Abaisser la limitation de vitesse du boulevard périphérique à 70km/h est une vieille demande de Bertrand Delanoé. Si l'on en croit le journal Le Monde, ce dernier devrait voir cette mesure impopulaire validée par le Gouvernement qui attend l'aval du Conseil d'Etat. Plus généralement la "bagnole" est au coeur même de la bataille que se livrent les deux candidates au poste de premier édile de la capitale.
Un impact réel sur la pollution de l'air et sonore ? Pas sur
Manuel Valls ne s'était pas montré hostile à la mesure et paressait sensible aux arguments de la majorité municipale. L'abaissement aura "un impact positif en termes de sécurité routière, de lutte contre la pollution et contre les nuisances sonores" expliquait Julien Bargeton, adjoint au Maire de Paris chargé des transports. Des arguments que l'on pourrait entendre s'ils n'étaient pas sujets à controverse. En effet, Pierre Chasseray, Délégué Général de l'association 40 millions d'automobilistes les dénonce ce matin sur Europe 1.
Selon lui, une baisse de la vitesse de 10km/h abaissera peut-être les émissions de CO2 (et encore cela dépendra du rapport de boîte enclenché), mais cela devrait augmenter les émissions de benzène (lire les conclusions de cette étude en PACA, page 6). Bref on diminue un gaz à effet de serre mais on augmente un polluant dont le caractère cancérigène n'est plus à prouver. Pour rappel le benzène à été introduit dans l'essence pour remplacer le plomb.
Autre point que dénonce 40 millions d'automobilistes, la réduction sonore de 1 dB(A) sera peu perceptible par les automobilistes ou les riverains du périphérique. Pour que cela aie un impact perceptible il faudrait selon Bruitparif diminuer la vitesse de 30km/h et donc mettre le boulevard à 50 km/h ou la ville en zone 30. Généralisation de la zone 30 dans tout Paris que propose d'ailleurs la candidate PS.
Le PV de stationnement, un enjeu électoraliste
Plus généralement la place de l'Homo automobilicus en Ile de France et dans la capitale est au milieu de la "guerre" que se livrent les deux candidates favorites pour la Mairie de Paris. En droite ligne du Maire actuel, Anne Hidalgo souhaite diminuer la présence de la voiture à Paris et est favorable à l'abaissement de la vitesse mais également au passage des PVs de stationnement (récemment dépénalisés donc libres en terme de montant) à 36 euros.
Un moyen de dissuader les gens de frauder et ainsi rapporter plus dans les caisses de la ville tout en incitant les automobilistes à prendre les transports en commun. "On verra à quel niveau on le fixe. Mais je vous donne un chiffre puisqu'on nous compare souvent avec Londres : 140 euros le PV pour stationnement illicite à Londres" déclare A. Hidalgo.
Du coté de Nathalie Kosciusko Morizet en revanche, favoriser le transit de Paris est essentiel pour désengorger la capitale. C'est l'argument qui fut utilisé pour la construction des voies sur berges qui permettaient à l'époque de rejoindre l'opposé de Paris sans passer par le sacro-saint périphe. Si elle ne dit pas ouvertement être contre l'abaissement des limitations de vitesse, en revanche elle se positionne clairement contre les PVs à 36 euros.
"Beaucoup ne paient pas parce que c'est très compliqué (...). Plus de la moitié du stationnement n'est pas perçu. En rendant les choses plus simples, on aura un meilleur taux de perception" déclare la candidate UMP. Voilà sans doute ce qui gène le plus avec les candidats à la Mairie de Paris (et d'autres municipalités). Ils ne voient l'automobiliste que comme une source de revenus pour la Mairie. Exit le stationnement payant pour "organiser un roulement" des voitures stationnées dans certaines zones, bonjour le péage urbain qui ne dit pas son nom.
Stationnement, véhicules électriques, tout est bon
Coté stationnement justement, Anne Hidalgo propose de poursuivre la politique de réduction des places de parking en surface au contraire de Nathalie Kosciusco-Morizet qui propose pour sa part de créer des parkings pour éviter qu'à la circulation "normale" ne se rajoutent ceux qui tournent pour trouver une place. En revanche les deux candidates se rejoignent sur le fait qu'il faut favoriser les transports en commun mais aussi l'autopartage et aussi les véhicules électriques.
Anne Hidalgo propose une année d'abonnement gratuit à Autolib' pour les jeunes permis mais aussi "aux Parisiens qui décident d'abandonner leur voiture individuelle". Elle propose également de mettre en place un service de scooters électrique en libre-service sur le modèle Autolib'.
Nathalie Kosciusco-Morizet évoque pour sa part la place du diesel dans le parc automobile de la ville de Paris. "La ville de Paris a commis des fautes lourdes" déclare-t-elle, et elle "propose qu'on arrête d'acheter des véhicules diesel dans la flotte publique". Voilà qui ne manque pas de bon sens et on se demande comment le Maire actuel pourtant favorable à la voiture électrique n'a pas pensé avant à arrêter d'acheter des utilitaires diesel.
Bref l'automobile est au coeur de la campagne des municipales, à Paris mais aussi ailleurs. Il n'est pas sur que l'abaissement à 70km/h de la vitesse limite sur le périphérique parisien plaise à tout le monde, mais ces automobilistes du périphe ne votent pas à Paris la plupart du temps. On peut les mécontenter.
Source : Le Monde, Europe 1, 40 millions d'automobilistes, illustration : Wikimedia (Geralix)