Volkswagen a été le premier à être mis en examen dans ce volet Français du dieselgate, le 6 mai 2021. Ont suivi Renault début juin, puis Peugeot et Citroën quelques jours après. Ces constructeurs ont été mis en examen pour "tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise entraînant un danger pour la santé de l'homme ou de l'animal".
Désormais, c'est donc Fiat-Chrysler (désormais Stellantis) qui rejoint les constructeurs pointés du doigt. Le constructeur italo-américain, qui appartient au groupe Stellantis, a en outre été placé sous le statut de témoin assisté pour "entrave" à l'enquête, a indiqué à l'AFP son avocat, Me Alexis Gublin.
Le contrôle judiciaire de la personne morale a été prononcé. En conséquence, FCA doit verser un cautionnement de 150 000 €, et présenter une garantie bancaire de 200 000 €. C'est largement moins par exemple que Renault qui a dû verser 20 millions d’euros de caution et fournir 60 millions d’euros de garantie bancaire.
Les constructeurs n'ont pas tous officiellement utilisé un dispositif de détection de phase de test (seul VW a avoué l'avoir fait), cependant, tous sont soupçonnés d'avoir mis en place, selon la DGCCRF, des "stratégie[s] globale[s] visant à fabriquer des moteurs frauduleux, puis à les commercialiser".
Des dispositifs qui se désactivaient après 22 minutes
Pour FCA, la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes indique que "le fonctionnement de certains organes de dépollution du moteur est modifié afin que les émissions de NOx soient en-dessous du seuil règlementaire". Les moteurs durant 22 minutes utilisaient pleinement les organes de dépollultion. Ceux-ci, selon le rapport d'enquête, se coupaient après. Les tests d'homologation de l'époque (NEDC) duraient 20 minutes. Cela permettait aux moteurs de recevoir l'homologation en bonne et due forme.
Du côté de FCA, Me Gublin souligne que "FCA Italie a désormais la possibilité de présenter une défense précise et exhaustive contre des soupçons qu'elle n'a pas eu jusqu'à présent la possibilité de contester dans le cadre d'une procédure contradictoire". C'est en effet une caractéristique du droit français de ne pas donner l'accès au dossier avant la mise en examen ou sous le statut de témoin assisté.
Stellantis, nouvelle maison-mère des constructeurs ex-FCA, a réagi : "L'entreprise est fermement convaincue que ses systèmes de contrôle des émissions ont satisfait à toutes les exigences applicables entre le 1er septembre 2014 et le 15 mars 2017, et continuent de le faire, et attend avec impatience l'occasion de le démontrer".
Quelle suite pour la procédure ?
Pour le moment, ces mises en examens ne présument en rien de l'avenir de ces procédures judiciaires. Cependant, les amendes pour tromperie peuvent atteindre "10 % du chiffre d’affaires moyen annuel du professionnel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits". Pour FCA, la DGCCRF évoquait près de 10 milliards d'euros.
Une éventuelle condamnation pourrait aussi ouvrir la voie à une indemnisation des propriétaires de véhicules se déclarant lésés par la baisse de la valeur de leur véhicule diesel après le scandale. Mais de ce côté rien n'est certain. Les parties civiles comme Ecologie sans frontière, Respire ou l'association de consommateurs CLCV espèrent désormais une instruction la plus courte possible pour qu'un procès se tiennent "rapidement". On est déjà 6 ans après l'éclatement du scandale du Dieselgate aux USA.
Certains acteurs du dossier estiment que les constructeurs pourraient être tentés d'éviter le procès grâce à la procédure dite de Convention judiciaire d'intérêt public (Cjip). Dans ce cadre, l'entreprise incriminée peut reconnaître tous ses torts, collaborer avec la justice, mettre en œuvre des mesures de remédiation, s'acquitter d'une amende, et indemniser les victimes. Point d'achoppement de cette hypothèse, la CJIP n'est possible que dans les affaires de corruption ou trafic d'influence. Ainsi, il faudrait faire évoluer le droit pour la rendre possible dans les affaires de tromperie. Certains constructeurs, sûrs de leur bon droit pourraient aussi tenter d'aller au procès, quitte à recevoir une mauvaise publicité.
Avec AFP/mk-gd-tsz/pga/rhl