L'an dernier, nous évoquions les ambitions du continent asiatique. En 2013, un pays a mis le paquet sur le sport auto : la Chine. De jeunes pilotes arrivent en ordre dispersé en F3 et en FR 2.0. La motivation est là. Jusqu'ici, les résultats ont du mal à suivre. Mais ce n'est qu'un début...Cette année marque le dixième anniversaire du Grand Prix de Chine. Or, à ce jour, aucun pilote du Pays du Milieu n'a pris le départ du Grand Prix national (ni d'aucun Grand Prix, d'ailleurs.) Pour la fédération, c'est un affront terrible. Tout le monde se dit que parmi 1,35 milliard d'habitants, il y a forcément un Vettel qui se cache quelque part ! D'autant plus que les "ennemis intimes" Japonais et Indiens ont eux eu des pilotes de F1.
En face, il y a des pilotes motivés. Terminés, les jeunes qui s'improvisent pilote à 20 ans. Ils ont grandi en regardant Sebastian Vettel, Lewis Hamilton ou Fernando Alonso à la TV. Ils ont limé leurs fonds de culotte en karting. Et maintenant, ils veulent conquérir l'Europe. Ils arrivent en ordre dispersé, avec des parcours et des ambitions hétérogènes. Les sociétés de management jouent les intermédiaires. Imperial Motor Sport (Ma Qin Hua, les frères Zhu...) est la première à expédier des Chinois en Europe. Kang Racing Company (Sun Zheng, Leo Yee...) lui emboîte le pas cette année. Mukesh Jani (le père de Neel), Michael Schneider (patron du team de FR 2.0 Interwetten.com) et Cheng Cong Fu viennent de créer un troisième larron, JCS Motorsport Academy.
Les stars
Ma Qin Hua est le dernier représentant de la première génération des pilotes chinois. Après son deal raté avec HRT, il rebondit chez Caterham. Bilan : une manche de GP2 écourtée (pour cause de tourista carabinée) et une apparition aux essais libres du Grand Prix de Chine (où il est carrément à l'arrêt.) L'écurie du magnat malaisien s'énerve et Ma est prié de céder sa place à Alexander Rossi.
Partir en Europe, ça signifie découvrir de nouveaux circuits, de nouvelles disciplines, etc. Pour certaines stars, c'est également synonyme de retour à l'anonymat. Courageusement, "Martin" Hong Wei Cao part en Grande-Bretagne, alors qu'on lui propose un beau baquet en CTCC. Les débuts sont rudes, mais après deux saisons de Formule Renault BARC/Protyre, il décroche 2 victoires. Grâce à cela, il décroche son billet pour la F3.
Autre méga-star locale, Sun Zheng trouve qu'il a fait le tour des circuits chinois fin 2012. Et pour cause : il a couru de front dans une demi-douzaine de disciplines ! Il s'aligne en British F3, avec le modeste CF Racing. Il y remporte le titre en National avec 6 victoires en 12 courses. Certes, seuls deux pilotes (Chris Vlok et lui) y courent à temps plein. Mais ça reste encourageant pour un pilote jusqu'ici plutôt brouillon et jemenfoutiste. Il devrait passer en GP3 en 2014, avec son pote Adderly Fong.
Les invités surprises
Lorsque Leo Yee débarque à un meeting de Protyre Formula Renault, c'est un parfait inconnu... Et il est tout aussi méconnu en Chine. Il enchaîne les allers et venues entre la Grande-Bretagne et la Chine, toujours en FR. En Protyre, 'King Yee grappille quelques points. Mais c'est son bilan chinois qui impressionne : trois victoires en quatre courses. Le voilà bombardé "gros bras".
Chinois de Hong-Kong, Wei Fung Thong effectue quelques piges en FF et en Protyre FR. Pas de podiums, mais un pole et un meilleur tour. Pour 2014, il vise le British F3.
David Cheng est sino-américain. Il se consacre à l'endurance, où il devient champion d'Asian Le Mans Series avec Oak Racing. A l'occasion, il roule en Formula Pacific, où il gagne une course.
Les flops
Yee, Thong et Cheng sont des pilotes discrets mais rapides. Ils font figure d'exceptions. L’archétype du Chinois, c'est plutôt le pilote qui arrive en fanfare et termine bon dernier.
Adderly Fong (qui vient d'obtenir la nationalité chinoise) est l'un des seuls capables de mobiliser le public et les sponsors. Il est à "ça" d'un coup de fil de Bernie Ecclestone. Le problème, c'est qu'il manque de vitesse et de constance. En 2013, il passe en GP3 après 5 saisons de F3. Il n'y obtient que 2 points. Son futur passe davantage par l'endurance, avec Audi.
Li Zhi Cong s'offre des tests d'intersaisons chez Carlin, avec coach personnel. Pour son unique sortie en British F3, il n'arrive même pas à suivre les National ! Ca ne l'empêche pas de clamer qu'en 2015, il sera en F1 !
Zhu Hu An (ci-dessous) est à l'arrêt en "Championship" en Euro F3 Open. Un changement d'équipe avec passage en "A" ne lui permet pas de briller davantage. Au moins, c'est mieux que son frère "David". L'ex-pilote de F2 passe toute l'année sur le banc de touche, ne roulant qu'en tourisme.
Kang Ling passe directement du kart à l'Autosport Academy. Il est le seul à n'avoir jamais couru en Chine. Comme nombre de ses compatriotes, il squatte le fond de grille.
Enfin, il y a le gag Zou Si Rui. En F4, les points sont attribués jusqu'au 20e rang et il y a 24 voitures au départ. "L'exploit" de Zou est de terminer la saison non-classé !
Et les constructeurs ?
Ils ont déjà donné ! Certes, le marché chinois est immense. Un pilote chinois offrirait une exposition considérable, bien au-delà du public -restreint- de passionnés, avec de belles retombées. Il suffit de voir la couverture médiatique de Sun Zheng à Macao.
Les constructeurs ont déjà essayé des pilotes chinois, il y a quelques années. Même Red Bull y a mis en place une filière. Mais les Ho-Pin Tung, Cheng Cong Fu et autres Shan Qi Zhang ont déçu. D'où une politique du wait and see, sauf pour les programmes locaux. A talent égal, un Chinois aura davantage de chance d'être recruté. Cependant, pour l'instant, aucun pilote du Pays du Milieu n'est vraiment "évident".
Reste que certains, comme Ma Qin Hua, ont des poches assez bien remplies. En ces temps où nombre d'écuries de F1 tirent la langue, il serait dommage de se priver de tels "talents"...