La filière auto souligne l'urgence d'un plan face aux risques de faillite
La pression du secteur automobile sur le gouvernement se fait chaque jour un peu plus forte. Malheureusement proportionnelle aux risque de faillite d'entreprises du secteur.
La pression du secteur automobile sur le gouvernement se fait chaque jour un peu plus forte. Malheureusement proportionnelle aux risque de faillite d'entreprises du secteur.
Les acteurs de la filière automobile – PFA (Plateforme de l'Automobile) et CNPA – exhortent ainsi le gouvernement à prendre des décisions “le plus rapidement possible” pour éviter des faillites.
Des propos tentant de faire réagir l'Etat alors qu'il n'envisage pas de mettre en place un plan de relance de l’économie avant la rentrée de septembre 2020.
Le comité stratégique de la filière automobile représentant les membres principaux de la PFA s’est de nouveau réuni le 30 avril dernier, sous la présidence de Luc Chatel et en présence de la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, Agnès Pannier-Runacher.
A l'issue de la réunion la PFA a publié un communiqué soulignant « l’urgence d’un plan de relance pour accélérer la sortie de crise », face « au risque préoccupant de défaillance d’entreprises ».
Il s’agissait de faire le point sur les impacts de la crise, sur les conditions du redémarrage de l’appareil industriel et des entreprises de service de la filière automobile dans son ensemble, et d’anticiper les mesures de relance pour la sortie de crise.
Dans ce contexte, la filière automobile a élaboré des propositions pour la relance de l’activité, structurées autour de trois grands axes.
Elle exhorte tout d'abord le gouvernement à stimuler le marché à travers un effet de relance ayant de l’impact sur l’ensemble des entreprises de la filière.
Ces mesures de relance de la demande devraient répondre à trois principes : se mettre en place rapidement, sur une durée limitée et avec une sortie progressive; avoir un spectre suffisamment large pour avoir un impact significatif sur le tissu d’entreprises de la filière ; être coordonnées et partagées le plus possible au niveau européen. Une telle mesure pourrait s’appuyer sur le dispositif existant de prime à la conversion (PAC), permettant ainsi de stimuler à court terme le marché, tout en accélérant la baisse des émissions de CO2 du parc de véhicules en circulation propose la PFA.
Deuxième grand axe des propositions élaborées par la PFA : faire de la transition écologique un levier de relance en soutenant le décollage du marché du véhicule électrique, par un soutien accru aux acheteurs de véhicules électrifiés et un plan d’investissement permettant d’accélérer le déploiement des infrastructures de recharge.
La PFA propose ainsi de réévaluer le niveau de bonus pour l’achat d’un véhicule électrique pour le marché des professionnels (qui représente plus de la moitié du marché), dont le montant avait été divisé par deux en 2020 (de 6000 à 3000 € depuis le 1er janvier 2020), et d’ouvrir un bonus à hauteur de 2000 € pour l’achat d’un véhicule hybride rechargeable.
3eme axe du plan proposé par la PFA : soutenir l'innovation et renforcer la compétitivité des sites industriels basés en France.
Il s’agit de répondre aux difficultés économiques et financières auxquelles les entreprises vont être confrontées, à travers un soutien à la R&D autour de grands programmes technologiques (batteries, électronique de puissance, véhicule connecté et automatisé, hydrogène), qui devrait s’accompagner d’aides à l’implantation de sites nouveaux ou à la reconversion de sites existants pour se doter en France des moyens de production nécessaires au fort développement des véhicules électrifiés, connectés et autonomes.
La Plateforme automobile souhaite également la mise en place de mesures de soutien aux investissements via, par exemple, des dispositifs de suramortissement, pour accélérer la robotisation et la digitalisation des sites de production.
« Nous devons tout faire pour éviter un ralentissement des efforts d’investissement et de R&D, parce que l’avenir de notre industrie en France est d’abord lié à sa capacité à continuer à innover sur les grands enjeux technologiques de l’automobile et des mobilités du XXIème siècle » a souligné Luc Chatel.
Après une chute de -72,2% en mars, le marché français a plongé de plus d’un tiers (- 34%), sur le premier trimestre 2020, indique la PFA pour souligner l'urgence de la situation.
Les chiffres publiés le 1er mai montrent que la vente de voitures neuves a reculé de 88% en France par rapport à 2019, les projections pour l’année 2020 tablant sur un repli de 30% des immatriculations précise pour sa part le CNPA.
En Europe, en mars (-55,1%, -25,6% sur les trois premiers mois), où l’Allemagne limite la chute (-37,7% en mars, -20,3% sur le trimestre), la France est, avec l’Italie ( -85,4% en mars), et l’Espagne (-69,3%), l’un des pays les plus durement frappé ajoute la Plateforme.
