la voiture de Sofie

Difficile de croire que cette 300ZX est la descendante de la Fairlady Sports 2000 de samedi! Elles n’ont même pas le badge en commun: la Fairlady Sports est une « Datsun » et la 300ZX, une « Nissan ».Hubris

On a déjà évoqué l’épidémie généralisée de grosse tête chez les industriels Japonais, dans les années 80. Ils sont conquérants, ambitieux et en plus, tout le monde leur déroule le tapis rouge. Dans l’automobile, Honda, Nissan et Toyota ont conquis le marché américain du milieu de gamme. Prochaine étape: le haut de gamme. Avec sa nouvelle 300ZX (type Z32), Nissan ambitionne de balayer les constructeurs de GT, notamment Porsche !

L’objectif semble d’autant plus atteignable que toutes les firmes établies traversent une crise. Avec les nouvelles normes de sécurité et d’environnement, sans oublier l’apparition des gadgets électroniques, les coûts de conception explosent. Les généralistes s’en sortent grâce aux volumes qui permettent d’étaler l’augmentation. Mais comment faire lorsque vous ne produisez que quelques milliers de voitures par an ? En plus, chacun a un problème identitaire : fondateur disparu, modèle-phare vieillissant, nouveauté décevante, rachat par un grand groupe qui tourne au fiasco, etc. Dans ce contexte, la 300ZX (et la Honda NSX) semble être la future « Honda CB 750 » des 911 et autres Lotus Esprit…

La 300ZX débarque en 1990. Le constructeur compte sur la réputation des précédents modèles et sur un engagement en IMSA pour lui donner une image. Ce que l’on voit d’emblée, c’est un tarif très agressif : 370 000 francs pour un coupé de 280ch ! C’est à peine plus qu’une Alpine V6 Le Mans (362 300 francs), alors qu’elle offre 185ch. C’est surtout beaucoup moins que les 450 000 francs requis pour une Porsche 911 Carrera 2 (250ch), sans parler des 659 000 francs d’une Ferrari 348tb (300ch.)

Elle ne fait pas son âge

Pour la conception de la 300ZX, Nissan ne laisse rien au hasard. Il veut la crème de la crème ! A ce niveau de gamme, c’est le seul moyen de lutter face à des marques établies. Ainsi, Nissan fait appel au Cray-2, un super-ordinateur utilisé d’ordinaire par la NASA ou l’industrie nucléaire. La ligne est très moderne. Certes, certains détails (comme les feux arrière « futuristes ») ont vieilli, mais elle n’a pas du tout l’air d’avoir 22 ans. Plus prosaïquement, elle est tellement avancée qu’en cas de crash, elle est plus sûre qu’une 350Z (pourtant apparue en 2003 !)

En version Twin Turbo (la seule importée en France), la présentation se veut sportive. D’où cet imposant aileron et surtout, les quatre sorties d’échappements:

Full option de chez full option !

A l’ouverture de la porte, la première impression n’est guère enthousiasmante : un intérieur tapissé de velours côtelé, dans le plus pur esprit jijinabi !

Mais très vite, on se ravise. En terme de qualité perçue et d’assemblage des matériaux, cette voiture de 1991 peut donner des leçons à bien des voitures de 2013… De plus, l’équipement est ultra-complet, même vu de 2013 : rétroviseurs électriques, sièges électriques quatre axes, vitres électriques, climatisation automatique, régulateur de vitesse, condamnation centralisée, direction assistée, radio-CD ET cassette et à partir de 1992, d’un airbag conducteur. A titre de comparaison, à l’époque, sur la Renault 21 (l’une des meilleurs ventes françaises), aucun de ces équipements n’est disponible, même en option (sauf la direction assistée et les vitres électriques)

En France, elle est uniquement proposée en T-Top (on y reviendra.) Le cabriolet, développé par ASC, est réservé au marché US. Chaque panneau est fournit avec un cache démontable. Vous pouvez donc choisir d’enlever tout ou partie des demi-toits ou de rouler avec ou sans les caches. Sans les caches, l’habitacle devient très lumineux.

