Marques disparues, épisode 2 : Steyr-Puch
par Nicolas Anderbegani

Marques disparues, épisode 2 : Steyr-Puch

Notre saga des marques disparues nous mène aujourd'hui en Autriche, un grand pays de l'automobile s'il en est, autant par ses pilotes, ses ingénieurs que ses industries. Magna Steyr, sous-traitant bien connu du monde automobile, a vécu sa propre épopée en tant que constructeur à part entière, sous le blason Steyr puis Steyr-Puch.

Zapping Le Blogauto Essai de l'Abarth 500E

La ville de Steyr, situé en Haute-Autriche, et qui a donné son nom à la région de Styrie, est un centre métallurgique important depuis la fin du Moyen-Age. En 1864, Josef Werndl créé la Österreichische Waffenfabriksgesellschaft, une entreprise de fabrication d'armes qui se distingue par l'invention en 1886 du fameux fusil Mannlicher, dont la production atteint plusieurs millions d'exemplaires.  L'entreprise est florissante, se diversifie avec la production de vélos puis son activité bondit de manière spectaculaire à la faveur de la Première guerre mondiale, grâce aux commandes de l'armée austro-hongroise. Seulement, à la fin des hostilités, l'Autriche-Hongrie est non seulement éclatée mais se voit, comme l'Allemagne, fortement restreinte dans sa production d'armements par le traité de Saint-Germain en Laye.

Ledwinka et son héritage

Steyr a anticipé et, dès 1917, songé à se reconvertir dans la production d'automobiles pour pérenniser son activité. Ils font un recrutement de choix en la personne de Hans Ledwinka, un jeune ingénieur innovant en provenance du constructeur Nesselsdorf. Le futur concepteur emblématique de Tatra dessine la Waffenauto (automobile armée !) équipée d'un 6 cylindres 3.3 litres, commercialisée sous le nom de Steyr Typ II à partir de 1920. Plus de 2000 exemplaires sont produits jusqu'en 1924.

Ledwinka quitte Steyr pour Tatra en 1921, car le directoire de l'entreprise lui a refusé un projet de petite voiture économique. Néanmoins, l'ingénieur continue d’œuvrer pour Steyr en tant qu'ingénieur-conseil. Gràce à son expertise, Steyr poursuit dans le segment du luxe et du sport, en déclinant de nouveaux modèles toujours basés sur la Waffenauto d'origine. On retient notamment les belles Steyr Junior, Type VI Sport de 90 chevaux et 60 Klausen Sport (6 cylindres 4.9 litres de 145 chevaux) qui se taillent un très beau palmarès en courses de côte au milieu des années 20.

Un nouvel ingénieur en chef est intronisé : Anton Honsig. Steyr change de...fusil d'épaule à partir de 1925, en développant un modèle plus moderne, économique et simple, la Type XII propulsée par un 6 cylindres 1.5 litre de 30 chevaux, munie de freins à quatre roues et de roues arrière indépendantes. Un modèle qui permet à Steyr d'inaugurer sa chaîne de montage, signe d'une modernisation du processus de production.

L'éphémère Porsche

Nouveau changement de taille en 1929, avec l'arrivée d'un certain...Ferdinand Porsche ! Ironie de l'histoire, Porsche vient de quitter Daimler-Benz, qui ne l'a pas soutenu dans son projet de voiture populaire ! L'inverse de la situation vécue par Ledwinka quelques années auparavant. Porsche développe la Type XXX et surtout un modèle de prestige, l'Austria, présentée au salon de Paris 1929.

Une grande berline avec un V8 5.3 litres de 100 chevaux et un châssis moderne. Toutefois, Steyr souffre énormément de la Grande dépression. C'est le grand constructeur national, Austro-Daimler, qui renfloue la société, mais exige en contrepartie l'arrêt de l'Austria, qui aurait pu lui faire concurrence. Déçu par cette orientation, Porsche quitte Steyr en 1931 et s'en va fonder son bureau d'études...la suite, on la connaît !

De la fusion à la guerre

Pendant ce temps, le sauvetage devient une fusion pure et simple en 1934 avec Austro Daimler et Puch, un célèbre fabricant de motos, pour former le groupe Steyr-Daimler Puch AG. Dans cette seconde moitié des années 30, sous la direction technique de Karl Jenchske, Steyr modernise ses modèles avec de jolies berlines profilées, bien dans l'air du temps : la 100 4 cylindres ainsi que les 120 et 220 à 6 cylindres, déclinées en versions Super (120 Km/h pour la Super 220) et en cabriolets.

Châssis surbaissé, freins hydrauliques, suspensions indépendantes, ces voitures sont très bien conçues pour l'époque et rencontrent un véritable succès, notamment parmi les dignitaires du Reich...Parallèlement à cette gam

me, Steyr s'essaie également à la voiture populaire avec la Baby-Steyr, une petite voiture originale et profilée produite à plus de 13.000 exemplaires jusqu'en 1940, équipée d'un 4 cylindres de 984cc.

