L'expérimentation de ces radars nouvelle génération, supposément moins faciles à dégrader, en Guadeloupe avait été annoncée en 2017 mais a tardé à se décliner. Depuis, le gouvernement a annoncé le déploiement définitif de 1.200 de ces nouveaux radars sur l'ensemble du territoire français, dont 100 sur les 1.000 kms de routes de Guadeloupe.
Objectif: faire baisser le nombre de tués sur les routes. "Nous sommes, début décembre, à 46 morts dans des accidents en 2019, indiquent les services de la préfecture de Guadeloupe. En 2018, ils étaient 33 à avoir péri en voiture".
"Parmi les tués sur la route, les personnes vulnérables (piétons, usagers des deux-roues) représentent 57% des tués", rappelle la préfecture. Le premier radar tourelle a été mis en service en septembre au Gosier et l'implantation se poursuit depuis.
Cette nouvelle génération viendra remplacer les 20 radars classiques existants sur les routes guadeloupéennes. "Cela fonctionnera sur un système de leurre: seulement 20 seront actifs et l'activité sera tournante", a expliqué en septembre le préfet de Guadeloupe Philippe Gustin.
Comme en métropole, où de nombreux radars tourelles ont été dégradés sitôt leur installation, plusieurs ont déjà été détériorés en Guadeloupe, à l'instar de ceux de Saint-François et Goyave tout récemment.
La contestation s'est aussi manifestée dans l'île par une pétition, qui a recueilli près de 17.000 signatures (pour une population de 394.000 habitants), en soulignant qu'il y avait d'autres priorités pour le territoire, confronté à "des problèmes de distribution d'eau potable, de santé publique, de terres empoisonnées au chlordécone, d'invasions récurrentes d'algues marines, de chômage endémique des jeunes".
"Nous souhaitons que ce projet de 100 radars soit annulé, explique Eric Coriolan, leader des protestations. Nous ne sommes évidemment pas contre la sécurité routière, mais installer un radar tous les 10 kilomètres, c'est trop."
"Vie privée"
Il demande une "véritable politique publique de sécurité routière" et la "remise en état des routes du pays, complètement défoncées". Ainsi que de véritables transports publics, parents pauvres des politiques publiques locales.
"Et puis, questionne-t-il, vous imaginez les problèmes de données personnelles et de protection de la vie privée que posent ces radars ?".
Les politiques sont aussi montés au créneau. Le sénateur socialiste Victorin Lurel a dénoncé "un acharnement". "Entre sécurité et liberté je donne la priorité à la liberté", a-t-il déclaré.
Max Mathiasin, député MoDem de la Guadeloupe a aussi réclamé un moratoire. Mais le Premier ministre Edouard Philippe, en visite en Guadeloupe fin octobre l'a assuré: "On le fait (en Guadeloupe, ndlr) parce qu'on sait qu'il y a un sujet ici et parce qu'on a beaucoup travaillé, y compris avec les élus du territoire".
Pourtant les élus locaux, présidente du Conseil départemental en tête, ont la sensation de n'avoir pas été consultés. "On peut évidemment considérer qu'un courrier adressé aux élus vaut concertation", a ironisé lors d'une réunion début décembre, Josette Borel-Lincertin (PS), à l'adresse du préfet de Guadeloupe.
Au cours de cette réunion, les élus ont obtenu quelques engagements: une meilleure information commune par commune sur l'implantation des radars, la mise à disposition de la cartographie des accidents sur le territoire, et surtout, le croisement des deux données pour vérifier la pertinence des implantations.
Les deux camps assurent que ce dernier point leur donnera raison.
Par AFP