Motoring

On se souvient que Carlos Ghosn a brocardé les « voitures d’ingénieurs » de Nissan au moment où il a pris la tête de l’entreprise. Effectivement, il y a une intention portée à des détails insignifiants, comme la clef de contact en titane.

On aurait préféré qu’ils se penchent sur des problèmes plus terre-à-terre, comme les demi-toits. D’une part, ils sont lourds comme une blague d’Eric & Ramzy. Ensuite, une fois démontés, ils n’ont aucun rangement dédié. Il faut se contenter de les glisser dans des pochettes, qui se maintiennent avec une sangle. Mais une fois en place, impossible de poser des choses lourdes dessus (comme les courses du supermarché…)

Le moteur est un V6 biturbo 3,0l double-arbre-à-cames 280ch. On en a fait, du chemin, depuis la Datsun Sports 1000 et ses 36ch ! La version V6 atmo 220ch n’est pas importée à l’époque. Du reste, c’est bien sûr une propulsion.

Ce moteur est un régal. Malgré les turbos, la poussée est progressive. Et ça pousse fort ! L’effet coup de pied aux fesses perdure. Malheureusement, en ces temps où les « zones de danger » se multiplient, pas question de vérifier les 250km/h revendiqués… Disons simplement que si l’on sollicite la voiture, le comportement est impeccable. Le plus bluffant étant l’absence de turbulences aérodynamiques, signe d’une conception soignée. En 1991, on lui reproche un poids élevé. Mais vu de 2013, 280ch pour 1,6t, c’est plutôt flatteur. Quant à la position de conduite, grâce aux quatre axes du siège, chacun pourra choisir le réglage qui lui convient…

Les défauts? Le bruit du moteur est trop feutré. Malgré les quatre sorties, il reste plutôt silencieux, même à haut régime. Vous voulez piloter la voitures gagnante à Daytona et Sebring, mais elle offre le bruit (et le confort) d’une berline. Consternation ! Aux Etats-Unis, Steve Millen proposera d’ailleurs une 300ZX plus radicale (avec l’accord de Nissan North America.)

Le gros défaut, c’est la consommation. Oui, lors de la prise en main, il y avait le plein et le compteur journalier était à 0 (photo prise AVANT l’essai « dynamique ».) En cycle urbain, elle admet 15,8l au 100km.

Délit de faciès

La 300ZX est un coupé performant et puissant, à tout petit prix. A la limite, avec un badge « Porsche », elle se vendrait comme des petits pains. Mais en 1991, Nissan manque de crédibilité dans le haut de gamme. En plus, le constructeur ne sait pas la « vendre ». Il faudrait des versions plus spartiates, destinées par exemple aux journées circuits. En plus, elle est noyée dans la gamme, avec les coupés 100NX et 200SX.

De toute façon, au début des années 90, le sol se dérobe sous les pieds des Japonais. Ils n’ont plus un yen à investir dans cette voiture. Le trou d’air des constructeurs de GT prend fin : Porsche se réveille avec la 993 et Ferrari, avec la 355. Les ventes de la 300ZX -qui n’ont jamais décollé- font le plongeon. En 1996, Nissan North America et Nissan Europe arrêtent les frais. La 300ZX reliftée arrive enfin, mais elle est réservée au Japon. Elle s’efface en 2000. La carrière de la 300ZX « Z32 » fut presque 2 fois plus longue que celle de l’ancien modèle (alias « Z31 »), mais il s’en est vendu 2 fois moins !

Voiture méconnue, avec des prestations encore d’actualité en 2011, la 300ZX a tout d’un très bon plan. On en trouve à vendre entre 10 000€ et 15 000€. A partir de là, attention ! Comme toutes les grosses cylindrées youngtimer, elle a souvent droit au tuning sauvage (avec pièces non-homologuées), à l’entretien bâclé (car trop onéreux), voire à un accident qui a été rafistolé ensuite. Sans oublier les cas extrêmement suspects (prix de vente extrêmement bas, vendeur qui a l’air pressé, etc.) Gardez bien en tête que contrairement au prix de vente, l’assurance (c’est une 15cv) et l’entretien, eux, ne baissent pas. Mieux vaut donc se garder des marges de manœuvre dans le budget…

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