L'hydrogène pas si écolo : le Pdt du lobby UK démissionne
par Elisabeth Studer

L'hydrogène pas si écolo : le Pdt du lobby UK démissionne

Ambiance explosive due à l’hydrogène outre Manche. Le chef du lobby britannique de l'hydrogène vient de démissionner … à cause de ce qu’il dénomme lui-même la "coûteuse distraction " du Blue Hydrogen. Il estime en effet que cette solution alternative est loin d’avoir toutes les vertus qu’on voudrait bien lui donner.

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L’hydrogène considéré comme une « coûteuse distraction »

Le président de la « UK Hydrogen and Fuel Cell Association » (UKHFCA) a démissionné de ses fonctions, invoquant des désaccords sur la «distraction coûteuse» du soutien du gouvernement à l'hydrogène bleu.

Nouvelle stratégie nationale britannique pour l’hydrogène

Cette démission intervient alors que le gouvernement britannique vient de lancer cette semaine une nouvelle stratégie nationale pour l'hydrogène, cherchant à soutenir la production d'hydrogène vert - produit par électrolyse à l'aide d'énergie renouvelable - et d'hydrogène bleu, fabriqué à partir de combustibles fossiles.

Le soutien de l'UKHFCA à ce programme a poussé son président, Christopher Jackson, à démissionner de son poste, a-t-il lui-même indiqué dans un post sur LinkedIn cette semaine.

L’hydrogène vert : une mauvaise réponse pour la transition énergétique ?

"La transition énergétique ne peut pas être réalisée par une seule solution miracle, et l'hydrogène vert ne peut à lui seul résoudre tous les défis mondiaux", a déclaré en guise d’argumentaire.

"Mais s'il n'y a peut-être pas une seule " bonne "réponse, il y a des réponses qui sont fausses » a-t-il poursuivi.

Ajoutant qu’il avait pour « profonde conviction personnelle que l'une de ces mauvaises réponses est l'hydrogène bleu ».

Cela a au moins le mérite d’être clair.

"Je trahirais les générations futures en gardant le silence sur le fait que l'hydrogène bleu est au mieux une distraction coûteuse, et au pire un verrouillage pour faire perdurer le recours à des combustibles fossiles qui garantit que nous échouerons à atteindre nos objectifs de décarbonisation » a-t-il encore indiqué.

Hydrogène bleu / hydrogène vert : loin d’avoir le même poids écologique

La stratégie du gouvernement britannique pour le secteur a été critiquée par des groupes environnementaux pour avoir adopté une approche à deux voies, accordant un poids égal à l'hydrogène bleu et à « l'hydrogène vert », qui n'a pas d'impact négatif sur le climat car il utilise de l'électricité renouvelable pour diviser l'eau en hydrogène et oxygène.

En revanche, l'hydrogène bleu est fabriqué à partir de gaz naturel, qui doit être extrait des gisements de gaz puis purifié par l'élimination du dioxyde de carbone, qui doit être stocké sous terre. Le procédé ne parvient généralement pas à capturer 10 à 15 % de ses émissions de gaz à effet de serre, qui s'accumuleraient à mesure que la production augmenterait.

L’hydrogène bleu pour au final assurer un débouché aux énergies fossiles ?

L'hydrogène vert est susceptible de jouer un rôle important dans l'avenir zéro carbone de l'industrie du transport, qu'il soit brûlé tel quel, utilisé dans des piles à combustible ou utilisé pour produire de l'ammoniac vert ou du méthanol.

Mais certains ont exprimé des doutes quant au fait que suffisamment d'hydrogène vert sera produit à temps pour les besoins du fret maritime ou d'autres industries, prédisant que les entreprises de combustibles fossiles pourraient chercher à promouvoir l'hydrogène bleu comme alternative pour pouvoir poursuivre la commercialisation de leurs carburants.

« Le HFCA doit être un pont entre les différents intérêts, perspectives et entreprises. Ce qui nécessite que ses leaders soient neutres sur les plus grandes interrogations du secteur », plaide Christopher Jackson.

Vers un hydrogengate ?

Selon le patron sortant du lobby de l'hydrogène britannique, les compagnies pétrolières ont utilisé de fausses déclarations sur le coût de production de l'hydrogène à partir de combustibles fossiles, en vue d’accéder à des milliards de subventions.

Les deux types d'hydrogène sont beaucoup plus chers à produire que les carburants conventionnels, c'est pourquoi le gouvernement britannique a souhaité mettre en place un système d’aides financières. Il a lancé une consultation pour financer la différence entre le prix de vente acceptable par les acquéreurs et ce qu'il en coûte aux producteurs pour le fabriquer - similaire à un système déjà utilisé pour réduire les coûts de l'énergie éolienne offshore.

« On a dit au Trésor que l'hydrogène bleu est bon marché et éliminera des millions de tonnes d'émissions de carbone de l'économie, c'est tout ce qu'il faut entendre. Cela coche les cases qui les inquiètent », a déclaré Jackson.

Le Département du commerce, de l'énergie et de la stratégie industrielle cherche quant à lui à savoir si les subventions doivent être financées par la fiscalité générale ou par des surcharges sur les factures d'énergie des ménages.

Tout un vaste programme …

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Un discours qui a le mérite d’être clair. Et pour le moins courageux ! Christopher Jackson osant dire tout haut que les majors pétrolières ont tout intérêt à promouvoir l’hydrogène pour faire perdurer le recours aux énergies fossiles … Pointant du doigt l’immense influence des lobbies pétroliers dans la bataille.

N’épargnant personne, Jackson a déclaré que les sociétés énergétiques avaient plaidé en faveur de projets "grands et audacieux" d'hydrogène bleu de plusieurs milliards de livres, qui s'étaient avérés être un attrait pour les ministres qui "essayaient de trouver des moyens de montrer qu'ils faisaient vraiment quelque chose" pour soutenir le programme vert. Edifiant …

En ce qui concerne la France, en mai dernier, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) a estimé quant à lui dans une note que l’hydrogène ne constituait « pas la solution miracle » pour répondre à tous les défis de la transition énergétique. Plus encore, il le déconseille dans l’immédiat pour les véhicules individuels.

Certes, utilisé comme carburant, l’hydrogène n’émet que de l’eau. De là à le considérer comme la solution écologique miracle, certains ont déjà franchi le pas, présentant la solution comme une alternative aux polluants hydrocarbures mis sur le marché à l’heure actuelle.

Mais ce que semblent oublier – ou vouloir oublier – ses partisans, c’est que l’hydrogène est encore coûteux à produire mais surtout que sa production-là nécessite pour l’instant l’emploi de sources d’énergies fossiles et émettrices de gaz à effet de serre.

Alors que le rôle de l’OPECST est d’éclairer les parlementaires sur les conséquences des choix de politique publique à caractère scientifique et technologique, sa note souligne notamment le « faible rendement » énergétique de l’hydrogène, et sa distribution « délicate et coûteuse ».

Une étude menée récemment par des chercheurs de l'Université Cornell aux États-Unis a déclenché un nouveau débat sur l'hydrogène bleu, car elle a averti que de telles méthodes de production pourraient même être pires que la combustion de gaz naturel.

Sources : Ship and Bunker, AFP, OPECST, The Guardian, Financial Times

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Pour résumer

Ambiance explosive due à l’hydrogène outre Manche. Le chef du lobby britannique de l'hydrogène vient de démissionner … à cause de ce qu’il dénomme lui-même la "coûteuse distraction " du Blue Hydrogen. Il estime en effet que cette solution alternative est loin d’avoir toutes les vertus qu’on voudrait bien lui donner.

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