Depuis la signature de l'accord de coopération fin 2009 entre Suzuki et Volkswagen, la situation a peu à peu glissé de l'amitié à l'entente cordiale, puis au froid glacial. Entre deux fortes personnalités comme Ferdinand Piëch et Osamu Suzuki, il pouvait difficilement en être autrement.
En prenant 19,9% du capital de Suzuki, Volkswagen espérait sans doute mettre la main sur le spécialiste mondial de la petite voiture, et par ailleurs numéro un du marché indien pour lequel on nourrit de grandes ambitions à Wolfsburg. Dès le début, les deux partenaires ont bien précisé qu'il s'agissait d'un accord de coopération entre partenaires égaux. C'était sans doute compter sans l'aspect humain...
Aujourd'hui, la situation est au point mort. Deux ans après la signature de l'accord, aucun résultat concret n'est apparu, ni d'un côté, ni de l'autre. C'est que Suzuki tient fermement à son indépendance, chose que Volkswagen semble avoir oublié. Martin Winterkorn met le feux aux poudres au printemps lors de la réunion des actionnaires de Volkswagen, en précisant que le groupe allemand a la possibilité d'influencer les décisions de son partenaire Japonais... Une déclaration qui est prise pour de l'arrogance, et à laquelle quoi Osamu Suzuki a répondu vertement par presse et blog interposés. Et en appuyant là où ça fait mal : Suzuki n'aurait trouvé aucune technologie intéressante chez Volkswagen... Certains ont du avaler de travers en lisant ces lignes du côté de Wolfsburg.
Entre temps, le constructeur a affirmé haut et fort son indépendance, en choisissant Fiat pour la fourniture de moteurs diesel pour la prochaine génération de SX4. Un camouflet pour Volkswagen qui n'était vraisemblablement même pas au courant des discussions entre Hamamatsu et Turin...
Ces derniers jours, Osamu Suzuki est allé encore plus loin, puisqu'il a déclaré "Volkswagen ne nous parle plus, et nous n'avons pas l'intention non plus de leur parler". La messe est dite, et chez Suzuki ont doit finalement regretter les 27 ans de coopération somme toute paisible avec GM...
La grande question semble surtout aujourd'hui être : comment sortir de la crise. Il semble bien que ni Ferdinand Piëch ni Osamu Suzuki ne voudront perdre la face, mais la situation est aujourd'hui bloquée, et les deux (ex)partenaires perdront probablement tous deux à la séparation. Mais celui qui perdra le plus n'est pas forcément celui que l'on croit.
Suzuki a en effet besoin d'un partenaire pour certains composants techniques, ou pour des économies d'échelle. Mais à Hamamatsu, on est habitué aux échanges ponctuels, à vendre ses voitures à d'autres constructeurs pour remplir les usines...
Volkswagen comptait en revanche sur Suzuki pour mieux s'implanter en Asie, où il reste peu présent hors de Chine. Et l'expérience de Suzuki en matière de petites voitures économiques était crucial pour cette partie de la conquête du monde...
Dans cette situation, Osamu Suzuki a plutôt intérêt à éviter les allées du Hall 3.0, domaine du groupe Volkswagen, lors de sa visite du salon de Francfort.