Le point sur les
par Thibaut Emme

Le point sur les "Gilets Jaunes" à la veille du 17/11/2018

Il y a eu les bonnets rouges contre l'écotaxe (1). Y aura-t-il les gilets jaunes contre les taxes sur les carburants ? Réponse en partie demain 17 novembre 2018.

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Il y a eu les bonnets rouges contre l'écotaxe (1). Y aura-t-il les gilets jaunes contre les taxes sur les carburants ? Réponse en partie demain 17 novembre 2018.

Mais qui sont Gilles et John ?

Le mouvement dit des gilets jaunes s'est cristallisé principalement sur les réseaux sociaux, autour des dernières hausses de carburant. Mais, virtuel au début, il s'est plus ou moins concrétisé au fil du temps, et le "ras-le-bol" est finalement plus général que les carburants. Ces derniers restent néanmoins LE point de crispation. Ces "Gilles et John" (désolé...) c'est vous, c'est nous, c'est un peu tout le monde. Plutôt ruraux, ils doivent prendre leur voiture tous les jours faute de mieux pour aller bosser, des fois à 40 km de leur domicile.

La première manifestation de ce ras-le-bol fut l'apposition sur son tableau de bord du gilet de sécurité. Signe de protestation un peu vain et ridicule (un gilet dans une voiture n'oblige aucun dirigeant à vous écouter), il a été suivi rapidement par une date. Le 17 novembre 2018. Grand raout dans toute la France !

Un mouvement citoyen qui bloquerait la France, voilà qui nous replonge bien des années en arrière. Ce serait même presque inédit depuis la Révolution (2) puisque les grands mouvements sociaux - 1936, mai 1968, etc. - ont toujours été organisés par des partis ou des syndicats.

La tentation des récupérations politiques

Ici, le mouvement cherche à rester totalement apolitique. C'est bien beau de le dire. C'est plus dur de le faire. En effet, nombreux sont ceux qui, dans l'opposition politique au Président et au Gouvernement, se sont découverts tout à coup une âme de gilet jaune. On remarquera que bon nombre de ces soutiens politiques de la dernière heure sont bien au chaud en ville, voiture avec chauffeur et salaire confortable. Certains tiennent, à travers ce mouvement, leur revanche après n'avoir pas su mobiliser pour les Lois Travail ou autres.

Dès lors, les premières tensions sont apparues au sein des différents groupes partout en France. Certains ont même fait scission (pour le peu qu'ils étaient formalisés) pour créer deux groupes et ne pas mêler la politique, ou certains bords politiques, à leur manifestation qu'ils entendent garder "purement citoyenne".

D'autres la jouent plus finement. En effet, certaines femmes, ou hommes politiques feignent d'y aller en tant que citoyen. Tout en glissant à la presse l'endroit et l'heure où l'on pourra les trouver en tête de cortège pour 5 minutes et les photographes.

Une mobilisation friable ?

Au fur et à mesure que la date du 17 novembre approche, cela devient de plus en plus concret. Déjà, certains ont commencé à se poser des questions sur leur participation. En effet, pour beaucoup, ce sera la toute première manifestation. L'inconnue peut faire peur. Mais, d'autres au contraire sont galvanisés par l'échéance.

Les différentes annonces du Premier Ministre, Edouard Philippe, en faveur des plus modestes (doublement de la prime de conversion, chèque énergie relevé, possibilité de créer une participation des entreprises aux frais de déplacements en voiture des salariés, etc.) n'ont pas forcément calmé la "foule".

Comme visiblement la "carotte" ne suffisait pas, le PM et le Ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, ont également rappelé que manifester est un droit. Mais, que l'entrave à la circulation était punie par la loi. Et de brandir la menace de suspensions de permis, d'amendes, de gardes à vue, etc.

