Ferrari perd la propriété du design de la 250 GTO !
par Nicolas Anderbegani

Ferrari perd la propriété du design de la 250 GTO !

Décidément ce n'est pas la semaine de Ferrari. Dans une affaire qui rappelle étrangement le bras de fer qui avait opposé PGO à Porsche, Ferrari a été débouté face au carrossier Ares qui entend produire des répliques de la plus célèbre des Ferrari. Un retournement de situation, alors que la justice italienne avait donné raison à Ferrari en 2019.

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Souvenez-vous, en 2005, Porsche avait entamé des poursuites à l’encontre du petit constructeur français PGO, qui s'était lancé en 1995 dans la production de répliques de la 356 puis, à partir de l'an 2000, celle du Speedster II, un modèle qui avait de fortes ressemblances avec la même Porsche 356. Débouté dans un premier temps face à l'attaque en justice du constructeur allemand, PGO avait finalement eu gain de cause par la justice française, qui avait estimé que le constructeur gardois proposait un produit différent que l'on pouvait différencier des vraies Porsche. Le constructeur allemand avait aussi été débouté pour les répliques de la 356, étant donné qu'il ne possédait aucun brevet spécifique quant au dessin du modèle.

Une vieille connaissance

L'histoire se répète en quelque sorte pour Ferrari, même si le scénario est ici différent. Le cheval cabré a mené un bras de fer avec la société Ares design, une entreprise fondée en 2014 à Modène par un certain Dany Bahar. ça ne vous dit rien ? Brièvement passé en 2007 à Maranello en tant que "Senior Vice President Commercial and Brand", Bahar a surtout fait parler de lui pendant sa courte mais excentrique présidence de Lotus (2010-2012), où il défraya la chronique entre engagements sportifs tous azimuts foireux (Jean Alesi se souvient encore du moteur Lotus Judd à Indianapolis...), stratégie marketing bling-bling, plan produit abscons et siphonnage financier. Après un bras de fer juridique avec les investisseurs malais (qui possèdent Lotus) suite à son licenciement qu'il jugeait abusif, grâce auquel il récupéra une coquette somme, Bahar a fondé sa boite Ares design qui s'est spécialisée dans les "bodykits" à la Mansory et les réinterprétations de légendes roulantes, comme la Panther ProgettoUno qui, sur une base de Lamborghini Huracan, propose une réinterprétation de la De Tomaso Panthera.

Et Ferrari dans tout ça ? Et bien, en 2018, Ares commence à plancher sur une réinterprétation moderne de la Ferrari 250 GTO sur la base de Ferrari 812 Superfast. Dès la publication des premières images, Maranello réagit : pour Ferrari, hors de question de toucher à cette icône, à ce monument du panthéon mécanique, produit à seulement 39 exemplaires entre 1962 et 1964 et qui a fait exploser ces dernières années les records de ventes aux enchères. Dans un premier temps, le tribunal de Bologne donne gain de cause au Cheval cabré, s'appuyant sur la loi de protection des œuvres d'art. La 250 GTO étant assimilée à une œuvre d'art roulante faisant partie intégrante du patrimoine national, « La production, la commercialisation et la promotion du modèle appartiennent exclusivement à Ferrari ».

Commerce vs Art

Rebondissement cette année ! Saisi du dossier, L’EUIPO (Office de l’Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle) a été visiblement moins sensible au caractère artistique (sacré ?) de la 250 GTO, puisqu'il vient de donner raison à Arès, en vertu du principe «use it or lose it» (utilise-le ou perds-le), qui veut que la marque déposée ou le dessin déposé devienne caduque lorsqu’il n’y a pas d’utilisation concrète pendant au mois 5 ans à compter du dépôt de propriété. De fait, les droits sont perdus et tombent dans le domaine public. Ferrari avait redéposé le nom "250 GTO" en 2008 mais Ares a répliqué, estimant que Ferrari n'a pas utilisé concrètement les droits de la 250 GTO depuis 1967 et que la démarche de 2008 était surtout une manœuvre de "mauvaise foi, c'est-à-dire comme une marque défensive afin de bloquer la production et la vente de voitures de sport construites de manière similaire par des tiers".

L'argument de Ares dépend du fait que, contrairement à d'autres formes de protection de la propriété intellectuelle, dont la durée est limitée, les droits de marque peuvent durer indéfiniment à condition que la marque - qu'il s'agisse d'un mot ou d'un logo ou la conception 3D d'une voiture - soient systématiquement utilisés dans le commerce. Ares a réussi à démontrer le contraire... Ferrari a contre-argumenté, estimant que les 250 GTO produites dans les années 60 sont toujours existantes, très demandées sur le marché de la collection (donc exploitées commercialement) et sont devenues un symbole du style italien dans le monde. Argumentaire visiblement insuffisant pour convaincre l'EUIPO.

Ferrari perd donc les droits sur la "forme 3D" de la voiture mais conserve les droits pour produire des jouets et produits dérivés. Quelques jours avant le verdict de l'EUIPO, Ferrari a déposé le nom "Ferrari 250 GTO", ce qui devrait obliger les fabricants de répliques à trouver un autre nom de baptême...et bien sûr un autre logo ! Ironie de l'histoire, Ferrari a elle-même bénéficié il y a peu du "use it or loose it" dans le cadre d'une procédure judiciaire contre l’association caritative "Purosangue Foundation", afin d'obtenir l'exclusivité du nom "Purosangue" pour son futur SUV. Vous avez dit Karma ?

L'affaire n'est peut-être pas terminée, Ferrari ayant encore la possibilité de faire appel. Sacré Dany Bahar...

Source : clubalfa, thefashionlaw.com

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Pour résumer

Décidément ce n'est pas la semaine de Ferrari. Dans une affaire qui rappelle étrangement le bras de fer qui avait opposé PGO à Porsche, Ferrari a été débouté face au carrossier Ares qui entend produire des répliques de la plus célèbre des Ferrari. Un retournement de situation, alors que la justice italienne avait donné raison à Ferrari en 2019.

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