Car on parle bien ici des Diesel aux normes Euro 5 et Euro 6, les plus récents. Transport & Environment définit le concept de voiture polluant énormément (grossly polluting) ou sale (dirty) comme ayant des émissions de NOx trois fois ou plus supérieures à la limite légale sur le test RDE, et deux fois ou plus supérieures à la norme NEDC lors des tests routiers. Pour les modèles antérieurs à 2009, c'est-à-dire Euro 4 et précédents, le manque de données ne permet pas de tirer de conclusions, même si on se doute que ça ne sent pas la violette. Transport & Environment souligne que dans la pratique les émissions de NOx dans l'air européen n'ont pas diminué malgré l'introduction des normes plus contraignantes depuis 2009.
La faute aux constructeurs, qui ont cherché (et trouvé) des moyens de contournement des tests d'homologation. Volkswagen a été pris la main dans le sac par les autorités américaines avec son logiciel, parfaitement illégal, destiné expressément à détecter que le véhicule est testé et à ne dépolluer que durant cet exercice. Un certain nombre d'autres constructeurs ont préféré utiliser un moyen qui n'est pas illégal mais qui apparaît de plus en plus comme une faille dans la réglementation, en limitant le fonctionnement des systèmes de dépollution à un ensemble étroit de conditions, en particulier la température extérieure, irréalistes. C'est flagrant dans le cas d'Opel et Renault alors que Fiat ou Ford utilisent d'autres critères tout aussi discutables, comme on l'avait vu lors des études commandées par les différents gouvernements européens. Transport & Environment préconise de vérifier si les constructeurs concernés avaient bien fourni les informations correctes sur ces conditions de fonctionnement au moment de la demande d'homologation, et d'appliquer des pénalités et des rappels si ce n'était pas le cas.
Dans ce cadre, les résultats se répartissent comme suit :
Catégorie | Nombre de véhicules Diesel « sales » | Nombre de véhicules Diesel total | Part des Diesel « sales » |
Euro 5 | Euro 6 | Euro 5 | Euro 6 | Euro 5 | Euro 6 |
Voitures particulières | 21,4 | 4,7 | 26,2 | 7,1 | 82% | 66% |
Utilitaires légers | 2,2 | 0,7 | 3,5 | 1,4 | 62% | 53% |
Total | 23,6 | 5,4 | 29,7 | 8,5 | 79% | 64% |
Par pays, mauvaise nouvelle, c'est la France qui compte en son sein le plus grand nombre de ces voitures "sales" avec 5,5 millions devant l'Allemagne et la Grande-Bretagne. Cela reflète assez logiquement la taille des marchés et le penchant national pour le Diesel de chacun des pays.
La répartition par constructeur de ces véhicules "sales", là encore, suit globalement les parts de marché respectives de chacun des constructeurs concernés en Europe, avec en facteur correctif la part de Diesel dans les ventes de chacun des constructeurs.
Transport & Environment a également compilé les résultats des tests en condition réelles pour chacun des constructeurs. Le tableau suivant donne les résultats pour les moteurs en norme Euro6. Pour l'Euro 5, le top 5 des constructeurs avec les plus grosses émissions est le suivant : Renault/Dacia, Land Rover, Hyundai, GM (Opel/Vauxhall/Chevrolet), Nissan.
Note : les Suzuki Diesel vendues en Europe sont équipées de mécaniques Fiat, d'où l'apparition du japonais aux côtés du constructeur italien.
Le Diesel "propre", ou tout au moins respectueux des normes, est-il une chimère ? Non, puisque l'ONG cite un palmarès de modèles qui respectent effectivement les normes, afin de souligner que la technologie est disponible. On y retrouve en particulier BMW, PSA, et Mazda, comme c'était le cas avec le rapport de la commission Royal.
- BMW 3 Series VI (318d), X5 III xDrive30d, X1 II xDrive20d, 2 Series (218d & 220d), 1 Series II (118d)
- Peugeot 208 1.6 BlueHDi, 308 II 2.0 BlueHDi;
- Citroën C4 Cactus 1.6 BlueHDi, DS5 1.6 BlueHDi
- Ford Fiesta VI 1.5 TDCi, Ecosport 1.5 TDCi
- Mercedes-Benz C Class IV (C200d)
- Mazda 2 IV 1.5d, CX-3 1.5d, CX-5 2.2d
- Audi Q7 II 3.0 TDI
- Volkswagen Golf Sportsvan (2.0 TDI)
Comment en est-on arrivé là, à un tel niveau de mépris des normes existantes, et y a-t-il des solutions ? A l'heure qu'il est, un an après la révélation, par les autorités américaines rappelons une nouvelle fois, aucune réelle sanction n'a encore été prise de ce côté de l'Atlantique contre Volkswagen, et aucune action effective contre les dépassements des autres constructeurs constatés par de nombreuses études, y compris celles commanditées par les gouvernements, n'a été entreprise. Le service minimum du Ministère de l'Environnement, suite aux révélations apportées par le rapport Royal, enterré sous le sable des plages aoûtiennes, est symptomatique de l'attitude des pouvoirs publics européens dans ce domaine et plus généralement lorsqu'il s'agit d'arbitrer sur des sujets environnementaux face à des acteurs économiques puissants.
Accrochons-nous aux quelques progrès qui sont à l'horizon, avec la mise en place prochaine de tests d'homologation plus réalistes, la part en diminution du Diesel vis-à-vis des motorisations alternatives et des solutions de dépollution plus efficaces. Par ailleurs le Dieselgate n'est pas terminé pour autant. A suivre.
Le rapport intégral de Transport & Environment est disponible en anglais ici.
Crédit illustrations : Transport & Environment