La menace du bâton

Devant ce bombement du torse des gouvernants, une partie de ceux qui pensaient aller manifester "la fleur au fusil" commencent à se demander si cela vaut le coup de se retrouver face aux forces de l'ordre. Surtout que, rappelons-le, pour beaucoup ce sera une première et que bon nombre de ces mouvements ne sont pas structurés ni suffisamment encadrés. Le risque de débordement individuel est fort.

C'est d'ailleurs la crainte de certains commerçants pour qui le samedi est une part très importante du chiffre d'affaire. Dans les galeries ou centres commerciaux, le premier jour du weekend représente de 40 à 50% du CA de la semaine. D'autant plus vrai à 1 mois 1/2 de Noël avec les achats de fin d'année qui commencent. Certains redoutent que la manifestation ne dure les weekends suivant, se rapprochant d'autant plus des fêtes de fin d'année.

Un mouvement citoyen qui pénalise d'autres citoyens qui ne sont pour rien dans les hausses de taxe, voilà de quoi trouver cela ubuesque. C'est Amazon, Fnac.com, EBay ou autres vendeurs sur internet qui se frottent déjà les mains du désordre à venir dans les centres commerciaux.

D'autres craignent la casse. La aussi, le côté amateur des manifestants, sans service d'ordre ni encadrement, laisse penser que des casseurs ou des groupes anti-capitalistes d'extrême-gauche vont se mêler aux groupes pour mieux s'attaquer aux magasins, stations-services, etc. D'ailleurs, certaines d'entre-elles ont pris les devants et seront purement et simplement fermées demain 17 novembre 2018 pour éviter autant que faire se peut les débordements.

Et concrètement cela donnera quoi ?

Actuellement, selon différents décomptes, 1 500 groupes se revendiquent publiquement de la manifestation nationale du 17 novembre. Mais, à date, une centaine à peine aurait fait une déclaration en préfecture, préalable indispensable à toute manifestation en bonne et due forme. Certains organisateurs ont également vu des groupes se vider littéralement au moment où il a fallu concrètement organiser les choses.

Alors qu'attendre de la journée de demain ? Difficile à prévoir. Déjà cette semaine, il y a eu des opérations escargots, soit par des professions, soit par des gilets jaunes en avant-goût du 17/11. Par exemple, hier sur l'A77 vers Cosne-sur-Loire, dans la Nièvre, un bouchon de 2 km s'est formé suite à une opération escargot durant 1h30.

Ce que craignent les autorités, c'est que les manifestations, non encadrées, dégénèrent entre ceux qui vont vouloir immanquablement bloquer les grands axes, et ceux qui doivent aller travailler, ceux qui veulent circuler librement, ceux qui sont contre le mouvement du 17. Un "contre-mouvement" favorable à la majorité présidentielle s'est d'ailleurs lancé sur les réseaux sociaux lui aussi sous le mot d'ordre "sans moi le 17".

D'autres associations montent au créneau. Une association de cyclistes de Saint-Brieuc (Bretagne) organise une manifestation pour faire changer les mentalités "Essence trop chère ? Changez de pompe !". Clément Janot, un des responsables de Vélo-Utile : "Les vrais gilets jaunes, c’est pas eux, c’est nous ! Le gilet jaune, on ne le met pas juste une semaine par an pour dire qu’on n’est pas content". Quand deux exaspérations se rencontrent, il en ressort rarement du bon.

Illustration : Sécurité routière

(1) les bonnets rouges n'étaient pas un mouvement "du peuple" puisqu'il s'agissait de patrons d'entreprise de transport, mâtinés de politique avec en chef de file le maire de Carhaix-Plouguer, Christian Troadec qui est aussi conseiller général, conseiller général.

(2) même si la Révolution a été instrumentalisée par la bourgeoisie contre la noblesse.

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Pour résumer

Il y a eu les bonnets rouges contre l'écotaxe (1). Y aura-t-il les gilets jaunes contre les taxes sur les carburants ? Réponse en partie demain 17 novembre 2018.

Thibaut Emme
Rédacteur
Thibaut Emme

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