A Barcelone, il y a non pas un, ni deux, mais quatre circuits automobile! Vous connaissez Montmelo et ses spectateurs racistes. Les plus vieux d'entre-vous se rappellent peut-être du dangereux parc de Montjuic (où l'on tournait dans le sens anti-horaire) voir des rues de Pedralbes (non moins dangereuses.) Mais saviez-vous qu'en 1923, un circuit permanent était sorti de terre, à Sitges?
La première grande course disputée près de Barcelone fut la Copa de Catalunya, en 1908. Le "circuit" de Baix Penedes empruntait différentes routes entre la cote et les terres. Pendant une dizaine d'années, différentes configurations utilisant les routes du coin furent testées. Mais elles étaient toutes jugées inadaptées aux vitesses atteintes par les bolides.
Frick Armangue met tout le monde d'accord en 1922. Il fonde la société Autodromo Nacional et fait construire à Sitges le premier tracé permanent Espagnol. Rien n'est trop beau pour Armangue: son ovale de 2km de long est fait de segments de bétons (comme Montlhéry) et le budget est astronomique (4 millions de pésétas.) Pour effectuer le temps de base du circuit, il se fait carrément construire une Hispano-Suiza sur mesure!
Le 28 octobre 1923, une première course y est disputée: rien de moins que le 2e Grand Prix d'Espagne de l'histoire (10 ans après le premier, couru près de Madrid.) Alberto Divo sur Sunbeam, ouvre le palmarès au terme d'une lutte avec Louis Zborowski. Une semaine après, ce sont des cyclecars qui tournent. Robert Benoist impose sa Salmson (la N°11 en haut de l'article?) devant du beau monde, comme Tazio Nuvolari.
Les bâtisseurs du circuit demandent à Autodromo Nacional de payer immédiatement. Du coup, les caisses sont vides et Divo et Benoist repartirent de Stiges sans toucher une péséta. Très vite, le bruit se répandit qu'à Sitges, on courrait "gratuitement". En plus, avec ses lignes droites qui se terminent par des virages inclinés à 60° (90° au sommet), c'est un circuit dangereux.
Dés 1925, "Autodromo Nacional" fait faillite. En 1929, Edgar Morawitz achète le circuit et désormais, ce sont les motards qui tournent à Sitges. Morawitz doit faire face à un autre problème: Stiges est à 24km de Barcelone (8km aujourd'hui), ce qui est trop loin pour le public, dans une Espagne guère motorisée. Quand la guerre éclate, Morawitz s'engage avec les Républicains, abandonnant le circuit.
Au début des années 50, une dernière course eu lieu, le Volta a Catalunya, mais Pedralbes lui a déjà volé la vedette.
Et aujourd'hui? Vous pensez que Sitges-Terramar a été rasé et remplacé par un centre commercial ou une résidence pour retraités Anglais? Et bien non, le circuit existe toujours! Son relatif isolement et son positionnement à l'intérieur des terres l'a préservé de l'appétit des promoteurs. De plus, grâce aux moyens déployés par Armangue (et le climat chaud et sec de la région), il a bien vieilli.
Le site abrite désormais un élevage de poulets en batterie. Le fermier a d'ailleurs pris l'habitude de lâcher les chiens sur les nostalgiques qui viennent voir le circuit. Jusqu'à récemment, la mairie de Sitges ne savait même pas qu'elle possédait un circuit à proximité!
Ces dernières années, des associations se sont montés pour tenter de faire revivre le circuit. Mais tout est bloqué par le prix demandé par le fermier pour céder ses terres: 10 millions d'euros! A vot' bon cur, messieurs dames...
Parce que des images valent mieux qu'un long discours:
http://www.youtube.com/watch?v=5OT69YFeako
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