Bilan F1 2018 : les top teams, sur une autre planète
par Nicolas Anderbegani

Bilan F1 2018 : les top teams, sur une autre planète

Les 3 grosses écuries ont encore plus dominé la saison que par le passé, ne lâchant qu'une seule place de podium sur les 21 courses. Les difficultés de Liberty Média pour réformer le fonctionnement de la F1 se heurtent évidemment à la puissance des constructeurs historiques et des grosses écuries qui défendent bec et ongles leurs prébendes. Notez que les notes attribuées n'engagent que l'auteur !

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MERCEDES : 5 à la suite, série en cours ?

Le triomphe final de Mercedes n’était pas acquis à la lumière du début de saison : jusqu’à Spa, la « dream team » germanique était fébrile et doutait, commettant des erreurs tactiques. L’étoile était perturbée par les errements d’une monoplace difficile à cerner, mangeuse de pneus et à la fiabilité incertaine (double abandon en Autriche). Les succès de Barcelone et du Castellet -attribués pour certains à des nouveaux pneus Pirelli plus avantageux- étaient contrebalancés par des purges comme en Autriche et au Canada. En Belgique, les images de la flèche d’argent d’Hamilton avalée dans Kemmel par Vettel semblaient porter un coup de massue à l’écurie. Puis, quand Ferrari et Vettel commencèrent à s’emmêler les pinceaux, la machine à gagner se remit en marche. Soudée comme un roc, dans le succès comme dans les mauvaises passes, l’équipe a réussi à corriger le tir. Hamilton maîtrisa à la perfection sa monture et Mercedes gagna encore la course au développement, ponctuée cependant par la polémique des jantes perforées. Avec 5 titres consécutifs, l’étoile se rapproche de la série de Ferrari au début des années 2000.

Lewis Hamilton (Champion, 408 points) 20/20

Le britannique pourra-t-il produire une saison encore meilleure que celle-ci ? Perturbé en début de championnat par le comportement de la W09, Hamilton a prouvé – si nécessaire- qu’il était de la race des plus grands, sachant exploiter les moindres faux pas de ses adversaires, être opportuniste quand il le fallait, tout en bénéficiant d’un coup de pouce chanceux par moment, comme en Allemagne. Les années de rivalité extrême avec Rosberg sont loin, car Bottas a déposé les armes très vite et a joué l'équipier modèle quand il le fallait. Toujours très fort en qualifications, plus solide que par le passé sur les départs, Hamilton a géré ses courses à la perfection, tout en maîtrise. Il a su sortir les gros tours quand il le fallait et réalisé quelques bravoures qui firent la différence. On se souviendra de sa remontée fantastique en Angleterre et de son audace à Monza contre Vettel. Jamais pris en faute, l’anglais a réussi à surmonter les caprices d’une monoplace mystérieuse en début de saison, pour faire corps avec elle et devenir l’égal de Fangio. Hyper soutenu par son équipe, Hamilton a atteint une sorte de plénitude, capable de plaisanter avec Will Smith quelques minutes avant le départ d’une course et d’être super performant. Plus il s’éclate, plus il est redoutable. Les records à battre peuvent trembler, car l'ogre n'est pas rassasié !

Valtteri Bottas (5ème, 247 points) 10/20

L’annus horribilis pour le finlandais. Après une saison 2017 encourageante marquée par 3 victoires, Bottas a été écrasé par Hamilton en 2018, terminant à… 161 points de son chef de file ! L’entame de la saison fut pourtant à l’avenant, puisque Bottas semblait au niveau de l’anglais, et même plus véloce sur certaines courses. Une certaine malchance lui a fait perdre la course de Bakou et l’a relégué au championnat, puis il n’a été que l’ombre de lui-même. Mercedes s’est chargée de l’achever avec la consigne de course en Russie, qui a entériné sa « Barrichellisation ». Souvent fébrile ou trop « gentil » dans les duels, moins bon gestionnaire en course, Bottas a manqué de punch, de vista et a multiplié les courses ternes, visiblement atteint psychologiquement. Un bilan bien inquiétant qui le met en ballotage défavorable l’année prochaine, car la place est convoitée !

