Ce petit tracé utilisé par les clubs et pour les essais est surplombé par une portion, conservée pour la postérité, du terrifiant virage relevé en descente dans lequel les voitures déboulaient à vitesse maximum au bout de la longue ligne droite du circuit dans les années 1960 et 1970. Ce virage fut abandonné en 1974 après une série d'accidents mortels, les voitures devenant trop rapides pour cette portion de la piste... Après un autre briefing moins tendu que le premier, c'est en solo et sans chaperon que le constructeur nous lâchait, sous l'oeil expert de Tsugio Matsuda le champion de Super GT 2014, dans les trois citadines siglées Nismo.

Nissan March Nismo S

La Nissan March, c'est la Micra dans le reste du monde. Disponible en version Nismo depuis la fin 2013 au Japon, elle se décline désormais en version Nismo S. La March n'est pas étrangère aux versions sportives, chaque génération ayant reçu une version R ou SR servant de base à une coupe monotype populaire dans son pays d'origine. La March Nismo reprend cette tradition de petite citadine populaire en survêt'. Si la Nismo tout court ne diffère pas tellement de sa collègue normale, en reprenant le 1,2l de 79 chevaux avec la transmission CVT, la Nismo S a de toutes autres ambitions. Avec un 1,5l de 116 chevaux à 6000 tr/mn et 156 Nm à 3600 tr/mn, l'auto a de quoi déplacer ses 1010 kg avec une certaine vista, et Nismo a fait en sorte qu'elle le fasse de façon compétente en rigidifiant la caisse et en équipant la voiture de suspensions spécifiques.

L'auto se distingue assez nettement des autres March grâce à un bouclier avant, un diffuseur arrière et des bas de caisses marqués d'un filet rouge. C'est raisonnablement extraverti, sans être exagéré, l'avantage d'avoir, contrairement à la majorité des préparateurs indépendants, l'accès au bureau de style maison. A l'intérieur la différence majeure concerne les sièges sport et toujours la marque rouge en haut du volant, le détail commun aux différentes autos badgées Nismo.

La pluie s'est arrêtée mais la piste est toujours mouillée, il faut donc y aller avec une relative circonspection, mais la petite March ne se laisse pas démonter par les conditions. Les 116 chevaux répondent présents grâce à la boîte manuelle dont les premiers rapports plutôt courts donnent un caractère vif à l'auto, un artifice souvent utilisé sur les petites sportives.  Le poids contenu et les suspensions fermes donnent de la rigueur au comportement, même si la direction n'est pas aussi précise que sur les pur-sangs essayés le matin même... Dans l'ensemble l'auto est amusante, tout à fait ce qu'on attend de ce type d'auto même si il ne faut pas attendre de miracle en terme de performances. La Nissan March Nismo S est vendue 1 820 880 yens, soit l'́équivalent d'un peu plus de 14 000 euros et 20% de plus que la March de milieu de gamme.

Nissan Note Nismo S

La suivante dans la liste est plus étrange de premier abord. Contrairement à la March, la Nissan Note n'a aucune tradition sportive. Cette compacte au caractère familial et pratique ne semble pas une base idéale pour une auto de ce type, et elle porte moins naturellement les attributs sportifs que la March : bouclier avant proéminent, bas de caisse et aileron de toit détonnent un peu sur le profil de mini-monospace. Comme la March, la Note Nismo se décline en deux modèles, 1,2l de 98 chevaux à boîte CVT et 1,6l de 140 chevaux à 6400 tr/mn et 163 Nm à 4800 tr/mn pour la S, accouplé à une boîte manuelle à 5 rapports.

La recette est sensiblement identique à la March Nismo S avec suspension spécifique, rigidification, grandes roues... Plus d'efforts ont été faits sur l'intérieur avec deux beaux sièges baquets en noir et rouge, un motif de couleur que l'on retrouve dans le reste de l'habitacle qui reçoit même un peu d'Alcantara. L'ensemble est assez réussi, en particulier grâce aux baquets que l'on attend pas dans ce type d'auto.

