L'Etat devrait repréciser sa stratégie en matière de biocarburants estime la Cour des comptes dans un rapport publié lundi. Elle estime qu’à l’heure actuelle, son utilisation ne réduit les gaz à effet de serre de façon limitée, pèse sur la balance commerciale et bénéficie plus à l'agro-industrie qu'aux agriculteurs.
Les incitations au développement des biocarburants dit "avancés" (produits à partir de matière première non destinée à l'alimentation humaine) restent en outre "insuffisantes", selon la Cour.
La part des biocarburants à un niveau élevé en France
La France encourage depuis 2004 l'incorporation croissante de biocarburants dans les carburants fossiles, routiers en particulier. Le taux d'énergie renouvelable dans les transports a ainsi atteint 9,25% en 2019, un niveau "comparativement élevé" au sein de l'UE, relève certes la Cour des Comptes.
Bilan environnemental mitigé
Pour autant, ces biocarburants dits "conventionnels" (produits à partir de biomasse destinée à la consommation alimentaire, avec laquelle ils entrent en concurrence) affichent un bilan environnemental mitigé, note la Cour.
En 2020, ils ont entraîné une réduction de GES limitée à 4,5%, par rapport aux carburants uniquement fossiles, loin de l'objectif européen de 6%.
Des réductions fiscales appliquées de manière non rationnelle
Les réductions fiscales sont en outre "appliquées sans aucune rationalité à certains d'entre eux, et sans tenir compte des surcoûts de production imputables aux biocarburants incorporés", ajoute le rapport.
Solde commercial déficitaire
La Cour note également que ces productions conventionnelles plafonnent depuis une dizaine d'années. Elle souligne encore que le solde commercial, déficitaire depuis 2016, continue à se creuser (472 millions d'euros en 2019).
Au final, elle observe que les bénéfices sont « plus limités pour les agriculteurs que pour les agro-industriels".
L’Etat doit préciser sa stratégie
Pour la Cour, il est donc "nécessaire de préciser la stratégie poursuivie, en anticipant tant la baisse de consommation de biocarburants conventionnels -- qui résultera de l'interdiction des véhicules thermiques neufs -- que la hausse potentielle des besoins en biocarburants avancés", notamment dans l'aviation.
Mettre l’accent sur les nouveaux biocarburants
A ce jour, la production de ces nouveaux carburants à base de résidus lignocellulosiques, issus des principaux composants du bois, commence juste à se développer au niveau mondial. La France en est au stade de démonstrateurs, et les efforts de recherche sont en baisse.
Seuls les biocarburants produits à partir de résidus viniques, d'huiles usagées et de graisses animales font l'objet d'une production industrielle, mais ces matières premières sont une ressource limitée.
La France dispose en revanche de matières pouvant constituer des biocarburants et biojets de deuxième voire troisième générations (paille, résidus de bois, algues, etc.). Leur déploiement "nécessite cependant un effort de recherche et développement, ainsi que des investissements d'industrialisation substantiels, qui ont besoin de visibilité sur la trajectoire de transition", souligne le rapport.
Sources : AFP, Cour des Comptes