Jusqu’il y a peu, on pensait que jamais GM ne quitterait sa place de N°1 mondial. Fin 2007, Toyota l’a pourtant dépassé. Aujourd’hui, le trône du Japonais vacille. Alors qui sera le prochain roi de l’automobile?
Voici les candidats officiels (et un groupe qui pourrait être N°1 sans le vouloir) pour le poste.
Evidemment, nul ne peut prédire l’avenir avec certitude. Pour vous en convaincre, relisez les prévisions d’il y a dix ans…
Le champion en titre: Toyota. Ventes 2010: 8 418 000 unités
Toyota reste le N°1 mondial. Officiellement, en interne, les signaux sont au vert.
L’affaire des pédales d’accélérateur est terminée. Un buzz en chasse un autre et les médias n’en parlent quasiment plus. Néanmoins, elle risque de marquer profondément le public. Elle leur a démontré que non, les Toyota ne sont pas des voitures parfaites, au dessus des pannes. Toyota, c’était le constructeur qui montait des panneaux solaires sur la Prius, alors que GM en était encore aux pick-up XXXL. Et désormais, la confiance est brisée.
L’affaire des pédales a eu des répercutions au-delà des Etats-Unis. En Chine, les ventes se sont écroulées: les Camry et Corolla sont sorties du top 10 des ventes.
Par ailleurs, Toyota reste une entreprise Japonaise, avec tout les défauts que cela a: organisation pyramidale, cadres dirigeants issus du même moule, pesanteur de la prise de décision, autisme généralisé… On l’a bien vu, lors de l’affaire, où les cadres ont réagi tardivement et avec une posture inappropriée.
L’ex: General Motors. Ventes 2010: 8 389 769 unités
Lorsque vous êtes N°2 et que le N°1 tombe, vous passez N°1, non? C’est la logique un peu simpliste qu’ont eu GM et un certain nombre d’analystes Américain. GM n’a pas hésité à « charger » Toyota lors de l’affaire des pédales d’accélérateurs.
En 2008-2009, le groupe a subi une cure d’amaigrissement radicale. Exit Hummer, Pontiac, Saab, Saturn et plus récemment, Daewoo. De nombreuses usines ont fermé. Des modèles ont disparu du catalogue.
Il en reste un groupe recentré sur une poignée de marques. Il a abandonné sa stratégie de régionalisation et désormais il vend une marque (Chevrolet) et certains modèles (Aveo, Spark, Cruze) aux quatre coins du monde. En plus, il peut se vanter de ses succès en Chine et d’une stratégie agressive en Inde.
Reste que GM est un suiveur (tout comme Ford et autrefois, Chrysler.) Il ne révolutionne pas l’automobile. Depuis 30 ans, il se contente d’adopter les modes défrichées par d’autres. C’est pourtant une condition sine qua none pour être un vrai leader.
L’autre souci, c’est que GM est encore convalescent. Il ne s’est pas encore remis de sa mise en faillite. Ainsi, lors des deux derniers salon de Detroit, il n’avait pas grand chose de neuf à présenter. Y compris des concept-cars. Le risque étant que le temps que la machine ne se remette en marche, GM n’ait n’ait glissé au 3e ou au 4e rang.
Le troisième homme: Volkswagen. Ventes 2010: 7 140 000 unités
En 2010, VW a connu une croissance de 13,5% et pour la première fois de son histoire, il a dépassé la barre des 7 millions. Il compte bien occuper l’espace laissé vacant par Toyota.
Son arme, c’est près 1,9 millions de ventes en Chine. En Inde, il compte bien faire de même sur le très long-terme et en Amérique du Sud, il est historiquement très présent. Aux Etats-Unis, la Passat US se verrait bien en nouvelle Camry. D’ailleurs, VW aimerait bien faire du Nascar.
Enfin, comment ne pas évoquer les succès d’Audi et Skoda? Au niveau mondial, la marque aux anneaux n’a plus aucun complexe face à BMW et Mercedes. Quant à Skoda, cette ex-marque moribonde du rideau de fer peut aujourd’hui se vanter d’être mondialement présente.
Le défaut de VW, c’est une stratégie décidée par l’égo surdimensionné de Ferdinand Piech. A force de monter en gamme, le groupe s’est coupé du marché des voitures bon marché. Il a également beaucoup de retard sur les électriques.
En Europe, les marques se marchent plus ou moins dessus. La récente absorption de Porsche ne va pas simplifier les choses, au contraire.
L’autre Japonais: Honda. Ventes 2010: 3 643 057 unités
Depuis les années 90, Honda s’est imposé comme le « frère-ennemi » de Toyota, au détriment de Nissan. Les deux marques n’ont pas arrêté de s’imiter: création d’une marque premium, voitures hybrides, crossover, F1, production en Chine…
Face à un Toyota K.O., Honda aimerait bien reprendre le flambeau. Aux Etats-Unis, il a vendu 1 230 480 voitures, derrière GM, Ford et Toyota, mais devant Chrysler, Hyundai ou Volkswagen. Il a pour lui une image de constructeur innovant et dynamique.
Le problème de Honda et Toyota, c’est qu’à force de se scruter mutuellement, elles n’ont pas vu l’émergence d’autres constructeurs. D’ailleurs, Honda ne figure pas actuellement dans le top 5 mondial. Sa production est à peine la moitié de celle de Toyota, GM ou VW.
La force tranquille: Hyundai. Ventes 2010: 5 739 973 unités
C’est le favori de la rédaction du Blog Auto. Dés l’an dernier, j’avais personnellement dit que « l’ère Toyota » cèderait sa place à un « ère Hyundai ».
