Dès l’aube de l’automobile, il y a eu une nette démarcation entre les fourgons de livraison, qui embarquaient marchandises et colis encombrants, et les automobiles, qui transportaient les gens avec un maximum d’espace et de confort. La plupart des usages quotidiens qui rendent un break si pratique de nos jours n’existaient pas alors : pas besoin de loger tout un chariot de courses pour la semaine, pas de planche de surf à rentrer dans le coffre pour un week-end à la mer. Avant le milieu des années 30, les bagages n’avaient même pas leur place dans l’habitacle. En règle générale, on mettait les affaires dans de solides malles, que l’on arrimait sur des galeries à l’arrière ou sur les marchepieds.
Quand le petit constructeur américain Hudson présenta son break Terraplane en décembre 1936, personne ne croyait que ce nouveau type de véhicule allait changer la façon de se déplacer : en vacances, en voyages d’affaires ou simplement en famille. A cette époque, on considérait cela comme un des nombreux concepts hybride essayant de jeter un pont entre la berline et la fourgonnette.
Pourtant, le Terraplane, avec sa carrosserie en panneaux de bois et sa grande porte arrière, était la première illustration réelle du concept de break, et le premier à être produit en série.
Malheureusement, la belle idée n’obtint jamais de succès commercial. Il fallut pour cela patienter jusqu’après la seconde guerre mondiale, essentiellement parce qu’il n’y avait pas à cette époque de demande pour de grands véhicules universels.
Tout changea au milieu des années 40 avec l’arrivée d’une classe moyenne composée pour une grande part de commerçants indépendants, de représentants de commerce et de petits artisans qui avaient besoin d’un véhicule pour leur activité, mais ne pouvaient pas aussi financer une voiture différente pour leurs besoins familiaux. Tous les grands constructeurs américains ont alors commencé à proposer des breaks. Cependant, ils en confiaient la réalisation à de petits carrossiers, surtout parce que ce type de petite série prenait du temps et n’était pas rentable pour eux.
Ces petits ateliers de carrosseries réalisaient les carrosseries spécifiques des breaks à base essentiellement de bois, ou en mêlant bois et acier. Bien que les carrosseries des premiers breaks américains (que l’on appelle des « woodies ») soient aujourd’hui considérées comme particulièrement attrayantes, elles n’étaient à cette époque que le résultat d’expédients. Les ateliers qui sous-traitaient les carrosseries utilisaient le bois parce que le travail de l’acier aurait été trop compliqué.
Quand la demande pour de tels véhicules polyvalents a commencé à prendre régulièrement de l’importance, les grands constructeurs américains ont repris la production avec une construction tout acier, souvent décorée d’une imitation de bois, ce qui permettait de les différencier visuellement d’une fourgonnette.
En Europe, la distinction entre la fourgonnette et la voiture de tourisme a commencé à s’estomper avec l’arrivée de la construction monocoque, ce qui a correspondu au début du Wirtschaftswunder allemand – le miracle économique – des années 50.
Comme aux USA quelques années plus tôt, l’arrivée de la bourgeoisie s’est conjuguée au baby-boom, ce qui a créé naturellement le besoin d’un nouveau type de véhicule. Les breaks ont représenté la solution idéale : ils pouvaient servir de voiture à tout faire pendant la semaine, et de familiale le week-end. Opel a été le premier constructeur allemand à sentir le vent venir et à offrir une voiture capable de proposer cette polyvalence.
En 1953, au Salon international de l’automobile de Francfort, Opel présentait le premier véritable break européen : l’Olympia Rekord, avec son arrière cubique mais vitré, était exposée à côté de la version berline. Les deux partageaient une carrosserie ponton et l’avant caractéristique en bouche de squale, mais le break arborait un nom qui allait entrer dans l’histoire automobile et devenir synonyme d’un type automobile : le « CarAvan. » Selon la légende, l’association des mots « car » (voiture en anglais) et « van » (fourgon) vient de l’interrogation « Is this car a van ? »
Contrairement aux fourgonnettes cubiques classiques, l’Opel Olympia Rekord Caravan de 1953 était étonnamment dans l’air du temps. « En un tournemain, » disait la publicité Opel d’époque, « et sans effort, les sièges arrières peuvent être repliés : l’élégante et respectable Opel Caravan devient alors un engin de transport très fonctionnel et véritablement économique. »
Le break a tout de suite eu du succès en Europe, représentant la synthèse parfaite de la berline élégante et de l’utilitaire pratique et fonctionnel. En Allemagne, on appelait ce nouveau type de carrosserie un « Caravan » ou un « Kombi, » abréviation de « Kombinationsfahrzeug » – véhicule associant les attributs de deux catégories. De nos jours, le marketing l’appellerait « un cross-over polyvalent ».
Le concept du break a séduit par la suite de nombreuses personnes et Opel s’est efforcé de réaliser une élégante version break aux côtés de chaque nouveau modèle Opel. La marque a produit environ 23.400 breaks en 1953 et 1954, soit plus de 10% des ventes de berline. En 1955, les breaks atteignaient environ 20% : 107.000 berlines et 24.000 breaks.