Elle indique par ailleurs que le démarrage de l’activité automobile s’effectue progressivement en Europe, l’Allemagne ayant relancé ses activités industrielles et commerciales le 20 avril dernier, de même que l’Espagne, progressivement, depuis le 28 avril, avant l’Italie qui, après la réouverture de quelques usines dès le 27 avril, a redémarré à partir du 4 mai.
En France, Renault, Toyota ou encore Renault Trucks ont commencé à redémarrer leurs usines il y a juste une semaine, et ce, de façon très progressive et dans des conditions sanitaires très strictes.
Les équipementiers et fournisseurs font de même, avec un taux d’activité global du secteur de l’ordre de 20%, et dans un contexte de grandes incertitudes sur les volumes à produire. « C’est désormais à la date du 11 mai, avec la reprise autorisée des activités commerciales, qu’est attendu un redémarrage de l’appareil industriel dans son ensemble » précise la PFA.
« En France, si les mesures d’urgence, déployées avec une très grande réactivité par les pouvoirs publics, ont pleinement joué leur rôle en combinant chômage partiel pour éviter des licenciements et prêts garantis par l’Etat pour soutenir la trésorerie des entreprises, il est urgent désormais d’accompagner la sortie de crise face au risque de défaillance d’entreprises » s'alarme la PFA.
« Avec un tissu industriel de PME déjà fortement fragilisées par les transformations historiques que traverse le secteur et l’amorce en 2019 d’un retournement de cycle, nous devons nous préparer, face à l’effondrement attendu du marché, à faire face au risque très préoccupant d’une vague de défaillances d’entreprises au cœur de nos territoires », a ainsi alerté Luc Chatel.
Le CNPA demande quant à lui au gouvernement d'élaborer un plan de sauvegarde des entreprises qui puisse être accepté à très court terme.
A l’occasion du Comité Stratégique de la Filière Automobile, qui s’est tenu le 30 avril, le CNPA a pris acte que les concessions automobiles ouvriront le 11 mai sur l’ensemble du territoire, mais a tiré la sonnette d’alarme sur la situation du secteur et demandé un plan de sauvegarde des entreprises qui puisse être acté à très court terme, d’ici l’été.
Il a par ailleurs insisté sur la fait que « les mesures actuelles mises en place par le Gouvernement ne seraient pas suffisantes pour passer le cap de l'été. »
« Tandis que des secteurs entiers accusent des baisses d'activité entre 70 et 100 %, l'exemple de la distribution automobile est significatif : chaque mois de confinement, les réseaux auront perdu l'équivalent d'une année de résultats, compte tenu du niveau des marges et des besoins considérables en capitaux » s'alarme le CNPA.
Selon lui, « cela signifie qu'avec un marché en baisse en 2020 de l'ordre de 30 %, les réseaux sont susceptibles, dans une très grande majorité des cas, d'être en perte pour cette année, et probablement à nouveau en 2021. »
Le CNPA estime par ailleurs que les prêts garantis par l'Etat « ne permettront qu’à neutraliser les pertes, au lieu d'investir, à assurer le financement des stocks portés dans les bilans des distributeurs, et à assumer d'éventuelles surproductions industrielles en cas d'atonie ou de chute prononcée du marché. »
A l'occasion du Comité Stratégique, la CNPA a demandé la mise en œuvre de 6 priorités pour permettre d’assurer la relance : une réouverture des entreprises sans compromis sur la sécurité sanitaire des salariés et des clients, la sécurisation civile et pénale du chef d'entreprise, la sauvegarde des entreprises à court terme, via une pérennisation des prêts garantis par l'Etat et des exonérations fiscales, la pérennisation du dispositif de l'activité partielle jusqu'à l'automne 2020, la stimulation de la demande pour déstocker et relancer le moteur, la mise en oeuvre d'une solidarité encore plus tangible au sein de la filière automobile.
« N’oublions pas qu’il est primordial de répondre aux attentes et besoins de l’ensemble des Français, et d’éviter les risques de retour à des contestations sociales telles que celles qui s’étaient exprimées lors du mouvement des Gilets jaunes – l’accès à la mobilité fut le point de départ de ces contestations, et constitue l’une des composantes primordiales du quotidien des Français » alerte le CNPA.
Jérôme Daumont, président du groupe Altaïr, estime pour sa part « contre-productif » pour les concessionnaires de promettre des mesures pour septembre. Selon lui, « c’est le meilleur moyen de pourrir » les ventes d’ici là. Il juge en effet plus que probable que ce type d'annonces du gouvernement incite les consommateurs différent leurs achats et attendent la rentrée pour acheter leurs véhicules, ayant « tout intérêt à attendre » pour bénéficier de la prime. « Pour nous, c’est la pire des situations” résume-t-il.
Sources : PFA, CNPA, Altaïr
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