La Commission européenne avait saisi la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) en mai 2018 après près d'une décennie de mises en garde. La France compte parmi les Etats membres, avec aussi l'Allemagne et le Royaume-Uni, contre lesquels Bruxelles avait décidé d'agir face à un problème persistant dans l'Union.
Selon le dernier rapport de l'Agence européenne de l'environnement sur la qualité de l'air publié mi-octobre, le dioxyde d'azote (NO2) est responsable de 68.000 décès prématurés par an dans l'UE, dont 7.500 en France.
Ce jugement ouvre la voie, dans un deuxième temps, à d'éventuelles sanctions, si rien n'est fait pour remédier à la situation.
"Le gouvernement est déterminé à améliorer rapidement et durablement la qualité de l'air, qui constitue un impératif de santé publique et environnemental", a assuré le ministère français de la Transition écologique et solidaire, dans un communiqué.
De son côté la Commission a affirmé qu'elle continuerait à travailler "en coopération rapprochée" avec la France "pour s'assurer qu'elle prenne les mesures nécessaires".
Cette pollution de l'air au NO2 concernait 24 zones et agglomérations en France, dont les villes de Paris, Lyon, Marseille, Nice ou encore Strasbourg, mais aussi la vallée alpine de l'Arve, axe de transit vers l'Italie souffrant d'embouteillages chroniques.
La France affirme pourtant qu'entre 2010 et 2018 "les émissions d'oxydes d'azote ont baissé de 54%" et que le nombre de zones concernées a été divisé par deux (11 en 2018).
Si la France ne conteste pas le dépassement, son argumentation portait sur la législation européenne sur la qualité de l'air, dont l'application dans chaque Etat membre "doit être appréciée au regard des difficultés structurelles rencontrées", explique la CJUE dans un communiqué.
Mais pour les juges "le fait de dépasser les valeurs limites pour le dioxyde d'azote dans l'air ambiant suffit en lui-même pour pouvoir constater un manquement".
20 pays ciblés
Par ailleurs, la législation prévoit qu'en cas de dépassement constaté, le pays mis en cause doit établir un plan relatif à la qualité de l'air, et s'assurer que la période de dépassement soit "la plus courte possible".
Or, la France a "manifestement" ignoré cela, la Cour ayant relevé un dépassement pendant "sept années consécutives".
Le gouvernement français met en avant une série de mesures déjà prises : accompagnement du renouvellement du parc automobile, développement du réseau de bornes électriques, soutien à la rénovation énergétique des logements notamment.
Il souligne également les effets attendus de la "loi d'orientation sur les mobilités" avec le déploiement de "zones à faibles émissions" (excluant les véhicules les plus polluants), un plan Vélo ou encore un contrôle renforcé du marché automobile.
La décision de justice vient sanctionner "une inaction tragique des gouvernements successifs", a réagi Karima Delli (Verts), présidente de la commission Transports du Parlement européen.
De son côté l'ONG ClientEarth a relevé que c'est la première fois que la CJUE constate qu'un Etat membre n'a "pas respecté les limites légales pour le NO2". La Cour avait déjà pris une décision similaire, mais en matière de particules fines.
"L'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni, qui ont tous été renvoyés devant la CJUE pour leur incapacité prolongée à s'attaquer à la pollution atmosphérique, devraient tous (en ) tenir compte. Nous pouvons nous attendre à des résultats similaires dans ces pays", a dit Ugo Taddei, un avocat de l'ONG.
Au total 20 pays de l'UE sont la cible d'une procédure d'infraction en matière de qualité de l'air (15 dossiers sur les particules fines, 14 sur le NO2 et 1 sur le dioxyde de soufre).
Au cours des cinq dernières années, la Commission a porté onze dossiers concernant neuf pays devant la CJUE.
Par AFP