A l'usage, la Note Nismo, à peine plus lourde que la March (1080 contre 1010), fait la différence avec celle-ci grâce à ses 140 chevaux. Bien réglée, elle tire un bon parti de son moteur et le conducteur en profite puisque les ingénieurs de Nismo ont particulièrement soigné l'acoustique de l'échappement qui vrombit de façon sympathique dans l'habitacle. Cela donne une touche ludique qui concourt, avec le comportement rigoureux et dynamique, à faire de cette auto qui parait pourtant plus forcée dans son concept une sérieuse concurrente à la référence dans cette catégorie, la Suzuki Swift Sport et ses 136 chevaux. A 2 244 240 yens, la Note Nismo S est cependant bien plus chère que la Suzuki plus comparable en terme de tarif à la March Nismo S. Cependant, en dehors de la performance pure voisine de la Swift, le niveau général de finition et d'équipement de la Note peuvent justifier de la différence, sans compter le badge Nismo, un prestige dont ne peut se targuer la Swift.

Nissan Juke Nismo RS

Dernière née de la gamme Nismo, le Juke Nismo RS constitue la première utilisation du sigle RS dénotant un niveau de préparation plus élevé en particulier via une augmentation de puissance. Dans le cas du Juke Nismo RS, on est à 218 chevaux à 6000 tr/mn et un couple de 250 Nm à 3600 tr/mn, passés aux roues avant via une boîte manuelle à 6 rapports. La voiture dont nous disposions était, contrairement aux autres, une conduite à gauche dénotant ses origines européennes. A noter que la Juke Nismo RS est également disponible en quatre roues motrices.

Nous ne nous attarderons pas sur la description de l'auto puisque nous avons eu l'opportunité d'effectuer en Europe un essai routier de l'auto plus complet à venir prochainement. Sur le petit circuit, le Juke Nismo RS impressionne logiquement par son répondant à la pédale de droite, les 218 chevaux lui permettant d'accélérer le mouvement de façon convaincante. Dès que ça tourne par contre, malgré des liaisons au sol très travaillées pour accompagner l'augmentation de puissance, le centre de gravité plus haut du Juke se fait sentir et la voiture enroule moins naturellement que les March et Note et présente une tendance au sous-virage plus marquée.

Les lois de la physique étant ce qu'elles sont, les crossovers ne seront jamais des bêtes de circuit, mais sur la route le Juke Nismo RS devrait être capable d'en remontrer au Mini Countryman JCW par exemple, surtout en version quatre roues motrices. Il a surtout le mérite de pointer la direction dans laquelle va Nismo pour ses futurs produits, une recherche de la performance qui devrait faire honneur à l'historique du nom Nismo.

Conclusion

A l'issue de cette journée au volant, il est tentant d'essayer de dégager les points communs à toutes les autos, très différentes les unes des autres, qui sont passées entre nos mains. La première constatation qui s'impose est que Nissan prend le label Nismo au sérieux. Le travail réalisé sur la modeste March, s'il n'a rien à voir bien évidemment avec celui effectué sur la GT-R, n'est pas un simple exercice cosmétique. La petite auto se trouve réellement transformée et en ressort avec un caractère sportif affirmé, comme c'est le cas avec toutes les autos essayées ce jour dont toutes ne sont pourtant pas au départ des candidates naturelles à un tel traitement . La seconde tendance qui se dégage, de façon paradoxale, est que ce travail de préparation, somme toute logique de la part de ce qui est essentiellement un département compétition, s'accompagne d'une construction d'identité très réfléchie : les choix de couleurs, de matériaux, de style entre les autos sont cohérents, ce qui n'avait pas toujours été le cas dans le passé au Japon, et démontrent que Nissan veut faire de Nismo une marque immédiatement reconnaissable.

Le coup de coeur de la journée est pour la Note Nismo S, une auto amusante et capable qui réussit une inattendue synthèse entre compacte familiale pratique et boule de nerfs. Elle mériterait de voir plus de pays en dehors des routes japonaises.

Crédit photos : Yuji Shimizu/le blog auto sauf (2) PLR/le blog auto