Tests de voitures à hydrogène avec Air Liquide

Venir essayer des voitures sur circuit, c’est fréquent au Blog Auto. Sauf que cette fois-ci, point de GT ou de monoplace! En effet, Air Liquide nous a invité à Marcoussis pour venir essayer des voitures fonctionnant avec une pile à combustible. Ou plus vulgairement, des voitures à hydrogène.

Le moteur thermique 4 temps offre des performances et une autonomie inégalée. Mais par définition, il émettra toujours du CO2, même en y ajoutant des filtres ou en optimisant son cycle.

Le moteur électrique est silencieux et il n’émet rien du tout (nonobstant la question de la production d’électricité.) En revanche, il butte sur de nombreux soucis (autonomie, temps de charge, poids et durée de vie des batterie, etc.)

La pile à combustible apparait comme une alternative. En l’utilisant pour produire de l’électricité, on élimine la plupart des défauts de l’électrique.

Le problème est que l’hydrogène est une vieille lune. Les coûts sont prohibitifs et cela fait des années qu’il reste bloqué au stade expérimental. A titre d’exemple, j’étais personnellement monté à bord d’une BMW Hybrid7 en 2008. A l’époque, la marque Bavaroise jurait que l’hydrogène arriverait « bientôt ».

Le discours d’Air Liquide, c’est que ce « bientôt » approche aujourd’hui à grands pas. Le leader mondial de la fourniture de gaz croit à l’hydrogène. En 109 ans d’histoire, cette entreprise Française n’a jamais autant investi dans la recherche.

Il cofinance actuellement le programme Français Horizon Hydrogène Energie (H2E.)

Notez que jusqu’ici, Air Liquide n’avait pas de liens directs avec l’automobile. On citera seulement ce camion Mack de 1934 équipé de néons Georges Claude ou le financement de la monoplace De Coucy de 1947.

Pour qu’une technologie progresse et se démocratise, l’automobile doit compter sur d’autres secteurs. Grâce aux téléphones portables, les voitures électriques ont pu disposer de batteries plus performantes, moins chères et plus faciles à recycler.

Le salut de la voiture à hydrogène, c’est le groupe électrogène à pile à combustible (ci-dessous.) En Inde, il est utilisé pour alimenter des antennes-relais de téléphones, dans des zones où il n’y a pas d’électricité.

L’hydrogène est également utilisé par les chariots-élévateurs et les bus. De quoi permettre de le « démocratiser » et de faire baisser les prix.

Les invités

Divers constructeurs sont invités.

Les Japonais sont les plus actifs dans l’hydrogène, suivi par Hyundai. Mercedes et dans une moindre mesure, Opel, sont les seuls Européens encore présents.

Les constructeur Français brillent par leur absence à Marcoussis.

Renault surveille de loin ce que fait son allié Nissan.

Tandis que Peugeot est venu avec une 307 CC. Cette voiture serait avant tout à effectuer des tests chez PSA et c’est le seul modèle qui n’est pas à disposition des journalistes.

Les stations de recharge

Un réservoir d’hydrogène, ça se recharge (presque) comme un réservoir d’essence. Le temps de remplissage est équivalent. Notez qu’il n’y a pas pour l’instant de normalisation de la pression de chargement ou de la forme des pistolets.

Aujourd’hui, il existe 15 stations à hydrogène en Allemagne. Le Japon en possède 12. Il existe également des stations en Corée du Sud, en Chine, en Italie et en Scandinavie.

Néanmoins, le grand champion de l’hydrogène, ce sont les Etats-Unis, avec une vingtaine de stations. En Californie, Arnold Schwarzenegger avait lancé un ambitieux projet baptisé « les autoroutes de l’hydrogène » avec l’objectif de quadriller l’état.

Au total, Air Liquide gère (ou co-gère) 55 stations. Il est donc en situation de quasi-monopole mondial.

A moyen-terme, il y aura une centaine de stations en Allemagne et au Japon, ainsi qu’une cinquantaine en Corée du Sud.

Et la France? Non seulement il n’y a pas de station d’hydrogène existante ou en projet dans l’hexagone, mais il n’existe même pas de législation pour en installer une!

Hydrogène et émissions

Un moteur à pile à combustible n’émet que de la vapeur d’eau. Pour info, c’est de l’eau déminéralisée (n’essayez donc pas de la boire.)

L’hydrogène ne se trouve pas à l’état brut dans la nature. La solution actuelle consiste à l’extraire du pétrole.

Sur l’ensemble du cycle « du puis à la roue », on gagne entre 20% et 30% par rapport au cycle d’un moteur thermique (on arrive ainsi aux valeurs d’un moteur hybride essence/électrique.)

L’avenir, c’est le « blue hydrogen ». Il s’agit d’un hydrogène obtenu à partir d’énergies renouvelables (éolien, solaire…)

Ainsi, on ferait baisser les émissions de CO2 sur l’ensemble du cycle.

Air Liquide compte sur la démocratisation de l’hydrogène pour stimuler la construction d’infrastructures « d’hydrogène propre ».

Les essais

Pour appuyer la démonstration du « l’hydrogène, c’est aujourd’hui », les constructeurs laissent les journalistes prendre le volant de divers voitures à pile à combustible.

