Depuis quelques mois, les voitures électriques sont arrivées dans les concessions Françaises et chez les loueurs. Par contre, les acheteurs se font rares. Voilà pourquoi Nissan fait une piqure de rappel avec la Leaf. C’est l’occasion d’essayer cette compacte 100% électrique en conditions réelles.
La voiture électrique, mais en mieux?
Sur le papier, la voiture électrique possède de nombreux avantages (pas d’émissions directes de CO2, coût d’utilisation plus bas, silence, rendements mécanique plus élevé, etc.)
Néanmoins, l’homme de la rue y voit surtout des contraintes. L’illustration de ces craintes est matérialisée jusqu’à la caricature par les Citroën C-Zero/Mitsubishi I-miev/Peugeot Ion: une autonomie trop limitée, une tenue de route déplorable, des performances trop faibles et un prix trop élevé.
Acheter une électrique est avant tout un acte militant. Comme l’était l’achat d’une hybride il y a une dizaine d’années.
Le discours des constructeurs est donc de dire: « On a créé une électrique qui plaira même à ceux qui n’ont pas forcément de sensibilité écologique. »
C’est le cas de Nissan avec la Leaf.
Elle est commercialisée depuis décembre 2010 au Japon et aux Etats-Unis. Il s’en est vendu jusqu’ici 11 000 unités au Japon et 10 200 unités en Amérique du Nord (Etats-Unis + Canada.) La chaine Japonaise tourne à plein régime et elle sera bientôt secondée par des unités aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne.
Elle est arrivée début 2011 en Europe. Il s’en est vendu environ 2 500 sur le vieux continent (dont la moitié en Norvège.)
En France, elle est en concession depuis septembre et seules 83 unités ont trouvé preneur. Ce qui la place au 282e rang, à proximité de la Subaru Trezia et de la Suzuki Kizashi.
Prius électrique
La Leaf mesure 4,45 mètres de long sur 1,77 mètres de large. C’est-à-dire, à quelques centimètres près, les cotes d’une Prius. Même le représentant de Nissan France s’en amuse.
Esthétiquement, par contre, la Leaf n’a rien à voir avec une Prius.
La face avant porte bien les codes de Nissan. Les lignes générales ne ressemblent à aucune autre voiture tout en manquant de caractère.
Sur une voiture thermique, le bruit du moteur couvre de nombreux bruits parasites (roulement, flux d’airs, etc.)
A cause du silence d’un moteur électrique, ces bruits parasites deviennent d’autant plus envahissants.
Nissan jure sur le cœur qu’ils ont remédié à cela en optimisant l’aérodynamisme. Ainsi, la Leaf affiche un cx de seulement 0,29…
Mais les vieux schnocks comme votre serviteur se souviennent que la valeur de 0,29 n’est pas exceptionnelle en soit. Certaines voitures des années 80, comme l’Audi 100, arrivaient à une telle valeur.
Comme la Prius, la Leaf peut recevoir des panneaux solaires. Greenwashing oblige. Sur la Toyota, ils ne s’occupent que du moteur de l’air conditionné. Sur la Nissan, ils fournissent de l’énergie pour la batterie 12V.
Enfin, Nissan a bien compris que le client d’une voiture propre veut que tout le monde sache qu’il roule dans une voiture propre. D’où cet emblème « zero emission » sur le hayon.
Beige
L’intérieur est très « voiture japonaise ». C’est beige; c’est gris.
Au moins, il y a de l’espace: c’est une vraie 5 places.
De plus, l’habitacle est très lumineux, grâce à ses larges surfaces vitrées.
Les plastiques sont dans la moyenne, point. A 30 990€ (bonus écologique déduit), on peut se montrer exigeant.
Greenwashing N°2: les sièges sont en bouteilles en plastique recyclées.
Le coffre fait 330l. Une contenance appréciable et plutôt exceptionnelle pour un véhicule équipé de batterie.En prime, la banquette est fractionnable.
Par contre, vous ne disposez pas d’un fond plat. Un véritable handicap pour y caser des cartons de meubles Ikea…
Le sac noir contient la rallonge (sur laquelle on reviendra.)
La fausse note, c’est la planche de bord façon Airbus, avec ses multiples écrans. Sachant que chaque écran contient plusieurs informations. Cela fait autant de sources de distractions.
Moulin électrique
Sous le capot, surprise: le carénage du moteur électrique (à gauche) possède l’apparence d’un bloc thermique.
La batterie sur la droite ne s’occupe que des phares, du chauffage, etc.
Quoi qu’il en soit, point de « range extender »; c’est du 100% électrique!
La finition laisse un peu à désirer. Ca, c’est du câblage réalisé le vendredi soir!
Silence, on roule
Comme d’habitude avec les électriques, il n’y aucun bruit, aucune vibration au démarrage. Seule une petite musique et la diode verte sur le tableau de bord vous indiquent que le moteur tourne.
