C'est le rebadgage, dans sa forme la plus basique. Lorsque vous ouvrirez la galerie, regardez bien les noms des 21 voitures, car vous risquez d'être surpris...
Historiquement, le phénomène est presque aussi ancien que l'automobile elle-même.
Cela commence par les premiers concessionnaires. Certains aiment bien apposer leur nom sur les voitures qu'ils vendent. C'est le cas d'Emile Roger, vendeurs de Benz à Paris (qu'il renomme "Roger".)
Le plus célèbre d'entre-eux est Emile Jellinek, négociant -entre autres- de Daimler à Nice. Fils et petit-fils de rabbins, Jellinek a des tendances mystiques: il est persuadé que sa fille, Mercédès, a des pouvoirs magiques. Ainsi, il renomme tout (sa villa, son garage, etc), Mercédès (avec accents.) Y compris les voitures qu'ils vend. Les Daimler de Jellinek se vendront si bien que la marque se changera en Mercedes (sans accents!)
Dans l'entre-deux guerre, la mode est à la production sous licence. Elle touche l'ensemble de l'industrie dés la fin du XIXe siècle et l'automobile finit par y céder. Même des constructeurs exclusifs comme Hispano-Suiza ou Amilcar cèderont les droits de leurs modèles.
En théorie, ça n'a que des avantages. Vous vendez une usine clef-en-main à votre partenaire étranger, il se débrouille et en plus, vous percevez des royalties sur chaque voiture vendue!
En pratique, les concédant fait souvent la grimace. Si le partenaire veut une licence, c'est souvent qu'il est novice. Dans beaucoup de cas, il commet des erreurs, faute d'expérience et de moyens, qui lui sont fatales.
Parfois l'entreprise marche. Le partenaire s'enhardit. Le carottage classique consiste à modifier quelques pièces, puis à dire: "C'est une création originale, je n'ai plus à vous payer de droits!" C'est ce que BMW fera avec Austin, pour la Dixi.
En général, les contrats sont liés à des stratégies politiques: anciennes colonies, pays amis, etc. Fiat, lui, ne s’embarrasse pas de géostratégie. Il signe avec tout le monde: L'Allemagne nazie (NSU-Fiat), la France du Front Populaire (Simca), l'Espagne franquiste (Seat), la Pologne communiste (FSO), l'URSS (Avtovaz/Lada), l'Inde socialiste (Premier), la Corée du Sud (Kia), etc. En plus, il s'agit de coopération à long-terme, sur plusieurs modèles (les autres contrats de licence ne porte généralement que sur une seule voiture.)
Dans les années 60-70, le rebadgage se drappe de logiques de groupe. On s'imagine qu'en vendant un même modèle sous plusieurs marques, on peut toucher plusieurs clientèles. Ainsi, la première Polo n'est qu'une Audi 50 avec un badge VW (et non l'inverse.)
Aux Etats-Unis, les "trois grands" se réveillent un matin avec un gros problème: avec la crise de 1973, les Américains veulent des petites voitures. Ils essayent d'abord d'en construire (cf. les Ford Pinto et autres Chevrolet Citation.) Sans succès. Ils tentent ensuite de profiter de leurs filiales européennes et de vendre aux USA leurs modèles. Là encore, c'est un flop.
Puisque les Japonais sont les rois des "importations", ils travailleront avec l'ennemi! Ford fait un peu d'effort pour relooker des Mazda. GM crée une marque pour ses voitures rebadgées. Quant à Chrysler, il ne prend même pas la peine de renommer ses Mitsubishi!
La fin des années 90 marque l'ère des grandes fusions-acquisitions. Le projet de vendre une même voiture sous plusieurs marques refait surface. Il se justifie cette fois par un positionnement géographique.
Bien sûr, ça s'avère être une très mauvaise idée. Les modèles exogènes s'insèrent mal dans la gamme, y compris dans les pays émergents. Au point de tuer Saturn, devenu le spécialiste de l'Opel rebadgée... Mais ça n'empêche pas Chrysler et Lancia de faire cela aujourd'hui!
Crédits photos: Lancia (photo en une), Daimler (photos 1 et 2), BMW (photo 3), Skoda (photo 4), Seat (photo 5), Dacia (photo 6), Isuzu (photo 7), GM (photos 8, 16 et 18), Ford (photo 9), Nissan (photo 10), Hyundai (photo 11), Subaru (photo 12), Chrysler (photos 13 et 19), Kia (photo 14), Mazda (photo 15), Citroën (photo 17), Daihatsu (photo 20) et Mahindra (photo 21)
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