Avec l'Anschluss (annexion de l'Autriche par le Reich en 1938) puis la guerre, Steyr est intégré au complexe militaro-industriel nazi et abandonne les productions civiles, pour se focaliser sur les camions de transport militaires et même quelques blindés spécialement conçus pour les "routes" de l'URSS, à l'image du blindé chenillé Raupenschlepper Ost.

Renouveau avec l'Italie

A la fin des hostilités, après les bombardements et les compromissions (comme bien d'autres firmes du Reich, Steyr a eu recours à de la main d’œuvre déportée) vient le temps de la reconstruction. Dans un premier temps, Steyr relance son appareil de production avec les camions mais les démons de l'automobile reviennent vite. Il faut trouver un nouveau partenaire fiable: ce sera FIAT, qui accorde à Steyr-Puch des licences pour produire ses modèles. A cette époque où le marché commun et la libre circulation des biens ne sont pas encore de mise, et face à des tarifs d'importation prohibitifs, les accords de fabrication sous licence étaient une excellente parade pour permettre aux constructeurs de diffuser à l'étranger leurs modèles.

Ainsi, à partir de 1949, sont commercialisées sous la marque Steyr-FIAT les modèles 1100, 1400, Topolino, etc. En 1957, un accord est même conclu pour fabriquer la nouvelle 500 qui a tapé dans l’œil des dirigeants de Steyr. C'est ainsi que naît la Steyr-Puch 500, qui a cependant une particularité : Fiat fournit les carrosseries, mais à partir de 1959, les autrichiens y installent leur propre moteur, un bicylindre 4 temps à plat de type boxer et à refroidissement par air, plus élaboré et plus puissant que le moteur Fiat d'origine. Ce moteur plus compact permet de reculer le siège arrière et d'obtenir une homologation 4 places ! Pour l'anecdote, le moteur a été dessiné par Erich Ledwinka, le fils de Hans Ledwinka ! Le monde est petit...

60.000 Steyr-Puch seront produites jusqu'en 1973, avec des variantes sportives 650 TR (41 chevaux) très appréciées de la police, et que certains engageaient pour aller chatouiller de près les Abarth 1000 TC (encore un sorcier d'origine autrichienne) ! Parallèlement aux productions sous licence Fiat, Steyr-Puch n'oublie pas son immense savoir-faire acquis dans les camions et sort deux véhicules tout-terrains qui seront particulièrement appréciés pour leur robustesse et leur qualité de franchissement : le Haflinger et le Pinzgauer, soit le nom de deux races de chevaux tyroliens. Le Pinzgauer sera produit sous licence au Royaume-uni jusque dans les années 2010 !

Partenaire multi-marques de choix

La production des Steyr-Puch sous licence Fiat cessent à la fin des années 70, mais l'usine autrichienne, implantée à Graz, a trouvé rapidement un nouveau partenariat appelé à entrer dans la légende: après une version militaire de 1975, ce sont eux qui assemblent la version civile d'un tout-terrain, le Puch G (pour Geländewagen), mieux connu dans nos contrées sous le blason Mercedes !

A partir des années 80, Steyr ne commercialise plus de véhicules sous son blason mais multiplie les partenariats d'assemblage de modèles spécifiques : la version 4x4 de la Panda, une joint-venture avec Chrysler en 1992 pour assembler les versions 4x4 et diesel du Grand Voyager ou encore la Mercedes-Benz Classe E W210 4-Matic dans les années 90...

En 1990, le conglomérat Steyr est démantelé. La branche armement Steyr Mannlicher perdure, la branche moteurs diesels devient indépendante avec Steyr Motors. La branche tracteurs fait désormais partie de Fiat Industrial et Puch a été absorbé par Piaggio. Et la branche automobile ? En 1998, MAGNA International Inc, une société canadienne, achète Steyr-Daimler-Puch AG qui devient Magna Steyr en 2002. Sous ce nouveau nom, les contrats d'assemblage se multiplient : le premier BMW X3, la KTM X-Bow, l'Aston Martin Rapide (avant son rapatriement à Gaydon) et même le Peugeot RCZ sont autant de modèles qui sont sortis des usines autrichiennes. Aujourd'hui, l'aventure continue avec, entre autres, les Jaguar E-Pace, I-pace, BMW Z4 et Toyota Supra. Une histoire extrêmement riche donc !

Images : austrian cars, wikimedia commons, flickr, pinterest

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Pour résumer

Notre saga des marques disparues nous mène aujourd'hui en Autriche, un grand pays de l'automobile s'il en est, autant par ses pilotes, ses ingénieurs que ses industries. Magna Steyr, sous-traitant bien connu du monde automobile, a vécu sa propre épopée en tant que constructeur à part entière, sous le blason Steyr puis Steyr-Puch.

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