Il imagine ainsi un parcours extraordinaire partant d’Europe. Le tracé rejoindrait ensuite Alger, puis traverserait Agadez pour enfin s’achever à Dakar. Le projet se concrétise rapidement. Le Paris-Dakar s’ouvre sur un monde inconnu, dans lequel son créateur, Thierry Sabine, apparaît comme un véritable pionnier. Son credo sera alors : « Un défi pour ceux qui partent. Du rêve pour ceux qui restent. »
L’Afrique, continent aux multiples facettes, propose en effet cet élixir parfait mélangeant rêve et compétition. Le 26 décembre 1978, s’élance ainsi de la place du Trocadéro le premier Paris-Dakar. C’était il y a 34 ans... Les 80 voitures, 90 motos et 12 camions ont 3 semaines pour parcourir les 10.000 kilomètres de cailloux et de poussière, dont 3.168 km de spéciales, sur les pistes d’Algérie, du Niger, du Mali, de la Haute-Volta et du Sénégal. Parmi eux, Cyril Neveu, Christian Rayer, Jean-Claude Morelet dit «Fenouil», et Hubert Auriol : des noms déjà bien connus au départ de cette première édition et qui vont d'ailleurs se confondre avec la légende naissante du Dakar.
Pour cette première édition, il n'y aura qu'un seul vainqueur, le classement général regroupant motos, autos et camions. En ce lendemain de Noël, le départ prévu à 8h30 est retardé. A 9h15, M. Dehais, adjoint au maire de Paris, lève enfin son drapeau : « Je donne le départ, je suis heureux. Bonne chance à tous, partez et bonne route » Les équipages s’élancent de l’esplanade du Trocadéro pour vivre une aventure unique. Le premier prologue de l’histoire a lieu sur un terrain militaire proche d’Orléans, avant de prendre la direction d’Alger et la mystérieuse Afrique.
La première déception est féminine. La motarde Corinne Copenhague (une des sept femmes inscrites dans ce rallye) abandonne à Fontainebleau, après un accident avec une voiture à seulement 60km du départ. Chaque soir Max Meynier, animateur de l’émission « Les routiers sont sympas », fait vivre le rallye en direct aux auditeurs de RTL à bord de son Toyota Land Cruiser. La première spéciale de 270km, reliant Reggane à In Salah en Algerie, est remportée par Jacky Privé (Range Rover) devant Christophe Neveu (Range Rover), le frère de Cyril, et Christian Rayer (Yamaha XT 500), le premier des motards.
Les premières galères arrivent dès la troisième spéciale entre Arlit et Agadez (230 km). Un quart des concurrents s’égare au coeur de l’Aïr. Les motos en profitent pour truster les douze premières places de l’étape et les trois premières du général. Jean-Claude Olivier (Sonauto Yamaha-BP) s’adjuge l’étape alors que Patrick Schaal (Yamaha XT 500) devient leader du classement général. La première auto est la 504 des Corses Moreau et Touya.
A mi-course, lors de la 4ème étape, casse en série à l’arrivée au Niger lors de la spéciale Tahoua-Talchot. Jean-Claude Olivier, auteur du temps scratch, est victime d’une fracture du poignet suite à un accrochage avec le véhicule de Christophe Neveu, pourtant mis hors course. Il doit renoncer. Même punition pour Christian Desnoyers, champion de France de trial 1978. En revanche, Philippe Hayat et Jean-Pierre Domblides sont en passe de remporter leur audacieux pari : rejoindre Dakar à bord d'une Renault KZ de 1927 (le même modèle que celui conduit par le commandant Etienne et qui avait relié en janvier 1927 Oran au Cap, soit 18 000 kilomètres en trente-six jours).
Cyril Neveu prend la tête du rallye après la sixième spéciale marathon de 600km entre Gao et Mopti, suite à la chute de Schaal qui souffre d'une fracture ouverte du petit doigt. Lors de la 7ème étape, Bamako fête le Dakar. Les « fous du désert » sont accueillis par des haies humaines. Dans l’étape du Sahel, Bamako-Nioro, un seul concurrent arrive dans les délais : Philippe Vassard, au guidon de sa Honda. Le 14 janvier 1979, après une dernière spéciale de 96km entre Bakel et Dakar (96 km), les soixante-quatorze véhicules rescapés en terminent avec un final sur les bords du Lac Rose à Dakar. Les premiers princes du désert se nomment Neveu, Comte et Vassard. Sa première reine est Martine de Cortanze. Elle termine en dix-neuvième position au guidon de sa Honda 250 XLS.
Cyril Neveu, encore inconnu, n’aura de cesse ensuite de cumuler les performances sportives. Son analyse à froid peut faire sourire lorsque l’on connaît les performances qu’il produira ensuite : « J’avais vingt et un ans, déjà une expérience de l’Afrique avec l’Abidjan-Nice. J’étais comme tous les autres, un poireau qui venait au guidon de sa 500 XT. Sans les sacoches en cuir… ». Le premier équipage auto est celui de Genestier, Terbiaut et Lemordant (Range Rover), qui n’arrive cependant que quatrième. Pour cette première expérience, les temps et les classements ne comptent pas. La découverte de soi, le dépassement de ses propres limites et l’aventure priment avant tout.
Ce premier Dakar est une immense réussite. Son impact, tant par l’ampleur des paysages découverts que par l’originalité du tracé, s’avère retentissant. Le rallye change définitivement la vie de chaque concurrent. La plus grande épreuve de rallye-raid de tous les temps est née. Hubert Auriol, directeur du Dakar de 1994 à 2003 termine 12ème. Comme cela arrivera malheureusement à de nombreuses reprises par la suite, le rallye perd déjà un de ses pilotes. Suite à une chute de sa Yamaha alors qu'il tentait d'attacher son casque lors d'une liaison vers le départ de la 4eme étape, Patrick Dodin est décédé à Paris après son rapatriement.
Source : Dakar et RTL
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