Autre caractéristique des électriques: la boite de vitesse est simplifiée. Curieusement, il faut tirer le levier vers soit pour passer en « drive » (un second mouvement permet de passer en mode « éco ») et le pousser pour enclencher la marche arrière.
Avec 280Nm de couple (disponible en permanence) et 109ch pour 1,5t, les accélérations sont franches.
Par contre, l’ESP est sévère: interdiction de démarrer pied au plancher, même sur le sec et en ligne droite!
En dessous de 30km/h, la voiture émet artificiellement une espèce de sifflement censé avertir les piétons. En pratique, faute de vous entendre, personne ne vous « voit ».
J’ai même failli refaire une aile durant l’essai: une jeune conductrice, toute occupée à téléphoner, continuait à avancer alors que je lui barrais la route!
A gauche du tachymètre, vous avez un indicateur de « sapins ». Plus votre conduite est douce, plus vous avez de sapins (toute ressemblance avec les fleurs de la Honda Insight…)
Sur une échelle de 0 à 3 sapins, la conduite de votre serviteur vaut 1 sapin:
Côté trains roulants, il y a de nets progrès par rapport aux précédentes électriques.
Malgré tout, dans l’absolu, les roulettes Bridgestone qui équipent la Leaf restent loin du compte en terme de confort et de bruits de roulements.
Voiture branchée
Les prises sont dissimulées sous le logo Nissan, à l’avant.
A l’achat, Nissan vous offre un adaptateur vous permettant de le brancher sur le 220V (que le représentant de Nissan tient en main.)
Si vous n’avez pas confiance dans votre installation électrique domestique, une « home box » est proposée (500€ hors pose.)
Ensuite, un chargeur rapide est disponible. Il vous offre 80% de « plein » en 28 minutes.
Une deuxième génération d’appareil, plus compact, sera bientôt lancé.
Cocorico, ces « Fast charge » sont construits par DBT, une entreprise implantée dans le Nord.
Une application iPhone permet de gérer la recharge de votre Leaf. Par exemple, vous pouvez décider de ne la recharger qu’à partir de 22h, pour bénéficier des tarifs de nuit d’EDF.
Stress
Lorsqu’un quidam monte dans une électrique, sa première crainte est l’autonomie. Et, loin de vous rassurer, Nissan a plutôt tendance à vous stresser!
Ainsi, il y a une myriade d’indicateur pour vous rappeler que vous ne pouvez pas aller très loin.
D’une part, le « carwings » vous indique le rayon d’action (en blanc) de votre voiture.
Ensuite, on vous liste les points de recharge les plus proche.
Notez d’ailleurs qu’à terme, tous les concessionnaires Nissan disposeront d’un « Fast charge ».
L’autonomie théorique est entre 160km (aux normes US) et 200km (aux normes japonaises.)
L’ordinateur vous indique en permanence le nombre de kilomètres que vous pouvez parcourir, d’après votre consommation passée. Ainsi, au démarrage, je disposais de 135km…
Mais dés que j’ai mis le chauffage en route, je ne disposais plus que de 115km…
Et 47,9km plus tard, je n’avais plus que 43km d’autonomie, malgré une conduite « 1 sapin »!
Et si malgré tout, vous restez zen, sachez qu’en dessous de 60km d’autonomie, le GPS vous déclare à chaque changement de direction: « Vous risquez de ne pas arriver à destination. »
On a connu plus rassurant…
Conclusion
Par rapport à la triplette Citroën C-Zero/Mitsubishi I-miev/Peugeot Ion, il y a eu d’énormes évolutions. A prix égal, vous disposez d’une voiture plus grande, plus spacieuse, plus performante, mieux finie, mieux équipée et plus confortable.
Malgré tout, l’écart entre une Leaf et une thermique reste béant. D’après les calculs de Nissan, rouler en électrique vous fait économiser 767€ chaque année (hors assurance) par rapport à un diesel. La Leaf est vendue 35 990€ (30 990€ avec le bonus écologique de 5 000€), ce qui la met donc au niveau d’un diesel à 27 165€. A ce prix-là, vous avez par exemple une Alfa Romeo Giulietta 2,0l JTDM 140ch Progression (26 600€) ou un Hyundai Veloster 1,6l GDI 140 pack Premium (27 540€.)
La Leaf ne peut donc pas lutter face à des concurrentes thermiques en terme de prestations et de polyvalence. Rouler en électrique reste un choix militant.
Nissan reconnait que la cible est très restreinte: des CSP++ habitants dans une grande ville (des ruraux auraient peur de se retrouver en « panne sèche » en rase campagne) et ayant un pavillon (car la copropriété n’acceptera pas que vous pompiez gratuitement l’électricité de l’immeuble.)
Quoi qu’il en soit, ce n’est qu’un début. La diffusion des électriques entrainera un cercle vertueux, avec des batteries plus performantes et des prix à la baisse.
Rendez-vous donc dans quelques années…
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