FERRARI : les années se suivent et se ressemblent

Avec des « si », on refait le monde, c’est bien connu. Mais 2018 laissera des traces dans les mémoires. Ferrari a eu la meilleure voiture, au moins jusqu’à Monza, puis la situation a périclité. Si Vettel a évidemment sa part de responsabilité dans cet échec, la Scuderia n’est pas exempte non plus. Elle s'est souvent fourvoyée dans ses stratégies, aussi bien en qualifications (Hongrie, Belgique, Monza) que pendant la course. La gestion du duo Vettel-Raikkonen n’a pas été optimale, surtout au moment où Mercedes a clairement vassalisé Bottas par rapport à Hamilton. Une fois encore aussi, la course au développement n’a pas été gagnée et les améliorations introduites dans le dernier tiers de la saison se sont révélées infructueuses. On retiendra aussi l’affaire des capteurs et la soudaine baisse de performance du moteur, qui a laissé planer des suspicions. Enfin, en quoi le décès de Sergio Marchionne a-t-il pu affecter la machine à gagner ? Difficile à déterminer. Bref, Ferrari rumine un échec supplémentaire et doit bien se rendre à l’évidence : battre Mercedes nécessite un sans-faute.

Vettel (2nd, 320 points) 14/20

Qu'est-il arrivé au Vettel qui fanfaronnait en Angleterre et pulvérisait Hamilton à Spa ? L'Allemand a, pour beaucoup, perdu un titre qui lui tendait les bras. Deux tournants ont fait basculer sa saison : d’abord, sa sortie de piste à Hockenheim, alors qu’il avait course gagnée, offrant sur un plateau la victoire à Hamilton. Non seulement le coup au moral fut rude -surtout que Vettel n’a jamais vraiment remplacé Schumacher dans le cœur des Allemands - mais le différentiel de 32 points l’aurait, en cas inverse, moins contraint à sur-attaquer ensuite. Et puis il y eut le fiasco de Monza, avec le raté tactique des qualifs qui donna la pole à Raikkonen, d’où découla un départ terrible où les Ferrari se gênèrent, avant que Vettel ne percute un Hamilton diablement malin. La spirale infernale était en marche, la messe était dite : pointé du doigt, y compris en interne, laminé par la presse – surtout transalpine – Vettel a surpiloté pour rattraper le temps perdu. Les incidents et saltos se sont enchaînés tel un chemin de croix (contact et tête à queue avec Verstappen au Japon et Ricciardo aux USA). L’Allemand a montré sa fragilité psychologique, son impulsivité a rejailli. En 2019, Vettel devra afficher un mental d’acier, afin d’éviter le syndrome Prost-Alonso chez Ferrari.

Raikkonen (3ème, 251 points) 16/20

Iceman a sans nul doute accompli sa meilleure saison, depuis son retour en 2014 chez Ferrari. Pas toujours flamboyant mais régulier et solide en course (12 podiums), Kimi a mis du temps à se réveiller mais la SF71H correspondait mieux à son style de pilotage très coulé. Son succès aux États-Unis a ravi la plupart des observateurs et des amateurs de F1. Sans doute piqué au vif par son remplacement en 2019 au profit de Leclerc, Raikkonen a aussi défendu son honneur, refusant d’être un vulgaire n°2 totalement éclipsé par son leader. Quand Vettel devint fébrile, Iceman a montré les crocs comme on ne l’avait pas vu depuis longtemps, à Monza notamment où l’on avait l’impression de revoir le Kimi flamboyant des belles années McLaren. En quittant Ferrari pour Sauber – une des surprises de l’année - il devient le « sage » qui épaulera une écurie en pleine renaissance. Il demeure aussi le dernier pilote couronné avec Ferrari, il y a 11 ans. Une éternité !