L’essai est limité à deux tours de circuit, sur une piste assez lente et qui plus est, avec du trafic. C’est un petit roulage; ce n’est pas un essai routier complet.

Essai N°1: Hyundai ix35 FCEV

La Corée du Sud est venue tardivement à l’électrique et à l’hydrogène. Le pays veut une industrie automobile forte. Hyundai peut avoir les moyens de ses ambitions.

L’ix35 FCEV dispose d’un moteur électrique de 100kW (136ch.) Suivant l’état des batteries et la puissance d’accélération, il est alimenté soit par les batteries, soit par la pile à combustible. Il n’y a pas de moteur thermique.

Avec un plein de 5,6kg d’hydrogène (soit 144l), il serait capable de rouler 580km, avec une vitesse maximale de 160km/h.

J’ai été assez bluffé par le Hyundai, car c’est une voiture… Normale. Il offre les prestations d’un ix35 thermique. Du peu que j’en ai vu, il n’y a pas de différence en terme de comportement ou de qualités dynamiques.

Vous pouvez avoir des convictions et rouler dans une vraie voiture!

Le seul changement, c’est le silence de fonctionnement. Il est possible d’activer un bouton, afin qu’à basse vitesse, il prévienne les piétons (via une sonnerie qui ressemble à celle d’un portable.)

Le réservoir d’hydrogène prend sur le coffre, mais le volume reste acceptable.

Essai N°2: Honda FCX Clarity

Honda a construit une vingtaine de FCX Clarity pour la Californie. Le modèle essayé débarque d’ailleurs des Etats-Unis.

Du reste, elle est produite au goute-à-goute depuis 2008.

Esthétiquement, on dirait une grosse Insight.

Comme souvent chez Honda, les compteurs à affichage digitaux semblent sorti d’un film de science-fiction!

Les performances sont, sur le papier, peu ou prou celles du Hyundai: moteur électrique de 100kW (136ch) et 160km/h en pointe. Par contre, elle ne disposerait que de 460km d’autonomie.

Et là encore, on a une vraie voiture, avec une vraie finition, de vrais trains roulants, etc.

Les autres

A cause de l’affluence, il n’est pas possible d’essayer tous les modèles.

Voici un rapide tour d’horizon des autres véhicules présents.

Chez Toyota, il y a le FCHV-adv, dérivé du Highlander. Il n’offre que 90kW (122ch) et 155km/h en pointe. Par contre, il revendique 830km d’autonomie.

Et surtout, Toyota annonce la commercialisation d’un modèle à pile à combustible d’ici 4 ans.

L’Opel HydroGen4 dérive d’un Chevrolet Equinox et effectivement, sa qualité d’assemblage est très… Américaine.

Opel l’a dévoilé au salon de Francfort 2007 et il en a depuis construit une centaine. Son autonomie n’est que de 320km.

Vous l’aurez reconnue, la Mercedes F-Cell est une Classe B. C’est la voiture la plus compacte du parc.

La firme à l’étoile est une de celles qui communique le plus sur les voitures à hydrogène.

Avec son moteur électrique de 100kW (136ch), elle revendique 170km/h en pointe et 385km d’autonomie.

Enfin, Intelligent Energy, un fabricant de pile à combustible, est présent avec un « black cab » converti par Lotus Engineering.

C’est le véhicule le plus expérimental du lot. Intelligent Energy voulait avant tout un démonstrateur; elle n’a pas vocation à commercialiser ce véhicule.

Conclusion

Une voiture électrique qui offre les performances, l’autonomie et l’agrément de conduite? J’achète!

Entre l’électrique « normal », les hybrides plug-in et les voitures à pile à combustible, il n’y a pas photo.

Le seul obstacle, c’est le prix et l’absence de stations à hydrogène. Chacun se renvoi la balle.

La plupart des constructeurs présent à Marcoussis attendent les stations pour produire en série.

Quant aux pouvoirs publics, ils attendent que les véhicules à hydrogène se généralisent pour aider aux développement du réseau de rechargement. Il faudrait 200 milliards d’euros pour avoir un maillage acceptable par l’automobiliste.

D’après le cabinet McKinsey, si l’hydrogène se généralisait, les coûts seraient équivalents à l’essence et à l’électrique en 2050.

Côté Air Liquide, la démarche n’est pas désintéressée.

En 2010, il a réalise 1,4 milliards d’euros (soit 10% de son chiffre d’affaires) avec l’hydrogène.

Si demain, 1% des automobilistes passaient à l’hydrogène, cela représenterait un marché de 10 milliards d’euros.

Et s’il s’agissait de 10% des automobilistes, on parlerait de 100 milliards d’euros.

Il y a donc une mine d’or potentielle.

Personnellement, je serai comme saint Thomas. L’hydrogène dans 4 ans, c’était déjà ce que nous promettait BMW en 2008…

De plus, actuellement, le prix du kilo d’hydrogène est de 5€ HT. Ne soyons pas naïf. Si demain, il y avait une conversion même partielle des automobiliste à la pile à combustible, Bercy inventera une taxe (comme elle va le faire avec le kWh pour voitures électriques.) De quoi rendre caduc les prévisions de rentabilité économique.

A lire également:

Ricoh Go Green Auto Rally

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *