Inquiète quant à l'avenir du constructeur, l'agence de notation Moody's a dégradé les notes de Tesla le 27 mars dernier.
La société dirigée par Elon Musk doit en effet faire face à des difficultés de production. Certes, elle a pu annoncer quelques chiffres rassurants il y a quelques jours …. mais c'est histoire de donner quelques os à ronger aux investisseurs … avant qu'ils n'aiguisent leurs dents.
Le Wall Street Journal affirmait même il y a peu que Tesla pourrait arriver à court de liquidités. Le constructeur pourrait même se voir contraint d'effectuer un geste on ne peut plus symbolique : hypothéquer la "Gigafactory", sa gigantesque usine de batteries électriques. A moins qu'au delà du symbole, il ne s'agisse d'une porte d'ores et déjà ouverte aux établissements financiers au sein des textes contractuels régissant le fonctionnement de ses obligations.
Moody's revoit les notes de Tesla à la baisse
Coup dur pour Tesla le 27 mars dernier, alors que son titre dégringolait - les marchés réagissant à la nouvelle d'un accident survenu avec l'un de ses véhicules et ayant causé la mort de son conducteur - l’agence de notation Moody’s a revu à la baisse ses notes sur le constructeur et sur sa dette. Saupoudrant le tout de perspectives négatives. Ce qui signifie que son évaluation pourrait encore se dégrader. Moody's avait alors pointé du doigt des problèmes de production et le risque d’un manque de liquidités.
La baisse de valeur est particulièrement préoccupante, Tesla « flambant » encore des milliards de dollars de cash par an, ce qui la rend fortement tributaire de l'accès aux marchés financiers. Plus le prix de ses « bonds » baissera, plus le constructeur rencontrera des difficultés à trouver des investisseurs prêts à le soutenir. L'objectif final étant d'obtenir des fonds supplémentaires pour couvrir cette perte de trésorerie, et ce, à des taux raisonnables.
Une dette de 10 milliards de dollars
Selon le Wall Street Journal, Tesla aurait accumulé une dette de 10 milliards de dollars. Or, la situation ne devrait pas s'arranger à court terme, bien au contraire. En effet, le constructeur va être prochainement confronté aux règlements de deux échéances de remboursement de sa dette, d'un montant global pour le moins conséquent. Une échéance de 230 millions de dollars en novembre prochain … et une deuxième de 920 millions de dollars !!! en mars 2019.
Cerise sur le gâteau …. déjà bien indigeste : cette dette pourrait s'accroître dans le cas où Tesla déciderait de refinancer des obligations en vue d'obtenir des liquidités. Lesquelles s'avèrent indispensables pour pouvoir suivre le rythme effréné des dépenses de l'entreprise. Rappelons qu'en 2017, l’entreprise a déboursé 3,4 milliards de dollars.
Hypothèque de la Gigafactory ?
Face à une telle situation, le Wall Street Journal indique ainsi que Tesla pourrait devoir hypothéquer sa fameuse “Gigafactory”, la plus grande usine de batteries électriques au monde. Solution certes inattendue … mais qui n'a malheureusement rien à voir avec un poisson d'avril … n'en déplaise à Elon Musk. Ce dernier profitant de l'occasion pour se gausser des rumeurs de faillite de l'entreprise.
L'éventualité d'une hypothèque se base sur des fondements bien précis. Tout d'abord, la valeur intrinsèque de la Gigafactory, l'un des atouts les plus précieux de Tesla, usine géante située au Nevada.
Mais un autre élément revêt une importance capitale. Un terme inhabituel dans le contrat de « bonds » de Tesla stipule que ce site n'est pas soumis aux mêmes restrictions que le reste des biens de Tesla. Pas fous les banquiers …
Selon Covenant Review, un cabinet d'études qui analyse les documents obligataires, cela signifie que la Gigafactory "peut être librement gagée en vue de garantir la dette".
En d'autres termes, si Tesla s'avère pris dans la tourmente, les détenteurs d'obligations pourraient exiger de l'entreprise qu'elle hypothèque son usine de batteries en vue d'obtenir des financements.
Pour les fonds spéculatifs qui tirent de l'argent des prêts aux entreprises en difficulté, cela ne devrait véritablement poser aucun problème.
Décalage gigantesque entre réservations et livraisons
L’agence de notation s'inquiète tout particulièrement des gigantesques retards de production du constructeur. Le décalage entre réservations et livraisons est si énorme que le terme retard n'est même plus approprié pour qualifier la situation. Il s'agit bel et bien d'un problème de production et de dysfonctionnements dans le processus de fabrication. Ce qui est encore plus grave …
En cherchant à automatiser toutes les étapes de la production, l’entreprise doit faire à de sérieux problèmes. L’assemblage via robots, plus complexe n'est pas fait pour simplifier les choses.
Certes, près de 35 000 véhicules sont sortis des chaînes de production de Tesla sur les trois premiers mois de l’année. Soit près de 10 000 de plus qu’au dernier trimestre 2017. Si on ne peut nier une montée en puissance certaine … la firme n’a pas atteint son objectif de production concernant la Model 3, fixé à 2 500 unités par semaine.
L’entreprise souligne toutefois avoir déjà réussi à doubler la production de ce modèle, grâce à l’amélioration des outils de production et l’affectation de nouvelles ressources. Elle affirme également progressé sur la qualité de fabrication de la Model 3.
Reste que selon le Wall Street Journal, 500 000 véhicules Model 3 auraient été commandés depuis 2016. Or, selon Bloomberg, seuls 11 418 véhicules sont effectivement sortis des chaînes de production … Delà à dire que les sommes versées pour les réservations permettent de faire survivre une entreprise asphyxiée par les dettes et les fantasmes de son créateur ….
Sources : Financial Times, WSJ