RED BULL : une page se tourne

Qui de Red Bull ou de Renault est le plus soulagé de la fin de leur partenariat ? Red Bull a fourni cette année encore une monoplace au châssis redoutable, surtout en course où l’équipe a démontré son savoir-faire dans la gestion des pneumatiques et des stratégies. Sur les circuits où la puissance moteur n’était pas cruciale, les monoplaces autrichiennes ont souvent eu un meilleur rythme que leurs rivales. En dépit des progrès du V6 Renault, manifestes sur la fin de la saison, Red Bull n’aura pas ménagé son motoriste. La guerre des mots a fait rage en permanence depuis 2014 et le trio Horner-Marko-Verstappen ne s’est pas privé pour bombarder le losange de remarques acerbes, parfois à raison, parfois à tort et mâtinées d’une mauvaise foi agaçante dont le team est coutumier. La collaboration Red Bull-Renault, quoique dégradée par l’ère hybride, demeure une des plus fructueuses de l’histoire. Que donnera le futur de Red Bull avec Honda et avec le retrait progressif du génial Adrian Newey ?

Verstappen (4ème, 249 points) 17/20

Nul ne peut encore douter du talent naturel de Max, dont la rapidité, la hargne et la suffisance ne sont pas sans rappeler, par certains côtés, l’outrecuidance et la vista de Senna ou Schumacher. Son côté arrogant agace, mais la F1 a besoin de ces caractères bien trempés à l’heure où tout semble si aseptisé. Encore fougueux – son premier tiers erratique de la saison l’a prouvé – Verstappen n’est pas du genre à se remettre en question, surtout avec un chaperon nommé Christian Horner. Sa propension à diaboliser le moteur Renault et à s’en plaindre du matin au soir est devenue exaspérante. Son effronterie est néanmoins la marque des grands, car s’imposer en F1 n’est pas qu’une affaire de coup de volant, mais aussi de psychologie. Aux critiques, le fils de Jos a répondu en piste : bagarreur né, dur à dépasser (Hamilton s’en souvient), audacieux dans l’attaque, il a animé le peloton et assuré le spectacle, sur et en dehors de la piste (n’est-ce pas Esteban ?). Sa fin de saison a été éblouissante. Quand il aura réuni tous les ingrédients, il sera redoutable. Gasly est prévenu !

Ricciardo (6e, 170 points) 15,5/20

Avec deux superbes victoires en Chine et à Monaco, mais aucun autre podium (7 fois 4ème !), l’australien a connu une bien étrange saison. Le chat noir de Jean Alesi s’était visiblement fiché dans les entrailles de sa Red Bull, frappée par une série d’avaries mécaniques assez rare de nos jours ! A tel point que son imparable sourire s'est fait plus rare, le moral dans les chaussettes. Roi des dépassements audacieux « à l’ancienne », Ricciardo peut être fier d’avoir tenu la dragée haute à Verstappen, dans un duel qui fut souvent musclé (comme à Bakou !) mais jamais vicieux. Le néerlandais lui inflige un sévère 15-6 aux essais et l'a dépassé en vitesse pure, mais Daniel a compensé par sa combativité et son intelligence de course. Il peut se féliciter d’un bilan flatteur avec l’écurie qui l’a propulsé sur le devant de la scène. En passant chez Renault, l’australien peut devenir un vrai leader et bâtir une équipe autour de lui, ce qui n’était plus possible au sein de Red Bull avec son encombrant équipier.

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Les 3 grosses écuries ont encore plus dominé la saison que par le passé, ne lâchant qu'une seule place de podium sur les 21 courses. Les difficultés de Liberty Média pour réformer le fonctionnement de la F1 se heurtent évidemment à la puissance des constructeurs historiques et des grosses écuries qui défendent bec et ongles leurs prébendes. Notez que les notes attribuées n'engagent que l'auteur !

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