Les évènements auront fait que Matthias Müller n'aura au final eu besoin que de six petits mois pour obtenir ce poste qu’il convoite depuis le printemps dernier. Il était le poulain de Ferdinand Piech, alors président du conseil de surveillance, qui l'a poussé afin de concurrencer M. Winterkorn. Mais c'est dans une toute autre circonstance de celle qu'il aurait imaginé qu'il atteint son objectif.
"Nous pouvons et nous allons surmonter cette crise", a promis le nouvel homme fort de VW, tout en s'engageant "à faire de Volkswagen une entreprise encore plus forte". Il a comme c'est l'usage rendu hommage à son prédécesseur Martin Winterkorn. Ce dernier, à la tête de VW depuis 2007, a dû se résoudre mercredi à donner sa démission tout en affirmant n'avoir jamais eu connaissance des tricheries reprochées au groupe en vue de garantir la conformité de ses moteurs aux normes anti-pollution.
Le chef du conseil de surveillance, Berthold Huber, a pour sa part qualifié l'affaire de "désastre moral et politique" pour le groupe. "Le comportement illégal d'ingénieurs et techniciens dans le développement des moteurs a choqué Volkswagen. Nous ne pouvons que nous excuser et demander aux clients, à l'opinion publique, aux autorités et aux investisseurs de nous redonner une chance de bien faire", a-t-il ajouté en se défaussant un peu rapidement sur de supposés éléments incontrôlés dans les bureaux d'études, alors que rien ne prouve à l'heure actuelle que la hiérarchie n'ait pas validé la décision d'installer le dispositif de contournement de la réglementation.
"Un petit groupe de personnes a causé un énorme préjudice" à Volkswagen, a renchéri Bernd Osterloh, représentant des salariés dans le conseil de surveillance, enfonçant ainsi un clou pour accréditer la même idée d'une responsabilité limitée à un groupe restreint, ce qui semble être l'embryon de stratégie de défense choisie par VW.
Matthias Müller est un pur produit maison, entré chez Audi en 1977 comme apprenti et ayant fait toute sa carrière dans le groupe, d'abord chez Audi, où il gravit les échelons pour se retrouver chef du produit. Il a pris la roue de Martin Winterkorn, son mentor, quand celui-ci était aux commandes à Ingolstadt, et a été nommé par celui-ci responsable de la stratégie du groupe VW en 2007, avant de prendre la direction de Porsche en 2010.
Sa compétence n'est pas en doute mais certains analystes ont exprimé quelques réserves hier sur le fait que ce n'est pas avec un homme du sérail que la nécessaire révolution peut se faire et d'autre part sur son âge, 62 ans, qui signifie que la question de sa succession va intervenir rapidement alors que le groupe a besoin de stabilité pour se réformer.
De nombreuses autres décisions ont été prises lors de ce conseil d'une importance majeure pour le groupe. Parmi elles figurent les mesures prises pour mandater des avocats en Allemagne et aux Etats-Unis et de proposer l'actuel directeur financier Hans Dieter Pötsch comme nouveau chef du conseil de surveillance. Ce poste est assuré depuis le printemps de façon intérimaire par Berthold Huber, ancien président du syndicat IG Metall, à la suite du départ du patriarche Ferdinand Pïech.
Le conseil de surveillance a également fait tomber des têtes. Le directeur des ventes du groupe, Christian Klingler, quitte pour sa part immédiatement l'entreprise. Michael Horn, le patron de VW aux Etats-Unis, reste à son poste alors que Winfried Vahland, le PDG de Skoda, devient le chef d'une nouvelle structure qui regroupe les unités américaine, canadienne et mexicaines du groupe. Il est remplacé à la tête de Skoda par Jürgen Stackmann, le président de Seat, lui-même remplacé par Luca De Meo, actuellement en charge de la vente chez Audi.
Rappelons, comme nous l'indiquions hier, que la presse allemande s'attend également à voir sauter les responsables de la recherche et développement d’Audi et Porsche, Ulrich Hackenberg et Wolfgang Hatz, ainsi que Heinz-Jakob Neusser, le directeur du développement de la marque VW.
Sources : VW, Agences de Presse, Le Monde
Crédit Photo : Porsche