L'oubli des "s" est intentionnel. C'est un hommage à une "une" d'Auto-Hebdo suite à un triplé dans la Sarthe (le maquettiste était un peu trop fébrile.) Le retour annoncé de Porsche en LM P1, pour 2014 mérite bien un hommage. Porsche au Mans, c'est 16 victoires (un record), 63 participations (un autre record) et au moins 1 voiture à l'arrivée à chaque édition, depuis 1951.La première participation est une aventure. Le sport fait parti de l'ADN Porsche. La 64 K10 de 1939 (véritable brouillon de la 356) est créée pour la course Berlin-Rome (annulée à cause de la guerre.) Mais au milieu du siècle, le constructeur n'est qu'une PME sans moyens pour organiser un vrai service compétition. Auguste Veuillet, importateur Porsche pour la France, trouve que la 356 a du potentiel pour les 24 heures du Mans. Il récupère 3 coupés produit à Gmünd (car en aluminium.) Hélas, les 2 sont détruites. La 3e est construites avec les pièces saines des autres. Aux 24 heures 1951, Veuillet prend le volant avec Charles Faroux et gagne en 1100cm3. L'histoire est en marche!
La première vraie Porsche de compétition est aussi une initiative privée. En 1953, Walter Glöcker, agent VW à Francfort, débarque au Mans avec des coupés très modifiés: moteurs centraux, fonctionnants à l'éthanol. Ils les baptise "Spyder". Nouvelle victoire de classe -en 1500cm3-. Reste que les pilotes se plaignent que ce sont des saunas ambulant! Porsche se penche sur les Spyder de Glöcker et en lance une version décapsulée, la 550 Spyder.
Porsche est un adepte de l'amélioration continue. Dans la deuxième moitié des années 50, le Spyder (qui désigne désormais une voiture ouverte) évolue: 550/1500 RS, 550A RS, 718 Spyder, RS 60, RS 61, WRS... Mais malgré un aérodynamisme poussé, les Porsche 4 cylindres ne peuvent lutter face aux Ferrari. Les années 60 sont celles de la course à l'armement: la lourde 904, cède vite sa place à la 906, puis à la 908, premier modèle capable de viser le "scratch". En 1968, une évolution très profilée de la 908 frôle la victoire avec Hans Hermann et Gérard Larrousse. Mais au terme d'une remontée mémorable, Jacky Ickx s'impose avec la "vieille" GT40. Justement, l'ACO est exaspéré par la domination des GT40. Un nouveau règlement est rédigé. Porsche réplique avec l'arme absolue: la 917. C'est un monstre de puissance qui atteint 380km/h au bout des Hunaudières. Après une saison pour dompter la bête, Hans Hermann et Richard Attwood ouvrent le palmarès de Porsche, en 1970. En 1971, Helmut Marko et Gijs Van Lennep se promènent; leur moyenne (220,2km/h) reste la plus élevée à ce jour! Enfin, comment ne pas évoquer le film Le Mans, où les 917 Gulf tiennent le premier rôle?
Ce qui devait arriver, arriva: les 917 sont bannies. Porsche claque la porte, mais les privés prennent le relais. Reinhold Jöst ressort ainsi ses vieilles 908. Porsche revient bien plus tard avec la 935. Il est persuadé qu'il va dominer. Mais les débuts sont chaotiques et il faut improviser: un châssis de 917/30, un moteur de Carrera RSR et voici la barquette 936! Cette voiture rapporte deux victoires supplémentaires. Puis, la 935 résout enfin ses problèmes de jeunesse. Les frères Kremer modifient leur voiture et c'est elle qui s'impose en 1979. Du coup, les autres propriétaires de 935 les transforment en Kremer!
L'ACO veut à tout pris éviter une trop longue domination d'une même voiture. Néanmoins, les changements incessants de règlements pénalisent les constructeurs qui arriveraient en cours de route. La FIA impose davantage de stabilité avec les Groupe C, dans les années 80. Les 936 C, puis 956/962 sont ainsi longtemps invincibles. En 1982, elles s'offrent un triplé dans l'ordre des numéros de course! Le constructeur a les moyens de s'offrir des stars comme Jacky Ickx, Hans Stuck, Jochen Mass ou les Andretti père et fils. Le constructeur produit des châssis en quantité industrielle. Au Mans, il débarque avec un camion rempli de pièces pour les privés. C'est comme à Castorama: on choisi et on paye en caisse! Il n'y a plus de compétition. La victoire de la Jaguar XJR9, en 1988, est presque un soulagement pour les fans d'endurance.
Le groupe C aura une lente agonie. Que faire ensuite? Faut-il accepter les GT? Ou laisser les derniers protos rouler (afin d'ouvrir la porte à Courage et WR)? L'ACO tente des équivalences. Porsche et Joest profitent du vide réglementaire pour gagner en 1994, 1996 et 1997. L'heure est alors au FIA-GT. En acceptant les McLaren F1 GTR, la fédération a ouvert la porte aux vraies-fausses GT. Porsche crée la 911 GT1: un proto avec une peau évoquant vaguement la 911. Il débarque en fanfare en 1996, les privés sortent le chéquier et... Mercedes arrive de nul part avec une CLK-GTR qui surclasse les 911 GT1 en FIA-GT! Pour 1998, le constructeur revoit sa copie. La 911 GT1/98 offre une 16e victoire au Mans. A la surprise générale, Zuffenhausen l'envoi au musée à la fin de la saison. Tout le monde est pris au dépourvu; Audi accueille pilote et ingénieurs à bras ouvert. Sans oublier l'ensemble du team Joest.
A partir de 1998, il n'y aura plus de Porsche capable de viser la victoire absolue. Reste les innombrables 911 privées. La Carrera GT dérive d'un projet mort-né de LMP1 et paradoxalement, elle ne connaitra pas la course. En 2005, il construit une LMP2, confiée à Penske (qui n'a pourtant plus eu de programme en endurance depuis les années 70!) Après avoir survollé l'ALMS, elle arrive dans la Sarthe en 2008. Hélas, elle subit une double-peine. D'une part, l'ACO ne voudrait pas voir une LMP2 battre les LMP1 diesel de Peugeot et Audi. D'où un règlement restrictif. Puis, lors du rachat par VW, Audi torpille proprement la voiture. La future 918 dérive en ligne droite de la RS Spyder.
Et donc, aujourd'hui, avec la LM P1, un nouveau chapitre s'ouvre...
Crédits photos: Porsche, sauf photo en une et photos 8, 9, 10, 12 et 13 (Dome) et photo 4 (Ford.)
A lire également:
Souvenirs, souvenirs: joyeux anniversaire, la 911!
Souvenirs, souvenirs: passionné-mans