Encouragé par la hausse des ventes des breaks sur le segment des véhicules de taille moyenne, Opel a ajouté une variante break à sa première compacte d’après-guerre, la Kadett A 1962. Break abordable, la Kadett Caravan a fait ses débuts en mars 1963. Et les ventes de Caravan se sont envolées à des hauteurs telles qu’à cette époque, presque 50% de tous les breaks allemands étaient produits par Opel. Sur l’ensemble de la production de la Kadett A – qui s’est terminée en 1965 sur environ 500.000 unités – en Europe presqu’une sur quatre était un break (125.000 unités).
Avec de plus gros pneus que la berline (6.00-12 au lieu de 5.50-12) et une suspension renforcée, la Kadett Caravan pourrait transporter 430 kg, soit 100 kg de plus que la berline. Et si la berline avait la réputation d’être spacieuse, la Kadett Caravan l’était encore plus. Son coffre généreux surpassait la concurrence. Opel proposait également des options qui annonçaient les breaks modernes : la zone de chargement pouvait être équipée d’une banquette enfant dos à la route – en quelque sorte c’était un précurseur du Zafira.
En 1970, Opel donna naissance à un nouveau style de break, orienté délibérément vers des activités purement familiales et de loisirs. Il s’éloignait volontairement du monde du travail avec des accents plus sportifs et lifestyle.
Opel avait donné un premier signe de cette orientation au Salon Automobile de Genève 1968, avec son étude « Commodore Voyage » : ce grand « Kombi » disposait d’un habillage extérieur original en bois qui évoquait les woodies américains. Bien qu’il n’ait jamais été mis en production, il a ouvert une porte pour de nouvelles approches au centre de style Opel, le département du design de cette époque. Les designers travaillèrent sur plusieurs breaks élégants et raffinés vers la fin des années 60 et au début des années 70. Tous étaient surnommés « Voyage » pour souligner leur orientation loisirs et leur exécution nettement plus luxueuse. Le côté utilitaire était totalement abandonné, l’époque était à un nouveau type de break revendiquant l’espace et le luxe, disposant de surfaces vitrées généreuses pour une ambiance très ouverte.
Le concept est devenu réalité en 1970 sous forme de l’Ascona Voyage, reprenant le caractéristique panneautage latéral imitation bois. Le nom du modèle, Voyage, montrait clairement l’orientation future du break : sa carrière de fourgonnette était bien finie, et Opel était encore une fois à l’avant-garde.
Les faits ont montré qu’il avait raison : au début des années 70, seuls 20% des clients de breaks utilisaient leur véhicule exclusivement à des fins personnelles ; au début des années 90, ils étaient plus de 50%. La gamme Caravan qui, depuis l’Ascona Voyage, proposait toujours une version particulièrement luxueuse et sportive, permettait à tous d’avoir un véhicule polyvalent adapté à chaque goût et chaque budget.
Opel a continué à défricher le terrain, et a poussé le concept du break vers la voiture hautes performances, équipée d’un moteur puissant et dans la fourchette haute des prix. En 1989, Opel montait le moteur six-cylindres en ligne 3 litres de 204 ch dans l’Omega Caravan 24v, la transformant en break le plus rapide du monde. C’était une nouveauté signée Opel, qui a inspiré beaucoup de constructeurs depuis. En 1993, le concept a été appliqué au segment compact, avec l’Astra Caravan 16v ; son moteur 2,0 litres 16V de 150 ch en faisait le break le plus puissant de sa catégorie à cette époque. L’Omega et l’Astra avaient à leur actif d’autres records. En dehors de leurs performances d’exception, avec une vitesse de 240 km/h (Omega) et plus de 200 km/h (Astra), ils offraient les volumes les plus grands de leur catégorie.
Toujours dans cette direction, la nouvelle génération d’Astra OPC Caravan lancée en 2002 était animée par un moteur 2.0 16V Turbo de 147 kW/200 ch, le même qui équipait la plus sportive des Astra 3 portes. Elle atteignait 231 km/h et franchissait le 0 à 100 km/h en 7,8 secondes. L’Opel Insignia OPC Sports Tourer de 325 ch, lancé en 2009, a fait un énorme bond en avant sur le plan de la dynamique de comportement avec encore plus de puissance, un système châssis Flexride et la transmission intégrale Adaptive 4×4.
Le nouvel Astra Sports Tourer, présenté au Mondial de l’Automobile de Paris 2010, est l’évolution normale de l’espèce : c’est un break élégant, disposant d’une fonctionnalité de premier ordre et d’un ample volume de chargement. Comme le premier Caravan, il permet à son propriétaire d’avoir une seule voiture pour son usage privé et professionnel. Mais il dispose aussi de toute la sportivité et du luxe apparus pour la première fois sur les breaks Opel « Voyage » des années 70, mais sous une forme contemporaine.
Source : Opel