Petite révolution dans le secteur des batteries : le réseau français RS2E, qui réunit chercheurs et industriels vient d'annoncer avoir mis au point un nouveau type de batteries au sodium, lesquelles pourraient à terme devenir une alternative aux batteries au lithium et permettre le stockage d'énergies renouvelables.
Elément notable, alors que les ressources de lithium sont très localisées sur la planète, conduisant notamment Bolloré à s'accorder avec le gouvernement bolivien pour développer l’industrie du lithium, en vue de permettre le développement de sa blue-car, le sodium s'avère quant à lui mille fois plus abondant, ce qui laisse entrevoir une véritable mise en concurrence des pays producteurs et une baisse importante du prix de revient des batteries.
Le fonctionnement du nouveau prototype mis au point par des chercheurs du CNRS et du CEA s'inspire de celui des batteries lithium-ion, des ions sodium transitant d'une électrode à l'autre dans un milieu liquide, au fil des cycles de charge et de décharge. En vue de faciliter le passage d'une batterie à l'autre, le prototype est d'un même format - dit 18650 - que celui des batteries lithium-ion aujourd'hui commercialisées (un cylindre de 1,8 cm de diamètre sur 6,5 cm de hauteur).
La quantité d'électricité que l'on peut y stocker atteint 90Wh/kg, un chiffre comparable à celui des batteries lithium-ion à leur début, précise par ailleurs le CNRS qui ajoute que 2000 cycles de charge et de décharge devraient être possibles sans perte de performance. Autre atout et non des moindres : cette nouvelle batterie est capable à la fois de se charger très rapidement et de restituer son énergie très vite.
A la fin des années 1980, cette technologie avait été écartée au profit du lithium, dont la supériorité semblait alors évidente, techniquement parlant. Trois fois plus légers que les ions sodium, les ions lithium permettent de fabriquer des batteries très légères. C'était sans compter sur son inconvénient majeur : sa relative rareté et sa localisation dans quelques endroits ciblés de la planète, deux éléments propices à la flambée des cours.
« Lorsque le marché des véhicules électriques a commencé à se développer, on a craint un envol des cours du lithium », rappelle ainsi Jean-Marie Tarascon, le spécialiste français des batteries, chimiste du solide au CNRS. Cette situation a rapidement plaidé à un retour du sodium, d'autant plus qu'on le trouve à hauteur de 2,6 % dans la croûte terrestre, contre 0,06 % à peine pour le lithium. Mieux encore, il se répartit de manière relativement égale sur la planète, notamment dans l’eau de mer, sous forme de chlorure de sodium (NaCl).
Alors que pour le lithium, toute la recherche fondamentale s’était faite en Europe, notamment en France, le transfert de technologie et la commercialisation ont eu lieu au Japon, permettant au passage à Sony de lancer sa première batterie lithium-ion en 1991. Résultat des courses : « 95 % de la fabrication Li-ion se fait aujourd’hui en Asie » déplore Jean-Marie Tarascon.
Pour éviter que cette situation ne se reproduise, le CNRS (pour la partie fondamentale) et le Liten-CEA (pour l’aspect transfert de technologie) se sont associés à une quinzaine d’industriels parmi lesquels Renault, Saft ou encore Alstom pour créer le réseau RS2E dédié aux batteries de nouvelle génération. Objectif affiché : assurer la recherche mais également le développement, afin de pouvoir lancer la commercialisation des batteries sodium-ion sur le sol européen, dès que celles-ci seront prêtes. Le prototype étant finalisé, la prochaine étape est donc d'optimiser et de fiabiliser les procédés en vue d'un futur déploiement industriel.
Selon les analystes, le marché mondial des batteries devrait atteindre 80 milliards de dollars en 2020, soit deux fois plus qu’aujourd’hui. Reste que la concurrence est loin de s'endormir. Toyota travaille d'ores et déjà sur un prototype de batterie de voiture sodium-ion. La start-up anglaise Faradion, associée à l’université d’Oxford, a fait cette année une première démonstration de vélo électrique à batterie sodium-ion.
Sources : AFP, CNRS
Crédit Photo : CNRS