Il y a 10 ans, Hyundai Motors était au bord du gouffre, suite à la crise Asiatique. Il faisait parti d’un chaebol (tentaculaire conglomérat familial Sud-Coréen) en plein effondrement. Daimler-Chrysler en a même brièvement été actionnaire. Puis Hyundai s’est relevé.
Les Coréens prétendent qu’ils n’ont pas l’agressivité des Chinois ou des Japonais. Ce sont un peuple d’habiles commerçants. C’est donc en commerçant qu’ils ont discrètement tissé leur toile, en passant par les pays émergents. Aujourd’hui, il dispose d’une relativement bonne image de marque.
Très habile, il s’est lancé en 2010 sur deux fronts. D’un côté, les grandes berlines pour les USA (avec les nouvelles Sonata et Azera) et de l’autre, une berline basique, la Verna/Solaris pour les pays émergents. De quoi grignoter encore des parts de marché.
L’autre visage du groupe Hyundai, c’est Kia. L’ex-fabricant de Mazda obsolètes rebadgées s’est métamorphosé. Il veut s’imposer comme le roi de la voiture bon marché, y compris dans les véhicules de niche. Le fait que Kia inonde le web de teasers de sa future Picanto/Morning montre bien les ambitions du constructeur.
Entre 1 et 10: Chery. Ventes 2010: 682 058 unités
Bien malin celui qui pourra prédire l’évolution des constructeurs Chinois dans 10 ans. En Chine, les cas de ChangHe/Hafei ou de ChangFeng montre que le roi du jour peut disparaitre le lendemain. Pourtant, ils semblerait que trois leaders sont en train d’émerger: Byd, Chery et Great Wall. Combien d’entre-eux figureront dans le top 10 de 2020?
En Chine, les constructeurs « purs » ne pèsent toujours qu’un petit tiers du marché. La différence étant que d’année en année, ils sont de moins en moins nombreux sur ce « tiers ». Chery possède actuellement une gamme qui va de la micro-citadine bon marché jusqu’à la grande berline premium, en passant par les SUV et les mini-vans.
Mais à l’avenir c’est sur l’exportation que les constructeurs purs devront s’appuyer. Chery est le premier exportateur, en terme de volumes. Pour autant, en 2010, moins de 10% de sa production production a trouvé preneur hors de Chine.
Le chiffre pourrait vite gonfler. Chery a compris la leçon. La méthode « old school » des constructeurs Chinois consistait à expédier des lots de voitures bas de gamme et à les vendre sur un terrain vague avec un Algeco dessus. Le tout avec le discours lénifiant (et en engrish) d’un cadre Chinois parachuté. Aujourd’hui, Chery dispose de vrais importateurs locaux (et ce sont eux qui parlent dans les salons) et il s’axe davantage sur le rapport qualité/prix. Les propriétaires de Chery sont plutôt satisfait (alors que ceux des premières voitures Chinoises avaient plutôt tendance à consteller les forums de noms d’oiseaux) et ainsi, de fil en aiguille, le constructeur Chinois s’installe en Amérique du Sud et en Europe Orientale.
Aura-t-il le temps, d’ici 2020, d’acquérir une taille mondiale?
Peu probable: Tata. Ventes 2010: 566 933 unités
Il y a trois ans, Ratan Tata faisait figure de nouveau messie avec sa Nano. L’ultra-low-cost Indienne devait inonder les pays émergents. Tata avait pour atouts les réserves financières du conglomérat Tata et la discrètion Indienne (qui faisait moins peur que l’arrogance Chinoise.)
Aujourd’hui, le bilan est contrasté. Certes, en 2010, Tata Motors a connu une croissance de 31%. Mais à l’échelle internationale, il reste un nain.
Pire: c’est avant tout un constructeur de poids-lourd. Parmi les 566 933 ventes de 2010, il n’y a que 214 506 voitures (hors Jaguar-Land Rover), dont 5 809 ont quitté le pays. Quant à la Nano, on l’a dit plusieurs fois, ses ventes n’ont rien de mirobolantes.
Certes, sur le long-terme, Tata peut devenir un constructeur de taille internationale. Mais il est peu probable qu’il y arrive d’ici 10 ans.
A l’insu de son plein gré: Renault-Nissan. Ventes 2010: 7 276 398
Parmi les bilans constructeurs, c’est la grande surprise. Renault a vendu 2 625 185 véhicules (en comptant Dacia et Renault-Samsung), Avtovaz (Lada), 569 506 véhicules et Nissan, 4 080 588 véhicules (en comptant Infiniti.) Soit un total de 7 276 398 véhicules et le 3e rang mondial, devant VW.
Est-ce vraiment un groupe? Renault et Nissan sont relativement indépendants et Renault n’est qu’actionnaire d’Avtovaz. Néanmoins, après tout, GM n’a pas autant de scrupule lorsqu’il inclue les chiffres des utilitaires Chinois Wuling (dont il ne possède qu’un tiers) dans ses résultats…
En une dizaine d’années, le très franchouillard Renault est devenu un acteur international. Avec son allié Nissan, il est présent sur l’ensemble du globe.
Cette croissance se fait au détriment du cœur historique du Renault, de plus en plus phagocyté.
Au lieu d’être N°1 quelque part et N°10 ailleurs, Nissan et Renault figurent toujours dans le top 5 des différentes régions. Et c’est grâce à cela, qu’ils sont donc N°3 au niveau mondial. Le tout, sans réelles ambitions affichées.
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